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Films (débats, critiques), personnalités (acteurs, réalisateurs), prochaines sorties, les salles, la presse spécialisée...

Godard et le Festival de Cannes 2014

Message » 17 Avr 2014 18:04

Je ne reviens pas sur la sélection, mais comme je vois qu'il remette Godard sur le devant de la scène, je me permets de transmettre un échange de courrier entre Truffaut et Godard.
Page d'histoire... (à mon nom vous savez que Truffaut est ma référence ciné).

Jean-Luc Godard à Truffaut, mai 1973

“J’ai vu hier La nuit américaine. Probablement personne ne te traitera de menteur, aussi je le fais. Ce n’est pas plus une injure que fasciste, c’est une critique, et c’est l’absence de critique où nous laissent de tels films, ceux de Chabrol, Ferreri, Verneuil, Delannoy, Renoir, etc., dont je me plains. Tu dis : les films sont de grands trains dans la nuit, mais qui prend le train, dans quelle classe, et qui le conduit avec le “mouchard” de la direction à côté ? Ceux§là aussi font les films-trains. Et si tu ne parles pas du Trans-Europ, alors c’est peut-être celui de banlieue, ou alors celui de Dachau-Munich, dont bien sûr on ne verra pas la gare dans le film-train de Lelouch. Menteur, car le plan de toi et de Jacqueline Bisset l’autre soir chez Francis n’est pas dans ton film, et on se demande pourquoi le metteur en scène est le seul à ne pas baiser dans La nuit américaine. Je suis en train de tourner en ce moment un truc intitulé Un simple film, il montre de manière simpliste (à ta manière, celle de Verneuil, Chabrol, etc.), qui fait aussi les films, et comment ces “qui” le font. Comment ta stagiaire numérote, comment le mec d’Eclair porte des sacs, comment le vieux de Publidécor peint les fesses du Tango, comment la standardiste de Rassam téléphone, comment la comptable de Malle aligne les chiffres, et chaque fois, on compare le son et l’image, le son du porteur et le son de Deneuve qu’il porte, le numéro de Léaud sur sa chaîne d’image, et le numéro de s/sociale de la stagiaire non payée, la dépense sexuelle du vieux de Publidécor et celle de Brando, le devis de la vie quotidienne de la comptable et le devis de La Grosse Bouffe, etc. A cause des ennuis de Malle et de Rassam qui produisent gros (comme toi), le fric qui m’était réservé a filé dans le Ferreri (c’est ça que je veux dire, on ne vous empêche pas de prendre le train, mais vous, si), et je suis en panne. Le film coûte environ 20 millions et est produit par Anouchka et TVAB Films (la société de Gorin et moi)?. Peux-tu entrer en coproduction pour 10 millions ? Pour 5 millions ? Vu La nuit américaine, tu devrais m’aider, que les spectateurs ne croient pas qu’on fait des films que comme toi. Tu n’es pas un menteur, comme Pompidou, comme moi, tu dis ta vérité. Je peux en échange, si tu veux, t’abandonner mes droits de La Chinoise, du Gai Savoir, de Masculin Féminin.

Si tu veux en parler, d’accord, Jean-Luc.

A Jean-Luc Godard, mai-juin 1973

Jean-Luc. Pour ne pas t’obliger à lire cette lettre désagréable jusqu’au bout, je commence par l’essentiel : je n’entrerai pas en coproduction dans ton film.

Deuxièmement, je te retourne ta lettre à Jean-Pierre Léaud : je l’ai lue et je la trouve dégueulasse. C’est à cause d’elle que je sens le moment venu de te dire, longuement, que selon moi tu te conduis comme une merde.

En ce qui concerne Jean-Pierre, si malmené depuis l’histoire de la grande Marie et plus récemment dans son travail, je trouve dégueulasse de hurler avec les loups, dégueulasse d’essayer d’extorquer, par intimidation, du fric à quelqu’un qui a quinze ans de moins que toi et que tu payais moins d’un million lorsqu’il était le centre de tes films qui t’en rapportaient trente fois plus.

