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[LIVRE] La Grève (Ayn Rand)

Message » 21 Mar 2013 0:44

Ayant relu La Source Vive récemment, je ne peux que profiter de ce nouveau forum pour parler d'Ayn Rand. Et de chaudement recommander La Grève.

La Grève, c'est la pierre angulaire de l’œuvre de cette philosophe-romancière hors du commun. Révélation pour beaucoup, il est le "deuxième livre le plus influent" après La Bible, au point que nombreux sont ceux qui ont "leur moment Ayn Rand" comme le dit Hillary Clinton (même Poutine avait demandé un entretien à son sujet)... Et c'est aussi un des romans les plus vendus de tous les temps.

Édité en 1957, il se glisse dans l'actualité d'une manière effarante, un poil prophéique, ce qui explique pourquoi les ventes ont triplé depuis 2009 aux USA...

Il est disponible depuis un peu plus d'un an en version française. Avant, il n'était lisible que par le biais d'une traduction pirate.

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Mais qui est John Galt ? :siffle:
Cylon
 
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Message » 21 Mar 2013 4:54

La grève est un livre fondamental.
Au même titre que la saga de Gilgamesh, la Bible, le livre des morts égyptien, L'Illiade et l'Odyssée, la saga arthurienne ou...en réalité n'importe quel ouvrage nous témoignant des assises mythiques fondamentales d'une civilisation.
La grève a pour le moins été reconnu comme tel par les citoyens américains : il est le miroir littéraire où ils contemplaient les fondements de leur propre éthique collective, qu'ils ont voulue rationnelle, progressiste, vouée à la liberté et à l'épanouissement individuel.
Ce long roman est l'âme du libéralisme et de l'amérique en tant que civilisation.
Ou plutôt, comme le disait Arthur dans le film Excalibur, "l'espoir de ce qu'elle aurait pu être".
Je ne peux que déplorer, particulièrement en tant qu'éditeur, de ne voir traduit et édité en langue française ce livre écrit il y a un demi-siècle qu'au moment funeste où le libéralisme est définitivement mort en tant qu'espoir et but de civilisation :roll:
La France aime étudier et disséquer ce qui est mort, rarement s'inspirer ou s'ouvrir à la réalité de ce qui est vivant. Exposer les bons et dociles citoyens français si productifs, ayant une telle foi envers leurs maitres à penser à un livre si vibrant de liberté et pronant à tel point l'individualisme avait sans doutes quelque chose de dérangeant.
Pourtant, la grève vit aujourd'hui d'une vie particulièrement irréelle aux yeux de ceux qui l'ont lu, car ce qui nous arrive à tous aujourd'hui est presque exactement ce qui boulverse et assèche la vitalité individuelle et collective dans l'univers de la grève.
Car ce livre, à l'instar de tous les autres livres fondamentaux avant lui, est un livre prophétique, capable d'annoncer exactement comment, au sein de nos civilisations, la liberté, le bonheur et la créativité peuvent mourir.

