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Musique enregistrée : BLURAY, CD & DVD musicaux, interprètes...

La 6e Symphonie de Tchaïkovski : comment l'entendons-nous ?

Message » 23 Nov 2004 0:06

Formidable !

Nous avions le son… nous avons les images du son !

Donc en 1960 Marvinski détache le cor de la fin de la phrase des cordes.
En 1982 il fait le tuilage entre cordes et le cor.

Intéressant :wink:

Gil, tu préfères la solution de 1960, avec le cor détaché ?
L'effet est-il sensible entre les deux versions ?

En tout cas merci de cette illustration visuelle.


À plus tard Gil…

Gilles
Gilles R
 
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Message » 23 Nov 2004 20:49

Bonsoir,
L'effet n'est pas très sensible entre les 2 versions, en tout cas pour moi, et pour être franc je n'aurais pas fait attention à ceci si tu n'avais pas mis le doigt dessus :wink: . Si les cordes avaient empéché, par effet de masque, d'entendre l'attaque du cor à cause du "tuilage" de la partition, là oui ça aurait été bien différent à l'écoute, mais ce n'est pas le cas car on entend très bien le départ (transitoire) de cette note dans les 2 versions, donc l'image du feu qui s'allume est également présente.
Question: est-ce que ce genre de détail de recouvrement est vraiment maitrisable par un chef humain avec une telle précision? si tu regardes l'echelle de temps, c'est vraiment peanuts! (sans compter que toutes les cordes ne s'arretent pas exactement en même temps, sur aucune des 2...).

Quand on compare les premières minutes des deux versions, ce qui saute aux oreilles par contre, c'est que les cordes ont perdu en 20 ans ce coté chaud et vibrant si attachant, et surtout, que le RYTHME est un peu plus précipité dans la version la plus récente, avec quelques légères imperfections au niveau de la cohésion du "groove" des instrumentistes entre eux (désolé pour mon vocabulaire jazzy) et à plusieurs moments (par ex. le passage sautillant avec flûte haut-bois et clarinette si je ne m'abuse, passage qui commence en 1:59 dans notre version plus convaincante de 1960).

Grâce à ce genre de comparaison que je me rends compte plus concrétement de la complexité pour un chef de faire sonner une symphonie exactement comme il le veut: je m'en doutais un peu mais à ce point c'est vraiment démoniaque!

Au fait dans ces premières minutes de la symphonie, je craque pour le passage de 2:15 à 2:40 à peu près: envolée de violons qui s'emballent sans bavure dans un point culminant* (2:32), immédiatement contrebalancé par un sursaut incongru de contrebasses, suivi d'un étrange motif calmé par les cuivres, sereins... je trouve ce passage, riche en contrastes de dynamique, de pitch et de timbre, très moderne sans savoir expliquer pourquoi, en tout cas c'est à partir de là, qu'à ma première écoute, je me suis dis: waaaaouh! :o
Et vous?

cdlt,
GBo

(*): question: au fait cette envolée est-elle une difficulté technique particulière pour les instrumentistes ou c'est fastoche?
GBo
 
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Message » 23 Nov 2004 23:43

GBo a écrit:Question: est-ce que ce genre de détail de recouvrement est vraiment maitrisable par un chef humain avec une telle précision? si tu regardes l'echelle de temps, c'est vraiment peanuts! (sans compter que toutes les cordes ne s'arretent pas exactement en même temps, sur aucune des 2...).


Normalement cela ne pose aucun problème de faire le legato du dernier temps au début du premier temps avec un tempo à la noire à 54. La nuance finale est p (ce qui n'est pas négligeable). Ce que j'ai dit à Bernard sur cette croche, est que Tchaikovski ne l'a pas mis gratuitement. Cette petite syncope a probablement fonction de sortir très légèrement du cadre rythmique (c'est comme cela que je le lis).
Ne pas le faire à l'entrée pp du cor peut s'expliquer pour mettre en valeur l'entrée et le son doux et lumineux du cor.

Par contre pour la mise en place… les cordes doivent s'arrêter ensemble (finir sur p s'entend).