Certes, Jean-Pierre a changé depuis Les 400 Coups, mais je peux te dire que c’est dans Masculin Féminin que je me suis aperçu pour la première fois que de se trouver devant une caméra pouvait lui apporter l’angoisse et non la joie. Le film était bon et lui était bon dans le film, mais la première scène, dans le café, était oppressante pour quelqu’un qui le regardait avec amitié et non comme un entomologiste.

Je n’ai jamais formulé la moindre réserve sur toi devant Jean-Pierre qui t’admirait tant, mais je sais que tu lui as souvent balancé des saloperies sur mon compte, à la manière d’un type qui dirait à un gosse : “alors, ton père, il se saoule toujours la gueule ?”

Jean§Pierre n’est pas le seul à avoir changé en 14 ans et si l’on projetait dans la même soirée A bout de souffle et tout va bien, le côté à la fois désenchanté et précautionneux du second créerait la consternation et la tristesse.

Je me contrefous de ce que tu penses de La nuit américaine, ce que je trouve lamentable de ta part, c’est d’aller, encore aujourd’hui, voir des films comme celui-là, des films dont tu connais d’avance le contenu qui ne correspond ni à ton idée du cinéma ni à ton idée de la vie. Est-ce que Jean-Edern Hallier écrirait à Daninos pour lui dire qu’il n’est pas d’accord avec son dernier livre ?

Tu as changé ta vie, ton cerveau, et, quand même, tu continues à perdre des heures au cinéma à t’esquinter les yeux. Pourquoi ? Pour trouver de quoi alimenter ton mépris pour nous tous, pour te renforcer dans tes nouvelles certitudes ?

A mon tour de te traiter de menteur. Au début de Tout va bien, il y a cette phrase : “Pour faire un film, il faut des vedettes.” Mensonge. Tout le monde connaît ton insistance pour obtenir J. Fonda qui se dérobait, alors que tes financiers te disaient de prendre n’importe qui. Ton couple de vedettes, tu l’as réuni à la Clouzot : puisqu’ils ont la chance de travailler avec moi, le dixième de leur salaire suffira, etc. Karmitz, Bernard Paul ont besoin de vedettes, pas toi, donc mensonge. La presse : on lui a “imposé” des vedettes… Autre mensonge, à propos de ton nouveau film : tu ne parles pas de la confortable avance sur recettes que tu as sollicitée, obtenue, et qui doit suffire même si Ferreri, comme tu l’en accuses drôlement, a dépensé l’argent qui t’était “réservé”. Alors, il se croit tout permis ce macaroni qui vient manger notre pain, ce travailleur immigré, il faut le reconduire à la frontière, via Cannes !

Tu l’as toujours eu, cet art de te faire passer pour une victime, comme Cayatte, comme Boisset, comme Michel Drach, victime de Pompidou, de Marcellin, de la censure, des distributeurs à ciseaux, alors que tu te débrouilles toujours très bien pour faire ce que tu veux, quand tu veux, comme tu veux et surtout préserver l’image pure et dure que tu veux entretenir, fût-ce au détriment des gens sans défense, exemple Janine Bazin. Six mois après l’histoire Kiejman, Janine s’est vu supprimer ses deux émissions, vengeance habilement différée. Kiejman, n’envisageant pas de parler du cinéma politique sans t’interviewer, ton rôle à toi – il s’agit bien d’un rôle – consistait là encore à entretenir ton image subversive, d’où le choix d’une petite phrase bien choisie. La phrase est prononcée ; ou bien elle passe et elle est assez vive pour qu’on ne te soupçonne pas de mollir, ou bien elle ne passe pas et c’est épatant : décidément, Godard est toujours Godard, etc.