La grève fait irresistiblement penser à La boétie, puisque son propos est d'inviter à résister à la folie du pouvoir totalitaire en pratiquant le simple refus d'obéissance.
La boétie interrogeait en son temps ses contemporains en leur demandant pourquoi ils adoraient le roi. Il n'a lui-même, jamais pu le comprendre.
Car le roi en lui-même n'est qu'un freluquet. Ses armes pour opprimer le peuple, c'est le peuple qui les lui donne volontairement en s'engageant comme soldats.
Ses yeux pour espionner le peuple et le priver de liberté, ce sont des hommes qui s'engagent encore afin de remplir cette tache ignoble.
Aujourd'hui, le roi est mort.
Les hommes pourraient tous vivre de leur créativité, leur esprit d'industrie, d'inventivité, d'entreprise...si il n'existait aujourd'hui un autre pouvoir, plus insidieux et plus pervers encore que celui du roi légitimé par Dieu.
Un pouvoir auquel les hommes offrent les fruits de leurs efforts ou, pire encore, devant lequel ils sacrifient ce qu'ils ont meilleur, la possibilité de toute vraie joie, de toute liberté, bref de libre arbitre.
La grève révèle l'identité intime de ce pouvoir, ce fantôme qui fait courber les épaules et pousse chacun à s'y vouer. Comment ? En faisant passer cet asservissement comme totalement légitime et naturel. Et nous voila tels des serfs au moyen-âge...
Car c'est au sein de notre intimité, au coeur de nos idéaux que nous croyons les plus nobles que se cache les atours du nouveau roi.
Après avoir lu ce livre, la nature du Tyran et les habits idéologiques dont il se pare pour imposer aujourd'hui son indiscutable grandeur aux peuples soumis sont ainsi dévoilés.
La Boétie restait pour sa part dans une approche aporétique, à savoir qu'il ne savait expliquer le pourquoi de cette soumission.
Tout comme l'auteur du "roi et l'oiseau".
Dans les suppléments du DVD, l'auteur nous dit qu'un jour un type s'est installé quelque part, dans un trou. D'autre types sont passés et il leur a dit : faites ceci, travaillez pour moi et vous aurez telle ou telle récompense. Et bientôt ce type se fait appeller roi.
Pourquoi ? l'auteur du dessin animé, lui-même esprit libre, ne saurait le dire. Son propos n'est du reste pas tant de révéler les charmes incompréhensibles et fort louches du tyran que d'exposer la résistance poétique d'un désir innocent face au pouvoir totalitaire.
Ayn Rand, quand à elle, a trouvé dans la philosophie, que ce soit celle d'Aristote ou de Nietzsche, les concepts dont elle avait besoin pour reconnaitre et nommer la pulsion morbide poussant les hommes à la soumission.
Pourquoi et comment la pulsion de vie peut se retourner contre elle-même et détruire l'homme. Individuellement et collectivement.
La grève est la rencontre de La Boétie et de la théorie du ressentiment de Nietzsche, appliquée au monde d'aujourd'hui.
Nietzsche avait craint que le ressentiment collectif n'engendre des horreurs lors du XXième siècle.
Rand nous décrit, en 1957, celles qui seraient à venir.
Et le moyen de leur résister.
Philosophiquement et pacifiquement.
Cela tombe bien, car ce pourraient bien être celles du XXIème siècle.

Il existe une différence et une seule entre le monde de la grève et notre époque.
La révéler, malheureusement, m'obligerait à vous priver, vous futurs lecteurs, de la découverte individuelle de tout le sel de ce livre.
Je vous invite à le lire tout comme un ethnologue lirait le texte fondateur d'une civilisation étrangère aujourd'hui éteinte.
Car c'est exactement ce qu'il est, tout du moins à mes yeux.
Boc21
 
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Message » 21 Mar 2013 9:21

Je ne connaissais pas ce livre, vi ce que vous en dites, il va falloir que je l'achète ASAP !
Merci pour l'info, on a beau être un gros lecteur on passe parfois à coté des bonnes choses.

ed
Eldudo
 
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Message » 21 Mar 2013 15:43

Bien cette nouvelle section, plus les deux présentations de ce livre, merci à Cylon et Boc21 achat immédiat après lecture de vos messages..... :thks:
JCL83
 
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Message » 21 Mar 2013 16:13

JCL83 a écrit:Bien cette nouvelle section, plus les deux présentations de ce livre, merci à Cylon et Boc21 achat immédiat après lecture de vos messages..... :thks:


Lis l'hebdo HcFr il y a une chronique formidable (*) d'un livre à chaque livraison.

ed


(*) forcément formidable, c'est moi qui la fait :)
Eldudo
 
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Message » 21 Mar 2013 16:20

Boc, :ohmg: :ohmg: :ohmg: :ohmg:

Ed : Ca tombe bien, tes chroniques formidables feront ainsi des topics formidables dans ce forum. 8)

JCL : Bonne lecture. :wink:

C'est un pavé de 1200 pages, imprimé sur papier bible, divisé en 3 parties : "1. Non contradiction", "2. Ou bien ; ou bien", "3. A est A".

