Modérateurs: Modération Forum Oeuvres & Multimédia, Le Bureau de l’Association HCFR • Utilisateurs parcourant ce forum: Berlinois, gonzic et 35 invités

Films (débats, critiques), personnalités (acteurs, réalisateurs), prochaines sorties, les salles, la presse spécialisée...

Je l'ai vu et j'aime...

un peu
7
10%
beaucoup
33
49%
à la Folie
16
24%
pas du tout
11
16%
 
Nombre total de votes : 67

Joker [2019]

Message » 18 Jan 2021 23:32

Acheté et vu en connaissant juste le succès du film. Rien lu, même pas vu la bande-annonce d’ailleurs. J’avais beaucoup apprécié le Bat-Nolan2 et son Joker mais je suis saturé des films de super héros depuis des années.
Et bien, j’ai beaucoup aimé, l’ambiance, l’image, la bande-son. Un film sans combat à rallonge. Vraiment pas mal et carrément osé par rapport aux autres productions dans les univers de super héros.
Sim_v
 
Messages: 1122
Inscription Forum: 11 Sep 2002 10:20
Localisation: Quelque part en Bretagne
  • offline

Message » 18 Jan 2021 23:50

Ce n'est pas un repompage de Taxi Driver et de The King of Comedy ?

Je n'ai vu que la bande annonce pourtant.

Ils avaient même demandé a Martin Scorsese de produire le film , d'autres sources disent qu'on lui avait proposé de le réaliser !

https://www.esquire.com/entertainment/m ... mparisons/

Travis Bickle avait déjà inspiré Walter Joseph Kovacs aka Rorschach.

Dans le comic il est admis depuis The Killing Joke que le Joker ne serait rien sans Batman .
jhudson
 
Messages: 14137
Inscription Forum: 27 Mar 2006 15:52
  • offline

Message » 19 Jan 2021 0:21

jhudson a écrit:Ce n'est pas un repompage de Taxi Driver et de The King of Comedy ?

C'en est en tout cas particulièrement inspiré.
tenia54
 
Messages: 6374
Inscription Forum: 22 Nov 2010 22:40
  • online

Message » 09 Fév 2021 1:28

Je viens de voter beaucoup :oldy:
Assez sensible aux redites et connaissant bien Taxi Driver, je n'ai pas été gêné. A l'inverse, je n'avais pas vu l'intérêt d'A Beautiful Day, pour le coup parfaitement inutile car entrant en confrontation évidente avec Taxi Driver. J'ai très peu lu les comics et n'ai pas d'idée préconçue sur le Joker, mais j'ai vu les derniers Batman et la lecture alternative du grand Wayne bienfaiteur de Gotham city m'a bien amusé.

Sinon grande performance de Joaquin Phoenix déjà adoré dans Inherent Vice, super film également. Et une pensée pour le non moins extraordinaire Conrad Veidt interprétant L'homme qui rit du réalisateur allemand Paul Leni en 1928. Le personnage à la source de l'influence du Joker. Celui dont le père n'ayant pas accepté l'autorité du despote finira dans une Iron lady et lui sera charcuté pour garder un sourire éternel. Le clin d'œil à distance est sympa lorsque Joaquin Phoenix mime le même geste que le méchant conseiller du despote :



Conrad Veidt dans le rôle ne pouvait se servir que de la gestuelle et du regard. Il accepte enfin de se laisser toucher par la jolie Mary Philbin en la guidant pour masquer sa bouche, même le spectateur apprécie de voir disparaître pour un instant la grimace si douloureuse
Image
Kishizo42
 
Messages: 463
Inscription Forum: 02 Mai 2019 21:45
  • offline

Message » 09 Fév 2021 11:44

Intéressant : je ne vois franchement pas la "confrontation évidente" entre A Beautiful Day et Taxi Driver, notamment thématiquement, et dont j'aurais bien du mal à éliminer d'un revers de la main comme "parfaitement inutile" de par ce seul élément.

Par ailleurs, Joker doit bien plus a King of Comedy que Taxi Driver.
tenia54
 
Messages: 6374
Inscription Forum: 22 Nov 2010 22:40
  • online

Message » 09 Fév 2021 14:22

Kishizo42 a écrit:Je viens de voter beaucoup :oldy:
Assez sensible aux redites et connaissant bien Taxi Driver, je n'ai pas été gêné. A l'inverse, je n'avais pas vu l'intérêt d'A Beautiful Day, pour le coup parfaitement inutile car entrant en confrontation évidente avec Taxi Driver. J'ai très peu lu les comics et n'ai pas d'idée préconçue sur le Joker, mais j'ai vu les derniers Batman et la lecture alternative du grand Wayne bienfaiteur de Gotham city m'a bien amusé.