Tout se passe comme prévu, l’émission ne passe pas, tu restes sur ton socle. Personne ne relève que la phrase est un nouveau mensonge. Si Pompidou met en scène la France, toi, c’est le parti communiste et les syndicats que tu malmènes, sur le mode (trop indirect pour les “masses”) de la périphrase, de l’antiphrase et de la dérision, dans Tout va bien, film destiné, au départ, à la plus grande diffusion.

Si je me suis retiré du débat de Fahrenheit 451, à cette époque, c’était pour tenter d’aider Janine, pas par solidarité pour toi, c’est pourquoi je n’ai pas retourné le téléphone que tu m’as fait à ce moment.

Toujours est§il que le mois dernier, Janine était à l’hôpital, elle s’est fait renverser par une voiture au cours de sa dernière émission, opération du genou (elle boitait depuis l’adolescence, jerk, etc.) et elle se retrouve là, à l’hôpital, sans travail et sans fric et naturellement sans nouvelles de Godard qui ne descend de son socle que pour amuser Rassam de temps à autre. Alors je peux te dire : plus tu aimes les masses, plus j’aime Jean-Pierre Léaud, Janine Bazin, Patricia Finaly (elle sort de la clinique de sommeil, celle§là, et il faut harceler la cinémathèque pour obtenir ses six mois de salaire en retard), Helen Scott que tu rencontres dans un aéroport et à qui tu n’adresses pas la parole, pourquoi, parce qu’elle est américaine ou parce qu’elle est mon amie ? Comportement de merde. Une fille de la BBC t’appelle pour que tu parles de cinéma politique dans une émission sur moi, je la préviens d’avance que tu refuseras, mais mieux que ça, tu lui raccroches au nez avant de la laisser finir sa phrase, comportement élitaire, comportement de merde, comme lorsque tu acceptes de te rendre à Genève, Londres et Milan, et que tu n’y vas pas, pour étonner, pour surprendre, comme Sinatra, comme Brando, comportement de merde sur un socle.

Pendant une certaine période, après mai 68, on n’entendait plus parler de toi ou alors mystérieusement : il paraît qu’il travaille en usine, il a formé un groupe, etc., et puis, un samedi, on annonce que tu vas parler à RTL avec Monod. Je reste au bureau pour écouter, pour avoir de tes nouvelles en quelque sorte ; ta voix tremble, tu parais très ému, tu annonces que tu vas tourner un film intitulé La mort de mon frère, consacré à un travailleur noir malade qu’on a laissé mourir au sous-sol d’une fabrique de téléviseurs et, en t’écoutant, malgré le tremblement de la voix, je sens : 1, que l’histoire n’est pas exacte, en tout cas trafiquée ; 2 que tu ne tourneras jamais ce film. Je me dis : si le type avait une famille et que cette famille allait vivre désormais dans l’espoir que ce film soit fait ? Il n’y avait pas de rôle pour Montand là-dedans ni pour Jane Fonda, mais pendant 1/4 d’heure, tu as donné l’impression de te “conduire bien” comme Messmer quand il annonce le droit de vote à 19 ans. Fumiste. Dandy. Tu as toujours été un dandy, quand tu envoyais un télégramme à de Gaulle pour sa prostate, quand tu traitais Braunberger de sale juif au téléphone, quand tu traitais Chauvet de corrompu (parce qu’il était le dernier, le seul à te résister), dandy quand tu pratiques l’amalgame : Renoir-Verneuil, blanc bonnet et bonnet blanc, dandy encore aujourd’hui quand tu prétends que tu vas montrer la vérité sur le cinéma, ceux qui le font obscurément, mal payés, etc.

Quand tu faisais équiper un décor, garage ou boutique par les électros et que tu arrivais : “je n’ai pas d’idée aujourd’hui, on ne tourne pas”, et que les types déséquipaient, il ne t’est jamais venu à l’idée que les ouvriers se sentaient complètement inutiles et méprisés, comme l’équipe de son qui attendait vainement Brando dans l’auditorium vide à Pinewood, tout une journée ?