Mais ce n'est pas qu'une réflexion fantastique sur nos sociétés, c'est aussi un roman très humain et agréable à lire, loin d'être indigeste. :wink:

Ici, quelques "Qui est John Galt", à travers les USA :

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(la suite en spoiler, pour ne pas prendre la visibilité de toute la page) :
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Cylon
 
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Message » 22 Mar 2013 14:08

Eldudo a écrit:Lis l'hebdo HcFr il y a une chronique formidable (*) d'un livre à chaque livraison.

ed


(*) forcément formidable, c'est moi qui la fait :)

:lol: Je n'y manquerai pas.... :wink:

Cylon : merci, dés réception je n'y attellerai, vous m'en avait donné l'envie....
Sacré phénomène ce "who is John Galt", je suis très surpris d'une telle ampleur et à la fois encore plus curieux de cette ouvrage.... :wink:
JCL83
 
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Message » 25 Mar 2013 18:36

A noter que demain sort Bioshock Infinite, sortie majeure de l'année et dont les critiques sont déjà unanimes, qui inscrira sa continuité politique et philosophique avec Bioshock (avec l'objectivisme en toile de fond).

A l'époque de Bioshock, beaucoup parlaient des thèmes et imbrications objectivistes (et de la corrélation à La Grève), comme ici : Bioshock VS Ayn Rand, et ça donnait lieu à des discussions passionnantes sur l'éthique, l'altruisme et l'eugénisme.
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Message » 29 Mar 2013 23:45

Faut être complet sur cet auteur, effectivement très peu connu de ce côté de l'Atlantique, qui est une des influences des mouvements libertariens et conservateurs américain, un courant politique et de pensée ultra individualiste fort aux usa et très minoritaire içi.
Je précise que je n'ai pas lu le livre.

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autrichon gris
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Message » 30 Mar 2013 13:27

Certes, Ayn Rand est détournée/utilisée par le Tea Party.

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Mais le fond de sa philosophie dépasse aisément les clivages (un peu comme la bible :lol: ), et touche autant les républicains que les démocrates, qui sont dans les 2 camps nombreux à se revendiquer de sa filiation. Il faut dire que sa vision de l'homme (en tant qu'être héroïque) et de la société (axée sur la raison et la responsabilité) reste plutôt universelle, et permet de "réveiller" pas mal de monde sur l'importance du bonheur de chacun, du sens de la vie, tout ça.

Au point que même Vladimir Poutine demande à Alan Greenspan (oui, l'ex-directeur de la Fed, qui était un ami de Rand) de parler de sa philosophie à son "cercle".

Bonus, extrait de La Grève :

Jamais on ne vous a parlé d'une autre morale que religieuse ou sociale. On vous a appris qu'elle était un code de conduite, imposé par un pouvoir ou une société pour servir les desseins de Dieu ou les intérêts de votre voisin ou d'une puissance quelconque, mais jamais pour votre vie ou votre plaisir. On vous a appris que vous ne pouviez trouver votre plaisir que dans ce qui est immoral, que votre intérêt ne pouvait être servi que par le mal, que tout code moral était conçu, non pour vous, mais contre vous ; non pour enrichir votre vie, mais pour lui ôter sa sève.

Depuis des siècles, on se bat sur le terrain de la morale. Certains proclament que votre vie appartient à Dieu et que le bien exige de se sacrifier pour des figures irrationnelles ; d'autres prétendent qu'elle appartient à vos voisins, et que le bien exige de se sacrifier pour tous les incapables de la terre. Mais personne ne vous a jamais dit que votre vie vous appartient et que la morale consiste à la vivre du mieux possible.