Sinon grande performance de Joaquin Phoenix déjà adoré dans Inherent Vice, super film également. Et une pensée pour le non moins extraordinaire Conrad Veidt interprétant L'homme qui rit du réalisateur allemand Paul Leni en 1928. Le personnage à la source de l'influence du Joker. Celui dont le père n'ayant pas accepté l'autorité du despote finira dans une Iron lady et lui sera charcuté pour garder un sourire éternel. Le clin d'œil à distance est sympa lorsque Joaquin Phoenix mime le même geste que le méchant conseiller du despote :


Conrad Veidt dans le rôle ne pouvait se servir que de la gestuelle et du regard. Il accepte enfin de se laisser toucher par la jolie Mary Philbin en la guidant pour masquer sa bouche, même le spectateur apprécie de voir disparaître pour un instant la grimace si douloureuse
Image


Dans le roman de l'homme qui rit de Hugo c'est une mutilation a l'arme blanche qui lui fait un sourire éternel, idée repris par le Joker de Nolan.
jhudson
 
Messages: 14137
Inscription Forum: 27 Mar 2006 15:52
  • offline

Message » 11 Fév 2021 0:14

tenia54 a écrit:Intéressant : je ne vois franchement pas la "confrontation évidente" entre A Beautiful Day et Taxi Driver, notamment thématiquement, et dont j'aurais bien du mal à éliminer d'un revers de la main comme "parfaitement inutile" de par ce seul élément.

Par ailleurs, Joker doit bien plus a King of Comedy que Taxi Driver.


Je n'ai pas vu King of Comedy et si c'était le cas mon avis serait peut-être différent, dans la majorité des films on retrouve des influences, parfois cela me dérange et d'autres fois non. Soit j'ai l'impression de revoir le même film sans apport personnel intéressant du réalisateur, soit au contraire la variation m'intéresse.

J'ai trouvé A Beautiful Day très proche de Taxi Driver, ancien militaire en proie à des difficultés pour s'insérer dans une vie sociale normale, une société montrée sous l'aspect sombre de la corruption, bafouant l'innocence en piégeant dans la prostitution une jeune mineure, que le personnage ira délivrer avec une grande brutalité. Même l'affiche publicitaire du film ramène à la comparaison :
Image

Au delà de cela nous sommes plus généralement dans la catégorie du film noir, et ces derniers possèdent souvent les mêmes caractéristiques pour les réalisateurs souhaitant en faire un bon. Une de celles-ci est le réalisme et c'est en cela que j'ai trouvé le réalisateur très bon, au delà bien entendu du rendu image sans tournage sur fond vert, de l'absence d'effets spéciaux, de l'ambiance neurasthénique de Gotham, des teintes et du rendu expressionniste. Plutôt dans la difficulté de donner à un personnage de comics une réelle identité lui conférer un réalisme qui fait que celui ignorant jusqu'à l'existence de Batman ne penserait pas forcément que le film repose sur des aventures dessinés.

Une autre constante des films noirs découlant de la première est le plus souvent leur scénario simple, le petit jeu du scénariste trop inventif détourne de l'aspect implacable, la qualité se fait sur l'interprétation et l'ambiance distillée. A titre d'exemple, dans mes critères d'appréciation Usual Suspects fait trop mumuse pour être classé en bon film noir, Tchao Pantin, à l'inverse oui. Dans Joker la seule surprise adressée aux spectateurs est la partie agréable d'une fréquentation sociale réussie, se révélant en fait une partie fantasmée. La révélation est amenée avec finesse, le stratagème permet d'alléger la noirceur et rendre le visionnage moins lourd dans la traversée du film, pour ensuite au final redoubler la noirceur et ne pas rendre le basculement du Joker dans sa fuite en avant artificielle. Double effet kiss cool remarquable, bravo. Les scènes également du Joker recherchant ses origines, notamment le face à face avec celui qu'il croyait être son père dans le vestiaire des chiottes, lui en godilles et l'autre en costard, ce dernier d'une rudesse inhumaine à renvoyer l'importun jusqu'à lui ficher un coup de poing qui lui fera moins de mal que la vérité balancée sans ménagement.