Maintenant, pourquoi est§ce que je te dis cela aujourd’hui et non pas il y a trois, cinq ou dix ans ?

Pendant six ans, comme tout le monde, je t’ai vu souffrir à cause d’(ou pour) Anna et tout ce qui était odieux en toi, on le pardonnait à cause de ta souffrance.

Je savais que tu avais entrepris Liliane Dreyfus (ex-David) en lui disant : “François ne t’aime plus, il est amoureux de Marie Dubois, qui joue dans son film”, et je trouvais ça pitoyable mais émouvant, oui, pourquoi pas, émouvant, à la limite ! Je savais que tu allais voir Braunberger en lui disant : “Faîtes-moi faire le sketch que Rouch doit tourner, à sa place” et je trouvais ça… disons, pathétique. Je me promenais avec toi sur les Champs-Elysées et tu me disais : “il paraît que Bébert et l’Omnibus ne marche pas, c’est bien fait” et je disais “Allons, allons…”.

A Rome, je me suis fâché avec Moravia parce qu’il m’a proposé de tourner Le Mépris, j’étais venu là, avec Jeanne, présenter Jules et Jim, ton dernier film ne marchait pas, Moravia voulait changer de cheval.

Pour les mêmes raisons de solidarité avec toi, je me suis fâché avec Melville qui ne te pardonnait pas de l’avoir aidé à faire Léon Morin prêtre, et qui cherchait à te nuire. A la même époque, tu humiliais Jeanne volontairement – ou pour faire plaisir à Anna (histoire d’Eva), tu tentais un dérisoire chantage sur Marie-France Pisier (Hossein, la Yougoslavie… à répétition… “l’alliance”), etc. Tu as fait tourner Catherine Ribeiro que je t’avais envoyée, dans Les Carabiniers, et puis tu t’es jeté sur elle, comme Charlot sur sa secrétaire dans Le Dictateur (la comparaison n’est pas de moi), j’énumère tout cela pour te rappeler de ne rien oublier dans ton film de vérité sur le cinéma et le sexe. Au lieu de montrer le cul de X… et les jolies mains d’Anne Wiazemsky sur la vitre, tu pourrais faire le contraire maintenant que tu sais que, pas seulement les hommes, mais les femmes aussi sont égales, y compris les actrices. Chaque plan de X… dans Week-end était un clin d’oeil aux copains : cette pute veut tourner avec moi, regardez bien comment je la traite : il y a les putes et les filles poétiques.

Je te parle de tout ça aujourd’hui parce que, tout de même, malgré le dandysme assombri d’un peu d’aigreur qui transparaissait encore dans certaines déclarations, je pensais que tu avais pas mal changé, je pouvais penser cela avant de lire la lettre destinée à Jean-Pierre Léaud. Si tu l’avais cachetée, peut-être as-tu voulu me donner une chance de ne pas la lui remettre ?

Aujourd’hui tu es fort, tu es censé être fort, tu n’es plus l’amoureux qui souffre, comme tout le monde tu te préfères et tu sais que tu te préfères, tu détiens la vérité sur la vie, la politique, l’engagement, le cinéma, l’amour, tout cela est bien clair pour toi et quiconque pense différemment est un salaud, même si tu ne penses pas en juin la même chose qu’en avril. En 1973, ton prestige est intact, c’est-à-dire que lorsque tu rentres dans un bureau, on regarde ton visage pour voir si tu es de bonne humeur ou s’il vaut mieux rester dans son coin ; parfois tu acceptes de rire ou de sourire ; le tutoiement a remplacé le vouvoiement, mais l’intimidation demeure, l’injure facile aussi, le terrorisme (cette façon de faire de la lèche à rebours). Je veux dire que je ne me fais pas de soucis pour toi, il y a encore à Paris assez de jeunes gens fortunés, complexés d’avoir eu leur première voiture à dix-huit ans, qui seront heureux de se dédouaner en disant : “je produis le prochain Godard.”

