oyo a écrit:Si le simple fait d'avoir un travail où ça ne se passe pas comme on veut et qu'on ne trouve pas d'autre solution que le suicide, alors on présente une sérieuse pathologie
Y a des trucs à faire avant d'en arriver là : aller voir un psy, se faire arrêter, réfléchir à une reconversion professionnelle, se faire réformer handicapé, que sais-je...
Encore une fois, l'essentiel est ailleurs!
D'une part, la loi impose, lorsqu'il y a suicide sur le lieu de travail et durant le temps de travail une
présomption d'imputabilité de la part de l'employeur — en l'occurrence l'Etat.
Sauf que, dans
tous les cas tombant sous le coup de cette loi, l'Etat en question: 1) refuse le droit (via les DASEN, DSDEN, IA etc.) aux CHS de se saisir des cas comme d'en être saisis (idem dans les cas d'“alerte”), au motif qu'ils n'ont pas été formés pour cela (et leur refuse le droit de procéder à une enquête en cas d'accident comme de suicide ou de tentative de suicide, dans tous les cas); 2) ne passe par aucun organisme indépendant extérieur à lui (contrairement à n'importe où ailleurs sauf dans les fonctions d'Etat) et passe par les Commissions de Réformes (qui ne sont pas faites pour ça); 3) et, dans ces CR siègent: 2 admin, 2 représentants syndicaux et 2 médecins, lesquels font donc la décision; 4) or, dans 80% des CR tenues depuis 7 ans, les médecins en questions ne siègent pas (car ils sont environ 90/100 pour l'ensemble de la France DOM/TOM et établissements à l'étranger compris!) et n'ont, de toute façon, pas accès au dossier médical en question (pour la bonne et simple raison qu'ils ne sont pas habilités à le demander et que, de toute façon, même si la loi impose une visite tous les 5 ans, le taux moyen et de 2… tous les 30 ans). 5) Donc, on les remplace par un “expert” qui est désigné… par l'EN……
D'ailleurs, même en supposant que la CR siège et impute la responsabilité, comme il n'est pas une instance de décision, mais une instance de consultation, les responsables EN prennent la décision sans avoir le devoir de suivre l'avis de la CR…
Donc… Il faut que les familles déposent plaintes et entament les procédures — à leurs frais. Jusqu'à maintenant, on n'a JAMAIS vu un seul dossier aboutir en moins de 6 ans — et certains sont en cours depuis 14 ans. Car l'EN fait systématiquement tous les appels possibles, jusqu'au Conseil d'Etat (lequel a pourtant posé le principe d'imputabilité faisant actuellement loi).
Cerise sur le gâteau: les familles, proches et personnes privées engagent leurs dépensent — l'EN aussi: sur les deniers de l'Etat……
De même, l'Etat s'est, depuis ~10 ans, fixé lui-même, à plusieurs reprises, l'obligation 1) de créer des CHS, 2) de recruter des médecins et 3) de mener des enquêtes sur les questions de santé et, en particulier de suicide.
Des CHS ont été créés, mais a) ils dysfonctionnent gravement (même une enquête de l'inspection générale de l'EN l'a reconnu!) et b) les personnels qui veulent remplir les fiches de signalement d'incident, en particulier dans le primaire et au collège, s'entendent répondre très massivement que “ça ne sert à rien” puis qu'ils doivent solliciter l'autorisation (en la motivant!) au près de leur hiérarchie! Dans le primaire, il a fallu à certains collègues que je connais (qui avaient déposé une plainte pour harcèlement contre des supérieurs hiérarchiques) 3 ans avant d'accéder à ladite fiche, qui a ensuite été transmise au CHS: le harceleur avait eu une mutation…… un an avant!
Les médecins sont toujours aussi nombreux: environ 1 pour 15000 (cf
https://www.senat.fr/questions/base/201 ... 18322.html — lien intéressant, me semble-t-il, à lire avec attention)…
L'un de mes collègues qui s'est suicidé il y a 3 ans maintenant, en laissant derrière lui une épouse éplorée et ses trois enfants, avait fait une demande pour voir un médecin du travail. En 2007. Quant aux collègues qui sont en arrêt pour dépression “réactive aux conditions de travail” (déclarée comme telle et acceptée comme telle par la sécu, les assurances santé et par… l'EN qui acceptent leurs arrêt long comme totalement légitimes!), s'ils se suicident, ça sera chez eux: donc AUCUN lien avec le travail… Car enfin, ça se saurait: la médecine du travail aurait été saisie — et si elle ne l'a pas été, c'est que c'était la responsabilité……… du collègue!
Quant aux enquêtes à mener: c'est promis, juré, craché, on va les faire dès qu'on peut, pensez-vous — disent en coeur tous les responsables de l'EN…… depuis 2011-2012. Et dès qu'ils sont interrogés sur ce point: ils disent toujours la même chose a) on fait remonter toutes les informations sur la santé au travail, y compris sur les suicides et b) on n'a aucune statistique fiable sur cette question…… Ils ont même monté une instance, en collaboration avec la MGEN (mutuelle à laquelle adhèrent pas mal d'enseignants), qui a accepté de financer en partie l'opération (oui, on a bien lu: donc avec les cotisations des profs): mais, si elle existe depuis 3 ans, personne n'en a eu depuis aucune nouvelle!
Un autre exemple? Au printemps passé, un instit, qui venait d'avoir une discussion avec une mère de famille (qui n'était pas d'accord sur une sanction reçue par sa fille), a été accusé par dépôt de plainte, de «violence aggravée sur mineur», et mis à pied séance tenante par sa hiérarchie, au prétexte qu'il était mis en examen. Il s'est suicidé le 2 mai passé, deux jours après sa convocation, sa suspension et la réception d'un courrier disant qu'il était mis en examen… Le problème, vois-tu, c'est qu'en fait il n'était……… pas mis en examen. D'ailleurs l'enquête
préliminaire de gendarmerie l'a directement disculpé! L'administration locale de l'EN admet qu'elle aurait fait une erreur de copier-coller dans son courrier……
Mais évidemment, il n'y a AUCUN lien entre son suicide et le travail: d'ailleurs, il ne s'est pas suicidé sur son lieu de travail. C'est donc à la famille (qui a porté plainte contre X) de prouver qu'il y aurait un lien — laquelle famille attend toujours un courrier officiel d'excuses, qui ne viendra jamais (car il pourrait servir de preuve de ce que tout le monde sait)……
Cdlt