PS : Bioshock Infinite dont je parle plus haut (qui est génial au passage) n'a pas l'objectivisme en thème principal comme ses prédécesseurs (celui-ci est plus axé physique quantique, bolchevisme, intégrisme religieux). J'étais donc HS.
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Message » 31 Mar 2013 6:38

autrichon gris a écrit:Faut être complet sur cet auteur, effectivement très peu connu de ce côté de l'Atlantique, qui est une des influences des mouvements libertariens et conservateurs américain, un courant politique et de pensée ultra individualiste fort aux usa et très minoritaire içi.
Je précise que je n'ai pas lu le livre.


L'idéal de la Grève, sans cesse ressassé tout au long de l'ouvrage, est un ultra-égoïsme éclairé, assumé et revendiqué comme tel.
Et il s'agit bien d'un idéal moral.
C'est sans cesse dit, redit, rappellé, tout au long de l'ouvrage : les héros de la Grève sont effectivement égoïstes et individualistes.
Mais qu'est-ce que l'égoïsme ?
Voila sans doutes une des questions philosophiques les plus fondamentales.
L'ivrogne qui ne pense qu'à lui et se détruit est-il égoïste ?
L'homme cupide qui amasse de la thune en volant et détruisant ses semblables, s'occultant de la vie les plus heureux aspects de l'existence est-il égoïste ?
Est-ce que l'homme qui recherche égoïstement et souvent inconsciemment son malheur ou son suicide est vraiment un homme qui vise "son propre intéret" ?
Un homme qui donne à des pauvres un argent qu'il a volé, condamnant ces mêmes pauvres à ne pas gagner leur vie dans la dignité est-il altruiste ?
Est-on altruiste lorsque l'on est obligés de donner par l'impôt un argent ou une protection de santé qui bénéficieront à d'autres que nous et notre famille ?
Particulièrement lorsque nous-mêmes et notre famille ne peuvent bénéficier de la protection santé dont bénéficient ceux, anonymes, pour lequels nous la payons ?
Qu'est-ce que la générosité, qu'est-ce que l'altruisme, qu'est-ce donc que l'égoïsme ?
Et quelles sont nos limites ? Pouvons-nous créer un système social reposant sur l'altruisme ? Pouvons-nous nous montrer sainement altruistes ?
En quelle mesure pouvons-nous nous montrer généreux, altruiste, au vu de notre nature que je qualifierais pudiquement d'humaine ?
Ce que la grève s'évertue à démontrer, c'est que les hommes se prétendant altruistes sont souvent d'odieux pervers manipulateurs se taillant la part du Lion pour eux-mêmes.
Les égoistes de la Grève sont de vrais égoïstes éclairés et sains.
Ce ne sont pas des ivrognes, ni des voleurs, ni des pervers et résumons-le ainsi : ce ne sont pas des êtres égocentriques qui se détruisent eux-mêmes ainsi que leur entourage en trouvant toujours des prétextes fallacieux dans le genre "altruisme" pour justifier leurs déficiences.
Ce sont les individus pour qui égoïsme signifie : vivre son rêve, s'aimer soi-même en s'aimant à travers ce que l'on fait ou crée librement sans voler ou faire ch.ier personne.
Chose étonnante à constater : ce sont ces égoïsmes là, ces obssessions créatrices auxquelles nous devons les plus riches créations technologiques, artistiques, philosophiques, scientifiques...
Gagner de l'argent, aux yeux d'un véritable égoïste, est naturel, parce qu'il trouve que la façon qu'il a de le gagner est la plus légitime qui soit, celle dont il peut à juste titre se sentir fier.
Parce que paradoxalement, on ne crée pas égoIstement une chose inutile qui ne sert à rien, ne plait à personne. Lorsque l'on est vraiment égoiste, à savoir éclairé et rationnel, on s'aime à travers une création pour laquelle on a donné le meilleur de soi.
Paradoxalement, on se sent profondément égoïste lorsque l'on offre au monde un produit profondément utile, une pensée remarquablement intelligente et construite, une musique remarquablement inspirante ou une oeuvre littéraire apaisant un temps la douleur d'exister.
De même, un vrai égoïste s'aime lui-même infiniement et ne supportera pas de commetre une action qu'il jugera vile, malsaine, laide, et lui renverra devant le miroir une image de lui qu'il trouvera intolérable.
Un égoïste ne cherche pas à commetre de "bonnes actions" mais de "belles actions" dont il peut être fier.
Ce n'est pas un escroc, un voleur, un violeur, un banquier central ou autres égarés.
Notre époque est devenue tellement perdue et paumée qu'elle associe à coup sur "égoïsme en tant qu'idéal philosophique" et "égocentrisme pathologique".
Le fait est qu'il y a toujours eu bien peu d'égoïstes véritables et beaucoup de malades mentaux qui croient rechercher leur propre intéret dans la folie.
Aujourd'hui, les derniers fous en date prétendent, et c'est à mourir de rire (cela fait rire Cylon mais moi cela me fait preque pleurer) qu'ils sont des égoïstes véritables.
Avant les pourris se prétendaient altruistes pour voler leurs semblables, aujourd'hui ils nous font la honte de se prétendre "libéraux" en se montrant ouvertement voleurs, pervers, violeurs, et le public associe immanquablement leur conduite avec le libéralisme :roll:
Le Darwinisme social, le vol, la brutalité, l'arrogance, le matérialisme le plus grotesque et caricatural, ils appellent ça du néo-libéralisme ces malades mentaux.
Se donner à soi-même le droit d'exister, de vivre avant tout pour soi-même, à travers ses créations et le rapport que l'on a envers ses proches est un exercice exigeant, difficile, aujourd'hui comme à toutes les époques. Dans un sens c'est effectivement "être héroïque".
De plus, le véritable égoïsme, positif, est peut-être la seule générosité dont nous sommes capables.
Ayn Rand n'écrira jamais une chose pareille, bien entendu.
Car selon elle, les mots "générosité" et "altruisme" sont associés à des concepts aussi malsains que ceux auxquels font référence, à nos yeux, les termes "égoïsmes" et "individualisme" :wink:
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Message » 31 Mar 2013 14:12