Quand tu m’as écrit, fin 68, pour me réclamer 8 ou 900 mille francs qu’en réalité je ne te devais pas (même Dusssart était choqué !) et que tu as ajouté : “de toute façon, nous n’avons plus rien à nous dire”, j’ai pris tout ça au pied de la lettre ; je t’ai envoyé le fric et, hormis deux moments d’attendrissement (un sur moi malheureux en amour, un sur toi à l’hôpital), je n’ai plus rien éprouvé pour toi que du mépris, quand j’ai vu dans Vent d’est la séquence : comment fabriquer un cocktail Molotov et qu’un an plus tard, tu t’es dégonflé quand on nous a demandé de distribuer, pour la première fois, La Cause du peuple dans la rue…

L’idée que les hommes sont égaux est théorique chez toi, elle n’est pas ressentie, c’est pourquoi tu ne parviens pas à aimer qui que ce soit, ni à aider qui que ce soit, autrement qu’en jetant quelques billets sur la table. Un type, genre Cavanna, a écrit : “il faut mépriser l’argent, surtout la petite monnaie” et je n’ai jamais oublié comment tu te débarrassais des centimes en les glissant derrière les banquettes des bistrots. Contrairement à toi, je n’ai jamais prononcé une phrase négative à ton propos, à la fois parce que tu étais attaqué bêtement et plutôt ” à côté” des vraies choses, ensuite parce que j’ai toujours détesté les brouilles entre écrivains ou peintres, règlements de compte douteux par l’intermédiaire du papier journal, ensuite parce que je t’ai toujours senti à la fois jaloux et envieux, même dans tes bonnes périodes – tu es super compétitif, moi presque pas – et puis il y avait, de ma part, de l’admiration, j’ai l’admiration facile, tu le sais, et une volonté d’amitié depuis que tu t’étais attristé d’une phrase que j’avais dite à Claire Fischer à propos du changement de nos rapports après l’armée (pour moi) et la Jamaïque (pour toi). Je n’affirme pas beaucoup de choses parce que je ne suis jamais tout à fait sûr que l’idée inverse n’est pas aussi juste, mais, si j’affirme que tu es une merde, c’est qu’en voyant Janine Bazin à l’hôpital, ta lettre à Jean-Pierre, à il n’y a pas de place pour le doute sur ce point. Je ne délire pas, je ne dis pas que Janine était à l’hôpital à cause de toi, mais son chômage, après 10 ans de TV, est directement lié à toi qui n’en as rien à foutre. Amateur de gestes et de déclarations spectaculaires, hautain et péremptoire, tu es toujours en 1973 installé sur ton socle, indifférent aux autres, incapable de consacrer quelques heures désintéressées pour aider quelqu’un. Entre ton intérêt pour les masses et ton narcissisme, il n’y a place pour rien ni pour personne. Qui te traitait de génie, quoi que tu fasses, sinon cette fameuse gauche élégante qui va de Susan Sontag à Bertolucci via Richard Roud, Alain Jouffroy, Bourseiller, Cournot et même si tu paraissais imperméable à la vanité, à cause d’eux tu singeais les grands hommes : de Gaulle, Malraux, Clouzot, Langlois, tu entretenais le mythe, tu renforçais le côté ténébreux, inaccessible, tempéramental (comme dirait Scott), laissant s’installer tout autour de soi la servilité. Il te faut jouer un rôle et que ce rôle soit prestigieux ; j’ai toujours eu l’impression que les vrais militants sont comme des femmes de ménage, travail ingrat, quotidien, nécessaire. Toi, c’est le côté Ursula Andress, quatre minutes d’apparition, le temps de laisser se déclencher les flashes, deux, trois phrases bien surprenantes et disparition, retour au mystère avantageux. Au contraire de toi, il y a les petits hommes de Bazin à Edmond Maire en passant par Sartre, Bunuel, Queneau, Mendès France, Rohmer, Audiberti, qui demandent aux autres de leurs nouvelles, les aident à remplir une feuille de sécurité sociale, répondent aux lettres, ils ont en commun de s’oublier facilement et surtout de s’intéresser davantage à ce qu’ils font qu’à ce qu’ils sont et qu’à ce qu’ils paraissent.