Sinon la scène finale de l'asile m'a fait penser à Vol au dessus d'un nid de coucou :ane:
Le jeu de couloir avec Joker partant d'un côté et le soignant ou gardien prenant l'autre sens avant de revenir vers le bon. Procédé classique du burlesque et quoi marier de mieux à l'asile qu'un bon fou rire :lol:
Kishizo42
 
Messages: 463
Inscription Forum: 02 Mai 2019 21:45
  • offline

Message » 11 Fév 2021 1:15

Il y a un film récent proche de Taxi Driver : First Reformed 2017 , le scénario est aussi de Paul Schrader ,c'est plutôt une variation sur un même thème qu'un remake déguisé.

Le marketing est toujours prompt a comparer un film avec un autre plus connu pour mieux le vendre, a croire que l'originalité n'est pas de mise au cinema.

Phoenix a un bon quota de psychopathe en tout genre , c'est devenu banal de le choisir pour interpréter ce genre de personnage !
jhudson
 
Messages: 14137
Inscription Forum: 27 Mar 2006 15:52
  • offline

Message » 11 Fév 2021 9:28

Mouais.
La rhetorique du Film Noir, catégorie déjà fourre-tout à la base mais encore plus maintenant, ne me convainc guère, d'un côté parce que les arguments restent généraux (et donnent l'impression que l'appartenance même au genre ou la volonté de jouer avec certains codes influenceraient la qualité du film) et de l'autre parce que ni Taxi Driver ni A Beautiful Day (ni Joker d'ailleurs) ne relèvent du film noir sous son style de départ.

Quant à la comparaison, Taxi Driver et A Beautiful Day ont des styles et surtout des priorités bien différentes dans ce qu'elles décrivent. Scorsese nous dépeint notamment et peut-être surtout la déliquescence de la société perçue par son protagoniste, avec l'idée qu'il a sans doute une vision déformée des choses. Shelton se concentre elle sur l'intériorité fermée de son personnage, fermé à l'intérieur et ça se voit à l'extérieur, contrairement à De Niro qui est toujours à portée du spectateur.

Pour le reste, oui, on suit des asociaux violents dans une société individualiste considérée comme en plein crash, mais de là à considérer tous ces films en parfaite confrontation...

Quant à la révélation de Joker, elle m'a parue prévisible de bout en bout et j'ai déjà détaillé en quoi le film martelait constamment son message avec la finesse d'un bûcheron québecois avec 8g dans chaque oeil. Notamment car le film reprend, pour le coup, le déroulé de King of Comedy.
tenia54
 
Messages: 6374
Inscription Forum: 22 Nov 2010 22:40
  • online

Message » 13 Fév 2021 16:02

tenia54 a écrit:Mouais.
La rhetorique du Film Noir, catégorie déjà fourre-tout à la base mais encore plus maintenant, ne me convainc guère, d'un côté parce que les arguments restent généraux (et donnent l'impression que l'appartenance même au genre ou la volonté de jouer avec certains codes influenceraient la qualité du film) et de l'autre parce que ni Taxi Driver ni A Beautiful Day (ni Joker d'ailleurs) ne relèvent du film noir sous son style de départ.


La volonté de jouer avec certains codes n'influence pas la qualité du film en tant que tel, elles influencent sa qualité de film noir parce que là oui, il y a des recettes. Pour reprendre mon exemple Usual Suspect n'est pas pour moi un film noir, cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas avoir des qualités dans un autre style. On peut aimer les intrigues policières d'Agatha Christie mais ce n'est pas du polar noir.
J'ai vu dernièrement Joker sur Canal, mon fils aîné était préalablement allé le voir au cinéma. Lorsqu'il est revenu aucune tentative d'expliquer le film, juste c'était très sombre mais j'ai bien aimé, je me suis dit que cela devait être autre chose que les films pop corn habituellement proposés à la clientèle ado.

tenia54 a écrit:Quant à la comparaison, Taxi Driver et A Beautiful Day ont des styles et surtout des priorités bien différentes dans ce qu'elles décrivent. Scorsese nous dépeint notamment et peut-être surtout la déliquescence de la société perçue par son protagoniste, avec l'idée qu'il a sans doute une vision déformée des choses. Shelton se concentre elle sur l'intériorité fermée de son personnage, fermé à l'intérieur et ça se voit à l'extérieur, contrairement à De Niro qui est toujours à portée du spectateur.