:D :thks: A noter qu'on parle bien d’égoïsme rationnel (le terme "ultra" est inadapté).

Et à ce propos, la lecture de "La Vertu d’Égoïsme" est un excellent complément à La Grève et à la Source Vive. Ce n'est pas un roman contrairement à ses 2 autres best-sellers, mais un recueil (conférence + The Objectivist Newsletter) qui résume la pensée objectiviste dans de nombreux domaines.

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Un court extrait, concernant l'altruisme que tu évoques Boc :
Un grand nombre de gens abordent le sujet de l'altruisme en posant des questions comme : "Doit-on risquer sa vie pour aider une personne qui a) se noie, b) est prise dans un feu, c) est suspendue dans le vide d) se jette sur une voie ferrée...". Considérez les implications de cette approche. Si un homme accepte l'éthique de l'altruisme, il doit souffrir des conséquences suivantes :

1. Un manque d'estime de soi, puisque sa première préoccupation dans le domaine des valeurs n'est pas de savoir comment vivre sa vie, mais comment la sacrifier.

2. Un manque de respect pour autrui, puisqu'il considère l'humanité comme une horde de mendiants invétérés implorant constamment l'aide de quelqu'un.

3. Une vision cauchemardesque de l'existence, puisqu'il croit que les hommes sont piégés dans un univers malveillant où les désastres sont la préoccupation fondamentale et constante de leur vie.

4. Une indifférence léthargique à l'éthique et une amoralité désespérément cynique, puisque ses questions impliquent des situations qu'il ne rencontrera probablement jamais et qui n'ont aucune relation avec les problèmes de sa propre vie.