Maintenant, tout cela qui s’écrit doit pouvoir se dire, c’est pourquoi je termine comme toi : si tu veux en parler, d’accord.

François

“Si j’avais, comme toi, manqué aux promesses de mon ordination, je préférerais que ce fût pour l’amour d’une femme plutôt que pour ce que tu appelles ont évolution intellectuelle.” Le journal d’un curé de campagne.”
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Message » 17 Avr 2014 23:42

Sale personnage que ce Godard, je n'ai jamais crié au chef-d'oeuvre sur ses réalisations bien que certaines soient reconnues comme telles. De plus, l'homme ne provoque pas d'empathie, contrairement à Truffaut.
 
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Message » 15 Mai 2014 19:19

J'ai édité le titre du topic pour faire un focus sur Godard.

Pour discuter du Festival, direction ce topic : post178119522.html#p178119522
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Message » 16 Mai 2014 1:23

Godard a toujours été un personnage entier et excessif. Sans être un inconditionnel, je considère que c'est parce qu'il n'a aucun "filtre" ou souci de respectabilité qu'il arrive à faire un cinéma sans compromis, et qu'il a brisé un paquet de règles. Je connaissais déjà des bouts de cette lettre, qui doit tout de même être replacée dans son contexte. La Nuit américaine a été écrit en quelques semaines par Truffaut parce qu'il voulait un prétexte pour tourner avec (lire "se taper") Jacqueline Bisset, et c'était une anecdote largement connue au moment de la préparation du film.

Quant à Godard, pourquoi s'acharner sur sa présence en compétition ? Même le directeur du festival reconnaît qu'il n'y a pratiquement aucune chance qu'il fasse une apparition en personne au festival...
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Message » 16 Mai 2014 9:39

Truffaut a couché avec toutes ses actrices, la seule qui lui a résisté était Adjani.
Quant à Godard, perso je retiens 2 films et comme beaucoup je pense.
A bout de Souffle (scénario et idée Truffaut), premier film et coup de Maître.
Le Mépris (Moravia, Frits Lang, Les fesses de Bardot, la Capri, la Villa Malaparte), mais même le Mépris est très très inégal.
Mais Godard a toujours été donneur de leçon et avec un égo demesuré.
Je ne sais qu'elle est a vision des jeunes cinéphiles et futurs réalisateurs sur Godard, en tout cas son cinéma est très peu diffusé et dans un cercle super restreint.

(Vous l'aurez compris je suis un grand fan de Truffaut, pas très objectif).
nuit americaine
 
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Message » 16 Mai 2014 10:44

godard est une des plus grande imposture de l'histoire du cinema, qui n'en manque pourtant pas. :siffle:
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Message » 16 Mai 2014 10:47

astrorock a écrit:godard est une des plus grande imposture de l'histoire du cinema, qui n'en manque pourtant pas. :siffle:

Bah pour une fois, on est bien d'accord 8)
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Message » 16 Mai 2014 11:36

Le terme imposteur est parfait, d'ailleurs on pourrait créer un thème sur les imposteurs du cinéma.
A l'heure actuelle, le maître de l'imposture est Lars Von Trier, ses films sont insupportables à voir, le les critiques toujours au top.
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Message » 16 Mai 2014 11:38

nuit americaine a écrit:Le terme imposteur est parfait, d'ailleurs on pourrait créer un thème sur les imposteurs du cinéma.