Oui je suis d'accord, mais tu mets le doigt sur le point faible d'A Beautiful Day, c'est un film formaliste, le fond n'a que peu d'importance. Un truc se voulant arty débouchant sur une coquille vide. Le spectateur est spectateur de ce qu'on lui donne à voir, juste quelques flashbacks service minimum, un peu comme The Revenant, la seule chose comptant est l'action présente et d'envoyer rapidement l'idée que s'il est comme ça, c'est qu'il en a chier précédemment. Facile d'être léger dans ces conditions et pourquoi pas, mais alors il faut être très talentueux sur le plan de la réalisation. Je viens de me passer une vidéo de deux chroniqueurs pour comprendre ce qui avait pu m'échapper, elle arrive à se passer des dialogues et faire comprendre avec un plan préalable sur une échelle de secours que le personnage va s'échapper par là. J'ai bien envie de leur demander s'ils ont déjà vu un chef d'œuvre du cinéma muet, parce qu'ils en resteront sur le cul s'ils découvrent avec ce film la "narration visuelle" :lol:
https://www.youtube.com/watch?v=_fyl7pTNmdU

Alors oui c'est sympa dans leur extrait le plan en contre plongée de Phoenix sortant du sous sol avec la capuche du sweat lui masquant le visage, elle connaît le cinéma expressionniste et sans doute Murnau, et a été marquée plus récemment par le personnage de Forest Whitaker dans le cultissime Ghost Dog de Jarmusch.
Image

Plutôt que Taxi Driver, son film ressemble à Ghost Dog. Elle n'est pas la seule à repomper sur lui, jusqu'à John Wick avec le personnage de Neo sur les toits avec ses pigeons qui m'y a fait penser dernièrement. Seulement en plus de son esthétique remarquable, Ghost Dog comprenait d'autres choses, de l'improbable avec le croisement de mafieux italiens et d'un black à l'apparence plutôt gangsta rap se référant au code de l'honneur samouraï. Tout cela apportait un télescopage des brassages de la société us, le film était ancré dans une vision de la société en pleine mutation avec des personnages déboussolés et s'en remettant à de vieux codes de l'honneur pour guider leurs actions.

tenia54 a écrit:Pour le reste, oui, on suit des asociaux violents dans une société individualiste considérée comme en plein crash, mais de là à considérer tous ces films en parfaite confrontation...

Quant à la révélation de Joker, elle m'a parue prévisible de bout en bout et j'ai déjà détaillé en quoi le film martelait constamment son message avec la finesse d'un bûcheron québecois avec 8g dans chaque oeil. Notamment car le film reprend, pour le coup, le déroulé de King of Comedy.


Justement dans un film noir, il n'y a aucune révélation à attendre, la désespérance vient du cheminement connu d'avance n'apportant aucune surprise. C'est ce qui apporte la noirceur, si Joker était devenu en fin de compte un humoriste reconnu inséré socialement alors là on sortait du film noir.

Je n'ai pas vu King of Comedy, mais sur wiki :
Le film décrit « le malaise d'une civilisation obsédée par la célébrité, par le besoin de reconnaissance, et où la réussite se vit et s'expérimente sur le mode de la performance scénique »


Au delà du fait que la scène en question n'est pas une référence masquée puisqu'ils se sont amusés à renverser le rôle, De Niro devenant le comique en haut de l'affiche, ce n'est qu'une branche des nombreuses directions de Joker. Psychiatrie, recherche de filiation, approche politique etc... Et dans Joker je ne trouve pas le personnage consumé par l'envie de la célébrité, mais plutôt par celle de trouver une place dans la société, se sortir de son taudis, ce qui est différent. Bien entendu passer au show télévisé l'attire mais ce n'est pas pour singer le comique en place et bénéficier de l'aspect artificiel de la reconnaissance, mais faire connaître son existence et ses propres qualités, à défaut, il y trouvera une tribune.

Lorsqu'il comprend que ce monde lui est inaccessible, que l'invitation se destine à se moquer de lui et son humour immature, il se détournera du comique pour délivrer un message politique. Ce n'est pas la célébrité à tout prix qui l'intéresse. Il arrive à divertir des enfants malades car son burlesque de clown le lui permet, il sort de sa représentation à cause de l'arme, irruption de la société adulte. Ensuite le talk show est un autre monde qu'il ne parvient à rejoindre. Embrasser la vieille en arrivant choque plus l'assistance qu'elle ne la fait rire.

Tout comme dans Taxi Driver De Niro invitera en toute innocence son béguin amoureux à une première sortie dans un cinéma porno. Il n'y a aucune intention malsaine derrière mais juste une méconnaissance de la vie sociale, il ne connaissait de l'autre sexe que les bordels militaires.

Devant cette impossibilité à communiquer avec les adultes, il met fin à l'échange brutalement à l'aide de l'arme à feu remise à lui dans l'intention malveillante d'un personnage prétendant le comprendre. Ce dernier souhaitait plutôt que le voir se défendre, l'imaginer tenter de se supprimer à la suite de son congédiement, il sera également trucidé.