En faisant de l'aide à autrui la question fondamentale, l'altruisme a détruit le concept de toute fraternité ou bienveillance authentique entre les hommes. Un sacrifice, c'est l'abandon d'une valeur plus grande pour le bénéfice d'une valeur moins grande. Ainsi l'altruisme jauge la valeur d'un homme par le degré avec lequel il abandonne ses valeurs, y renonce ou les bafoue, puisque l'aide à un étranger est considérée comme plus vertueuse, "moins égoïste" que l'aide à ceux qu'on aime.


Et une démonstration amusante (sur l'égalitarisme) :
Il est médicalement possible dans certains cas de cécité, d'extraire la cornée des yeux d'un homme immédiatement après sa mort pour la transplanter chez un aveugle, lui redonnant ainsi la vue. Selon l'éthique collectivisée, cela pose un problème social : Pourquoi attendre la mort du donneur pour procéder à l'opération ? Ne devrions-nous pas considérer les yeux de chacun comme étant propriété publique et procéder à une "méthode de distribution équitable" ? Ne devrions-nous pas détruire l’œil d'un homme toujours en vie pour aider un aveugle, de manière à les rendre égaux ? Non ? Alors laissez tomber les questions concernant les projets publics dans une société libre.
Cylon
 
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Message » 01 Avr 2013 22:46

Marrant cet auteur inconnu au bataillon (mea maxima culpa).
Vos citations, à ce stade de lecture me paraissent assez convenues, voire un peu creuses... Mais je vais lire d'abord, je reviendrai après. Merci pour cette suggestion.

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Message » 03 Avr 2013 0:19

La Grève est un roman tout public fondamental.
En aucun cas un système philosophique rigoureux.
Toutefois, il donne à découvrir des types psychologiques et des situations déconcertantes à rebours de la morale "commune".
Ayn Rand est un peu un des rares "esprits libres" que Nietzsche attendait avec anxiété.
Mais elle n'est pas Nietzsche ni Schopenhauer, Aristote ou Jung :wink:
Mais aux yeux de l'Amérique :roll:
Elle est un peu Homère retraçant l'épopée de leurs héros.
En quelque sorte un mythe se voulant rationnel :wink:

Cylon a écrit::D :thks: A noter qu'on parle bien d’égoïsme rationnel (le terme "ultra" est inadapté).


Euh oui...tu as raison évidemment.
Je cherchais un terme définissant le fait que l'égoïsme est sans aucun doute le mot auquel les héros de la grève font le plus référence, celui dans lequel ils se reconnaissent avant tout.
Mais "ultra", effectivement, de nos jours, le terme est innaproprié :oops:
Mais en réalité, à mes yeux en tous cas, pourquoi les hommes n'ont rien compris au libéralisme ni à la vertu de l'égoïsme, cela reste un profond mystère :roll:
Sans doutes nos semblables ont-ils voulu ne voir dans ce terme que l'ombre portée de leurs idéaux collectifs défunts pour pouvoir mieux s'y jeter ensuite.
Après tout, ils ont toujours procédé ainsi avec absoluement tout.
Non l'égoïsme et le libéralisme ne sont pas, n'ont jamais été et ne seront jamais pour le cupide le droit d'appauvrir ses semblables et dormir sur son tas de monnaie virtuelle.
Non l'égoïsme et le libéralisme ne sont pas pour un violeur dépourvu d'empathie le droit de réduire toute femme de cette terre au statut d'objet.
Non l'égoïsme et le libéralisme ne peuvent en aucun cas servir d'idéologie pour justifier l'asservissement des masses productives à une oligarchie bancaire.
Non l'égoïsme et le libéralisme sont à l'opposé du darwinisme social et ne sauraient justifier de laisser crever les "moins aptes".
Chacun se sert de ces termes aujourd'hui pour justifier la libre expression de sa propre pathologie mentale.
Nous en sommes là Cylon...
Nous en avons toujours été là.
Il y a plus de 2300 ans, le philosphe épicure, chantre de "l'égoïsme éclairé par la raison" de l'époque devait déjà faire avec la déibilité commune pour qui liberté et recherche du plaisir ne se déclinent que d'une manière : excès pathologique et suicide :roll:
L'humanité n'a pas évolué d'une seconde en plusieurs millénaires.