Très bonne idée, tu peux créer le topic si tu veux ;)
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Message » 16 Mai 2014 11:40

nuit americaine a écrit:Le terme imposteur est parfait, d'ailleurs on pourrait créer un thème sur les imposteurs du cinéma.
A l'heure actuelle, le maître de l'imposture est Lars Von Trier, ses films sont insupportables à voir, le les critiques toujours au top.


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Message » 16 Mai 2014 12:33

Je te rejoins sur Malick qui m'a toujours saoulé, les autres tu y vas fort.......
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Message » 16 Mai 2014 23:23

Godard, c'est aussi Alphaville, Une femme est une femme, Pierrot le fou, Masculin - Féminin, Week-end, et, du côté de la dernière période, Éloge de l'amour qui contenait des sacrés bouts de cinéma entre deux séquences plus démonstratives et moins inspirées. Ça n'est pas parce qu'il y a plein de péteux façon Philippe Sollers qui se vantent d'adorer (je me souviens encore de ce que disait Desproges sur ceux qui ont "compris le dernier Godard") une œuvre qui est délibérément opaque et déroutante que ça n'est pas un cinéaste intéressant.

Lars Von Trier, il est difficile à faire rentrer dans une catégorie précise. J'ai souvent été tenté de le considérer comme un type qui savait surtout bien faire son auto-promotion (sur des films comme Dancer in the Dark, le semi-canular Dogme 95) et puis, une année, je me suis enfilé trois ou quatre films qui étaient en compétition officielle à Cannes et qui étaient sortis pendant le Festival. J'avais notamment vu Une journée de fous, de Raoul Ruiz, qui était une catastrophe à tous points de vue. Après ça, je vais voir Dogville.
C'était maniéré, didactique, outré, etc. N'empêche qu'il y avait un point de vue au niveau de la mise en scène et que ça restait malgré tous les défauts une œuvre ambitieuse, extrêmement forte sur un plan visuel et aboutie.
Pareil pour Melancholia. Je ne suis pas forcément d'accord avec ce que fait Von Trier, mais ça reste un énorme metteur en scène.

Accessoirement, et là, ça n'est pas une question de vanité blessée par ce que j'aurais pu lire sur Godard ou Von Trier, je considère La Nuit américaine comme un des films les plus pompeux de Truffaut, une œuvre insupportable de vanité, un film qui veut montrer que son réalisateur aime le cinéma plutôt que de chercher à faire du cinéma. Je me souviens encore du prologue lourdaud en noir et blanc avec le gamin ou de cette scène qui ne sert à rien à part de rappeler que Truffaut était un cinéphile, où le personnage du metteur en scène reçoit son paquet de bouquins, avec le cadrage qui insiste bien pour que l'on distingue le titre de l'essai sur Murnau, du recueil de Godard, etc. Il suffit de regarder La Nuit américaine juste avant Irma Vep d'Olivier Assayas (dont je ne suis pas fan pour autant) pour voir l'écart qu'il y a en matière d'inspiration et de discours entre les deux films sur un thème pourtant similaire, au delà de l'idée de reprendre Jean-Pierre Léaud.

Truffaut était très certainement une personnalité captivante, le genre de bonshommes avec lequel on aurait forcément pris plaisir à discuter cinéma pendant des heures autour d'une table, à s'engueuler, à se rabibocher autour d'un autre film, une personne qui s'était complètement construite à partir de films, mais Godard, aussi antipathique puisse-t-il être, est celui qui est le plus rigoureux, avec un rapport beaucoup plus complexe à l'image, qu'il rejette comme limitée, viciée par essence, et dont en même temps il ne peut pas se passer. L'idée qu'il y ait des réalisateurs comme Godard, Von Trier, ou Lynch, qui vont peut-être faire des films que je vais détester, mais qui au moins prennent des risques, évitent de se répéter ou de faire des films où ils soient trop à l'aise, me plaît bien davantage que de subir des œuvres "de la maturité" de réalisateurs déjà reconnus, qui vont faire une ou deux variations sur des thèmes qu'ils avaient déjà développés ailleurs (et souvent en mieux) et recevoir des statuettes de la part de jurys pour qui un film, c'est comme la bouffe : c'est meilleur quand on connaît déjà bien la recette.
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Message » 19 Mai 2014 15:09