La première rencontre avec l'usage de l'arme est d'ailleurs caractéristique, elle est fortuite et il semble de manière enfantine comprendre qu'elle peut résoudre une situation dans laquelle il n'était pas armé par les mots. Il ne pouvait opposer que son rire pathologique, ce qui ne correspondait pas exactement à ce qui pouvait calmer les importuns de la nana dans le métro.

Joker était resté bloqué dans le monde de l'enfance parce qu'il rejetait la sienne brutalisée par le copain violent de sa mère et souhaitait la revivre avec celui qu'il croyait être son père biologique, le personnage le plus influent de Gotham. La scène de la barrière avec le jeune Batman est remarquable et il ne lui veut pas de mal, juste le rejoindre de l'autre côté. La scène est troublante.

Celle du premier talk show dans le petit club également, on voit la transition entre le réel et le fantasmé et je trouve la réalisation excellente, plus fine que démonstrative. Bon tout cela reste subjectif et nous ne nous accorderons pas, l'intérêt de la confrontation est plutôt de comprendre ses propres critères de jugement en cherchant à expliciter ceux-ci et quoi de mieux qu'un contradicteur. On peut même parfois changer d'avis, mais je reste sur ma position, Joker est pour moi un très bon film, A beautiful day, plus dispensable, un bon transporteur de Besson sera meilleur dans le style radical :hehe:
Tout autant immature que le Joker pour glisser une dernière flèche en trop c'est moi :ane:
Bon cela fera contre-balancier avec "la finesse d'un bûcheron québecois avec 8g dans chaque oeil". :ko:
Kishizo42
 
Messages: 463
Inscription Forum: 02 Mai 2019 21:45
  • offline

Message » 13 Fév 2021 19:10

Kishizo42 a écrit:On peut aimer les intrigues policières d'Agatha Christie mais ce n'est pas du polar noir.

C'est bien là ma question : et alors ?

Kishizo42 a écrit:Oui je suis d'accord, mais tu mets le doigt sur le point faible d'A Beautiful Day, c'est un film formaliste, le fond n'a que peu d'importance. Un truc se voulant arty débouchant sur une coquille vide. Le spectateur est spectateur de ce qu'on lui donne à voir.

A Beautiful Day est, tout simplement, pas particulièrement un film exceptionnel. A partir de là, on peut lui trouver des défauts qui lui sont propres, mais je ne vois pas en quoi ses défauts permettraient de servir l'argumentaire d'autres films.
Pour le reste, je n'ai aucun problème avec le fait d'être spectateur, ce qui, en théorie, est censée être la position... du spectateur.
Enfin, le fait qu'on puisse revenir à un cinéma visuel peut très bien être une qualité, voire un élément qu'on apprécie et recherche dans un film. Dans le cas d'A Beautiful Day, qui est un film peu bavard, c'est logique, et même heureux, que le film en soit capable puisque sinon, ce serait un sacré foutoir. Est-ce qu'on doit reprocher d'apprécier le cinéma de Melville pour son approche visuelle et malgré l'existence du cinéma muet avant lui ? A la bonne heure.

Kishizo42 a écrit:Plutôt que Taxi Driver, son film ressemble à Ghost Dog. Elle n'est pas la seule à repomper sur lui, jusqu'à John Wick avec le personnage de Neo sur les toits avec ses pigeons qui m'y a fait penser dernièrement. Seulement en plus de son esthétique remarquable, Ghost Dog comprenait d'autres choses, de l'improbable avec le croisement de mafieux italiens et d'un black à l'apparence plutôt gangsta rap se référant au code de l'honneur samouraï. Tout cela apportait un télescopage des brassages de la société us, le film était ancré dans une vision de la société en pleine mutation avec des personnages déboussolés et s'en remettant à de vieux codes de l'honneur pour guider leurs actions.

Ghost Dog, en grande partie inspiré par La marque du tueur, de Seijun Suzuki. Doit-on à partir de là rabaisser par défaut les qualités intrinsèques du Jarmusch, car finalement pas si originales que ça sur plusieurs points ?

Kishizo42 a écrit:Justement dans un film noir, il n'y a aucune révélation à attendre, la désespérance vient du cheminement connu d'avance n'apportant aucune surprise.

Euh, pas forcément. Le film noir peut parfaitement venir avec une intrigue à suspense, quelques rebondissements, voire même un twist quelque part.
Le souci de Joker n'est pas qu'il respecterait (ou non) un cheminement tragique courru d'avance mais qu'il le fait de façon pachydermique précisément en se contentant d'enfiler les perles à la suite avec résolument aucune finesse.