C’ est un grand bien, croyons-nous, que de savoir se suffire à soi-même non pas qu’il faille toujours vivre de peu en général, mais parce que si nous n’avons pas l’abondance, nous saurons être contents de peu, bien convaincus que ceux-là jouissent le mieux de l’opulence, qui en ont le moins besoin. Tout ce qui est naturel s’acquiert aisément, malaisément ce qui ne l’est pas. Les saveurs ordinaires réjouissent à l’égal de la magnificence dès lors que la douleur venue du manque est supprimée. Le pain et l’eau rendent fort vif le plaisir, quand on en fut privé. Ainsi l’habitude d’une nourriture simple et non somptueuse porte à la plénitude de la santé, elle rend l’homme capable d’accomplir aisément ses occupations, elle nous permet de mieux jouir des nourritures coûteuses quand, par intermittence, nous nous en approchons, elle nous enlève toute crainte des coups de la fortune. Partant, quand nous disons que le plaisir est le but de la vie, il ne s’agit pas des plaisirs déréglés ni des jouissances luxurieuses ainsi que le prétendent ceux qui ne nous connaissent pas, nous comprennent mal ou s’opposent à nous. Par plaisir, c’est bien l’absence de douleur dans le corps et de trouble dans l’âme qu’il faut entendre. Car la vie de plaisir ne se trouve pas dans d’incessants banquets et fêtes, ni dans la fréquentation de jeunes garçons et de femmes, ni dans la saveur des poissons et des autres plats qui ornent les tables magnifiques, elle est dans un raisonnement vigilant qui s’interroge sur les raisons d’un choix ou d’un refus, délaissant l’opinion qui avant tout fait le désordre de l’âme.
Épicure (341-270 va. )
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Message » 04 Avr 2013 20:53

autrichon gris a écrit:Marrant cet auteur inconnu au bataillon (mea maxima culpa).
Vos citations, à ce stade de lecture me paraissent assez convenues, voire un peu creuses... Mais je vais lire d'abord, je reviendrai après. Merci pour cette suggestion.


Boc21 a écrit:La Grève est un roman tout public fondamental.
En aucun cas un système philosophique rigoureux.
Toutefois, il donne à découvrir des types psychologiques et des situations déconcertantes à rebours de la morale "commune".
Ayn Rand est un peu un des rares "esprits libres" que Nietzsche attendait avec anxiété.
Mais elle n'est pas Nietzsche ni Schopenhauer, Aristote ou Jung
. :wink:
Mais aux yeux de l'Amérique :roll:
Elle est un peu Homère retraçant l'épopée de leurs héros.
En quelque sorte un mythe se voulant rationnel :wink:


Pas mieux que Boc (et pour Épicure aussi).

Ayn Rand est parfois prise à partie pour son style littéraire, pas toujours très fin et un peu pompeux.

Mais il ne faut pas oublier qu'elle n'est pas américaine, et que malgré son anglais parfait (même si elle n'a jamais perdu son accent Russe, qui rend ses interviews si uniques :lol: ), elle a grandi dans la Russie pré-révolutionnaire. Révolution qui l'a traumatisée, et qui explique en partie sa haine viscérale du communisme. La confiscation du commerce de son père à Saint-Pétersbourg, ses émigrations forcées, jusqu'à sa "carrière" de scénariste à Hollywood et son installation définitive aux USA...

D'ailleurs, pour rebondir sur Hollywood, je rappelle les multiples adaptations de sa vie/son oeuvre. La plus célèbre, c'est sûrement Le Rebelle avec Gary Cooper, qu'elle a elle-même "validé".

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Ou son biopic, avec Helen Mirren et Peter Fonda, multi-récompensé.

Par contre La Grève semble impossible à adapter (trop ample ?). La dernière tentative en date, l'année dernière, avec un film en 2 parties qui est un échec retentissant. (en-dessous, le trailer de la partie 1)
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