Je suis d'accord qu'il faut des Goadard et des Lars von Trier, ils ont fait avancer le langage cinématographique, mais je reste avant tout un spectateur qui regarde un film pour ressentir des choses fortes et quand la forme prend le pas sur le fond, ou les intentions du réal sont tellement cachées que tu restes en plan, je n'y arrive pas, et sur bon nombre de film de Godard, tu restes en route (quant à Dogville je n'ai pas pu aller au bout).

Le cinéma doit rester "plaisir", et quand tu as certains real qui réussisse à allier le fond et forme, et que justement le langage cinématographique raconte l'histoire on touche au sublime.
(revoir la corde d'hitch, exercice de style par excellence, la forme raconte l'histoire, c'est brillant)

Jacques Audiard par ex possède un langage cinématographique propre dans ses cadrages et rythme, mais au service de son histoire.

Truffaut n'est ni plus moins qu'un réalisateur classique qui respecte son public, que l'on trouve "La Nuit Américaine" assez "facile", je le conçois car c'est le cas, mais encore une fois ce film symbolise le cinéma tel que je l'aime et avec probablement un effet de nostalgie sur mes jeunes années.

C'est drôle, c'est un débat éternel parmi les cinéphiles "Godard ou Truffaut" comme pour le rock "Beatles ou Stones", moi j'aime tout des Beatles, et j'aime quelques titres des Stones (beaucoup quand même).
Effectivement on pourrait mettre en opposition un Lars Von Trier contre un Assayas ou Audiard.

(le dernier Assayas Après mai était très fort).
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Message » 19 Mai 2014 16:30

Godard imposteur ? :o ...Peut-être à vrai dire. Mégalo, insupportable et puant de la gueule, oui, mais comme il est si bien dit plus haut, 50 ans après, il reste Pierrot le Fou, A bout de souffle et le mépris, tous des classiques qu'on enseigne désormais dans les lycées, et pour moi des films immenses.

Pour Lars Von Trier, je garde Breaking the wave dans mon Panthéon personnel, et je ne regarde plus le reste !

@Sledge Hammer, oui avec ça !"L'idée qu'il y ait des réalisateurs comme Godard, Von Trier, ou Lynch, qui vont peut-être faire des films que je vais détester, mais qui au moins prennent des risques, évitent de se répéter ou de faire des films où ils soient trop à l'aise, me plaît bien davantage que de subir des œuvres "de la maturité" de réalisateurs déjà reconnus, qui vont faire une ou deux variations sur des thèmes qu'ils avaient déjà développés ailleurs (et souvent en mieux) et recevoir des statuettes de la part de jurys " !!

Curieux que personne n'ait encore cité Abel Ferrara pou les imposteurs... :siffle: Remarque, Bad Lieutenant, c'est àmha du grand cinéma !

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Message » 21 Mai 2014 12:28

Ecoutez ce matin sur inter , rien compris , juste relevé à propos d'un jeune cinéaste " pauvre homme , il fait ce qu'il peut " ou quelque chose du genre

du coup , ayant eu l'immense privilège de partager un café et une table en tête à tête avec Godard himself, je voudrais une explication que je n'ai pas osé lui demander à l'époque
qu'est que la nouvelle vague .... ? l'image !, le son !
quelqu'un ici peut il ici et mainteant, me le faire comprendre :ane:

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Et je regardai, et je vis apparaitre un cheval couleur pale, et son cavalier se nommait la Mort, et l'enfer le suivait...Bigre c'est terrifiant tout çà !!
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