Kishizo42 a écrit:Au delà du fait que la scène en question n'est pas une référence masquée puisqu'ils se sont amusés à renverser le rôle, De Niro devenant le comique en haut de l'affiche, ce n'est qu'une branche des nombreuses directions de Joker.

Une grande partie de l'intrigue et son déroulé est calquée sur King of Comedy : son personnage psychotique, la critique de la société consumériste du spectacle, l'attrait démesuré des personnalités TV sur les quidams, le quart d'heure de célébrité à la Warhol, j'en passe et des meilleures. Le fait que De Niro soit dans le film est littéralement une référence directe au film de Scorsese, et Scorsese lui-même a été consulté par Phillips.

On pourra ensuite dire (et heureusement) que ce n'est pas un pur décalque du Scorsese, mais le fait qu'on trouve des éléments de différence n'efface pas les éléments de rapprochement.

Kishizo42 a écrit:On peut même parfois changer d'avis, mais je reste sur ma position, Joker est pour moi un très bon film, A beautiful day, plus dispensable, un bon transporteur de Besson sera meilleur dans le style radical :hehe:

C'est surtout que je ne questionnais l'utilisation triangulaire de Taxi Driver et A Beautiful Day, pas ensuite comment on trouve tel ou tel de ces 3 films. :wink:
tenia54
 
Messages: 6374
Inscription Forum: 22 Nov 2010 22:40
  • online

Message » 19 Fév 2021 0:29

tenia54 a écrit:
Kishizo42 a écrit:On peut aimer les intrigues policières d'Agatha Christie mais ce n'est pas du polar noir.

C'est bien là ma question : et alors ?


Juste pour dire que Joker n'est pas un film de super hero classique. Si on va le voir dans cette optique, le jugement sera très mauvais. Le réalisateur n'entend pas en faire un génie du crime surnaturel, le réalisme prévaut. Le film est la génèse du basculement vers la folie d'un quidam presque ordinaire et les circonstances qui vont en faire contre toute attente un personnage influant de Gotham.

Une part de la population de Gotham ne se sent pas représentée et la révolte ne demande qu'à se matérialiser sous un événement fédérateur. Ce qui ne devait être qu'un fait divers, les deux employés de Wayne entreprise descendus, alors même que la criminalité est galopante, sera transformé en caisse de résonnance médiatique très maladroitement par Wayne père dans sa campagne médiatique.

De là provient l'étincelle d'une insurrection prête à exploser au grand jour et le Joker devient un instrument fédérateur, tous avec un masque de clown. Les scènes de guérilla urbaine alors que le Joker est transféré dans la voiture de police et observe sont un basculement, il prend conscience du rôle et de l'influence qu'il peut prendre sur les révoltés de Gotham. La scène dans laquelle les assaillants vont l'extirper inanimé de la voiture de police et le coucher sur le toit d'une voiture pour l'exposer aux regards symbolise le martyr de leur cause. Et à ce moment, s'il ressuscite, le personnage prend une ampleur mythologique, fou et vénéré, tout devient possible pour lui.

Toute la force du réalisateur parvenant à créer le Joker des comics en conservant une vraisemblance de bout en bout tout en abordant des thématiques très actuelles. Il me semble avoir un bon sens de l'observation et le cheminement me paraît très réaliste, à aucun moment je ne me suis dit que son histoire n'était pas plausible. Son film n'est pas trop facile car s'il relève l'aspect hors sol du dirigeant, il est conscient également des mécanismes de groupe. Son film est plus dans la compréhension d'ensemble d'une situation que dans la volonté d'imposer une position au spectateur.

Ce qui me semble être la marque d'un bon film noir ne laissant pas le spectateur avec un échappatoire trop facile sur lequel se reposer. Aucun horizon, noir c'est noir :mdr: Et pourtant, il arrive à glisser quelques moments plus légers et faire sourire le spectateur. C'est sans doute ce qui m'impressionne chez ce réalisateur, son habileté à trouver des équilibres. Il ne tombe pas non plus dans le pathos, les révélations sur la jeunesse de Joker sont dures, mais il enchaine rapidement avec le matricide peu sympathique, ce qui ne permet pas de s'apitoyer sur son sort.

tenia54 a écrit:A Beautiful Day est, tout simplement, pas particulièrement un film exceptionnel. A partir de là, on peut lui trouver des défauts qui lui sont propres, mais je ne vois pas en quoi ses défauts permettraient de servir l'argumentaire d'autres films.
Pour le reste, je n'ai aucun problème avec le fait d'être spectateur, ce qui, en théorie, est censée être la position... du spectateur.
Enfin, le fait qu'on puisse revenir à un cinéma visuel peut très bien être une qualité, voire un élément qu'on apprécie et recherche dans un film. Dans le cas d'A Beautiful Day, qui est un film peu bavard, c'est logique, et même heureux, que le film en soit capable puisque sinon, ce serait un sacré foutoir. Est-ce qu'on doit reprocher d'apprécier le cinéma de Melville pour son approche visuelle et malgré l'existence du cinéma muet avant lui ? A la bonne heure.


Ce n'est pas tant qu'ils servent l'argumentaire d'autres films qu'un moyen pour moi de comprendre ce que j'apprécie au cinéma. Je peux me contenter de dire aimer Joker et être resté à quai avec A beautiful day, mais je suis curieux de comprendre mes critères de jugement. Lorsqu'un film me plaît alors même qu'il contrevient à une de mes règles habituelles, cela m'intéresse également de comprendre pourquoi je ne suis pas dans ma logique et la préciser. A titre d'exemple Lars Von Trier en fait souvent trop et pourtant j'aime bien ce réalisateur.
Inversement J'aime Taxi Driver et je me demande quels sont les éventuels points communs de réalisation avec Joker. Si ABD n'avait existé, Joker m'aurait plu tout autant.

Sur mon utilisation de spectateur, bien entendu au sens large nous le sommes tous. J'entendais plutôt la passivité de ne pas entrer dans le film, être resté extérieur. Le justicier est taiseux donc le film pourra être très silencieux, ok, mais cela n'implique pas une image silencieuse, celle-ci ne me parle pas, ni ne me subjugue artistiquement. Drive de Refn aurait pu être dans le même cas, le postulat est le même, mais il m'a captivé parce qu'il a su mettre une énorme tension. Même s'il n'y avait rien à découvrir, il m'a fait croire que oui.

Ce qu'il se passe dans nos têtes lors d'un visionnage est complexe, même en prétendant regarder un film avec les yeux de celui qui n'en a jamais vu, ce n'est jamais le cas. Il y a une part de nous recevant le film tel qu'il est et l'autre le confrontant même inconsciemment avec ce qu'il a pu voir précédemment. Même quelqu'un de très passif, souhaitant tout débrancher et regarder le film comme si c'était son premier le fera sans s'en rendre compte. Il trouvera tel film pas terrible parce qu'en fait les effets spéciaux étaient moins spectaculaires et moins réalistes que les meilleurs actuels dans ce domaine. Les critères seront différents parce que l'attente n'est pas la même, mais il y aura toujours une comparaison. Nous ne sommes plus au premier temps du cinéma lorsqu'au visionnage du premier western, un cowboy semblant tirer en direction de la salle horrifiait les spectateurs. L'image est devenue omniprésente, le public consomme beaucoup de films, son jugement évolue ou pas en fonction de son cheminement cinéphile.

Le cinéma muet m'offre mon hit parade de films préférés, ce n'est pas un snobisme car j'aime également bien des films parlants. Ces derniers lorsqu'ils deviennent un peu plus taiseux pour communiquer par l'image me plaisent beaucoup, dans ce cas ce n'est pas pour faire genre ou masquer le vide.

tenia54 a écrit: Ghost Dog, en grande partie inspiré par La marque du tueur, de Seijun Suzuki. Doit-on à partir de là rabaisser par défaut les qualités intrinsèques du Jarmusch, car finalement pas si originales que ça sur plusieurs points ?


Tout autant du Samouraï de Melville de la même année 67. Je suis d'accord avec toi et l'originalité est Mission impossible. Je vénère Murnau et apprécie aussi la peinture, il est bien évident qu'il s'est inspiré de toiles à de nombreuses reprises, également de sculpteurs. Le cinéma était un art dérivé d'autres arts à l'origine, aujourd'hui c'est un peu comme la télé faisant des émissions sur la télé, et la revisite ne s'influence pas toujours des bons films. Les réalisateurs semblent remplacés par une équipe de personnes du service marketing, le film est décomposé avec de multiples intervenants responsables d'un aspect particulier, c'est du fordisme, pas le cowboy :lol:
Il me semble donc que tout dépend de quoi on s'influence et si au delà le réalisateur apporte quelque chose de personnel justifiant de l'intérêt de son film comme une variation intéressante et singulière.

tenia54 a écrit:Euh, pas forcément. Le film noir peut parfaitement venir avec une intrigue à suspense, quelques rebondissements, voire même un twist quelque part.
Le souci de Joker n'est pas qu'il respecterait (ou non) un cheminement tragique courru d'avance mais qu'il le fait de façon pachydermique précisément en se contentant d'enfiler les perles à la suite avec résolument aucune finesse.


Tu as peut-être raison et cela m'intéresse de connaître des exemples. A priori je suis tenté de classer ces films dans la catégorie thriller.
Sinon on est en désaccord, je ne comprends pas le manque de finesse dans ta perception du film. Je suis peut-être à côté de la plaque, mais je n'ai pas perçu cela.

tenia54 a écrit:Une grande partie de l'intrigue et son déroulé est calquée sur King of Comedy : son personnage psychotique, la critique de la société consumériste du spectacle, l'attrait démesuré des personnalités TV sur les quidams, le quart d'heure de célébrité à la Warhol, j'en passe et des meilleures. Le fait que De Niro soit dans le film est littéralement une référence directe au film de Scorsese, et Scorsese lui-même a été consulté par Phillips.

On pourra ensuite dire (et heureusement) que ce n'est pas un pur décalque du Scorsese, mais le fait qu'on trouve des éléments de différence n'efface pas les éléments de rapprochement.


Je n'ai pas vu King of Comedy mais la description ne me paraît pas de la même thématique. Des ressemblances tout comme entre Taxi Driver trop vite assimilé à A beautiful day, j'ai changé d'avis à ce sujet parce qu'effectivement sur le fond le personnage est traité de manière différente au delà d'une histoire proche. Des emprunts formels, la petite blondine de ABD correspondant au personnage de Jodie Foster.

Tu commets la même erreur que moi, la critique de la société consumériste du spectacle n'est pas le sujet central de Joker, si tant est qu'elle soit abordée, c'est très accessoire. C'est la mère de Joker qui est au visionnage religieux de l'émission de l'humoriste, Joker souhaite se sortir du merdier pour rendre heureuse sa mère et la rendre fière de lui. Sinon lui-même serait déjà bien content de réussir dans un petit club en one man show. La thématique de King of Comedy me fait plutôt penser au Prix du danger d'Yves Boisset, à Un après-midi de chien de Sidney Lumet...
Kishizo42
 
Messages: 463
Inscription Forum: 02 Mai 2019 21:45
  • offline

Message » 19 Fév 2021 8:04

Kishizo tu prépares l’agrégation de cinéma ? :hehe:

La configuration dans mon profil


Bluesound Node / SMSL M500 /McIntosh MA 5200 / Davis Monitor 1 /Mogami 3103HP.
Alternativement un intégré FDA Nubert Nuconnect Xamp
"Je déteste deux choses: l'analyse et le pouvoir" - Sviatoslav Richter.
Avatar de l’utilisateur
autrichon gris
Modérateur Œuvres & Multimédia
Modérateur Œuvres & Multimédia
 
Messages: 8980
Inscription Forum: 21 Oct 2009 14:18
Localisation: Strasbourg
  • offline

Message » 19 Fév 2021 8:59

A nouveau Kishiro, je ne dis pas que tout Joker pique à tout King of Comedy. Pas d'erreur pour ma part sur le sujet. Cependant, il est clair qu'une majeure partie des évènements du film reprennent la trame du Scorsese. Que cela soit traité psychologiquement ou stylistiquement ne change pas cela, et ce n'est pas comme si j'avais été le seul à rapprocher les 2 films.

Pour le reste et mes soucis avec le film, je me suis déjà exprimé assez longuement sur le sujet dans ce topic même, et je te renvoie simplement à mes posts là dessus. ;)
tenia54
 
Messages: 6374
Inscription Forum: 22 Nov 2010 22:40
  • online

Message » 22 Fév 2021 0:30

autrichon gris a écrit:Kishizo tu prépares l’agrégation de cinéma ? :hehe:


Si cela permet d'approcher quelques starlettes peu farouches :ane:

Sinon je ne vais plus te causer tant que tu n'auras pas vu Tabou de Murnau :evil:
Un plongeur comme toi dois rêver de Polynésie d'apnée et pêche aux perles, rejoindre à la nage la pirogue emmenant Reri déclarée Tabou :cry:
Elle est triste et attend son Autrichon le seul a oser défier la zone de pêche maudite et son gros requin 8)
Image
Kishizo42
 
Messages: 463
Inscription Forum: 02 Mai 2019 21:45
  • offline


Retourner vers 7ème Art

 
  • Articles en relation
    Dernier message