Avec les musiciens d'orchestre c'est toujours un peu la bagarre pour la fin des sons.
Ils font attention à l'attaque, à l'entretien, mais lorsque le son est en diminuendo, il y a souvent une petite chute d'attention sur la toute fin… ils sont déjà dans la suite (la lecture devance un peu le geste instrumental).
Si un chef ne leur donne pas l'importance de la fin des sons, il y a de fortes chances que les fins ne finissent justement pas toutes en même temps.

Il y a même chez les très grands chefs des priorités… donc parfois certaines imprécisions pour des petits détails… nous en avons vu d'ailleurs tous les deux, deux exemples dans cette version, par mp.
Ces petites imperfections sont minimisées par des qualités exceptionnelles,… énergies, articulations des phrases, étagements des plans sonores, agogiques de la forme… c'est le cas de Mravinski.
On ne retient que le phénoménal…

GBo a écrit:Au fait dans ces premières minutes de la symphonie, je craque pour le passage de 2:15 à 2:40 à peu près: envolée de violons qui s'emballent sans bavure dans un point culminant* (2:32), immédiatement contrebalancé par un sursaut incongru de contrebasses, suivi d'un étrange motif calmé par les cuivres, sereins... je trouve ce passage, riche en contrastes de dynamique, de pitch et de timbre, très moderne sans savoir expliquer pourquoi, en tout cas c'est à partir de là, qu'à ma première écoute, je me suis dis: waaaaouh! :o
Et vous?

(*): question: au fait cette envolée est-elle une difficulté technique particulière pour les instrumentistes ou c'est fastoche?


Oui c'est déjà un travail pour les cordes ces notes détachées répétées en doubles croches, de la contrebasse aux violons I, avec la noire à 116.
Pour les instruments graves c'est difficile… il y a déjà du travail de mise en place pour que ces ostinati détachés rapides soient homogènes rythmiquement et dans leur articulation entre les pupitres du grave aux aigus, avec un son au contours net pour les contrebasses (sans écraser). Il y a du travail pour un bon chef…

Pour un grand orchestre, cela n'est pas exceptionnel non plus. Il y a bien pire…

On continue…

Salut Gil.


Gilles


P.S. Y at-il d'autres écoutes et de nouveaux "essais" d'analyses ?
Gilles R
 
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Message » 24 Nov 2004 12:16

Bonjour,

Vu que c’est moi qui ai prononcé le 1er le nom de cette symphonie, je me dois d’en faire aussi un CR…mais ce n’est pas sans appréhension.

Tout d’abord, le système d’écoute est constitué de 2 oreilles largement dimensionnées et entretenues régulièrement grace à un coton-tige traité anti MIS. Le tout est relié à un cerveau moyen de gamme, largement rodé mais à la dynamique fortement réduite à certaines heures.
La principale caractéristique de cet ensemble est…l’absence totale de musicalité :oops: . Je me caractérise principalement par une oreille complétement fausse, un manque presque complet de pratique et théorie musicale et surtout la particuliarité étonnante d’oublier toute mélodie au fur et à mesure que j’écoute, et cela de manière quasiment pathologique. Donc, c’est pas gagné, gagné…Mais je compense en partie par un profond amour de la musique et une réceptivité artistique, laborieuse mais réelle.
Je précise également que je n’ai volontairement pas ouvert ce thread pour ne pas être influencé et que je n’ai fait que lire en diagonale la notice. Je suis donc seul responsable de ce qui va suivre. Vous voilà prévenus. Allons-y.

1er mouvement :
Dés le début, un motif au basson et aux cordes s’éléve d’une manière suave mais opressante avant de retomber dans…le silence. On est tout de suite dans le pathétique, le climat est posé.
Ce motif se répete pour déboucher sur toute une série de variations de ce motif initial (hautbois, violons…) avant d’arriver sur un épisode plus vifs où les bois retrouvent un nouvel élan, moins oppressant mais avec un sentiment fort d’anxiété. Mais tout cela semble s’effondrer pour retrouver notre théme initial présenté d’une manière moins étouffante. On arrive ainsi à une nouvelle partie où se succéde des phrases courtes et nerveuses.
3 :32 Les cuivres entrent en scéne de façon tonitruante mais bréve. Ce pic passé, on diminue en intensité jusqu’à se retrouver dans le silence.
4 :30 Un nouvel épisode commence. La musique est ici plus romantique. Elle fait clairement penser à ses films en technicolor où le beau héros meurt à la fin dans les bras de sa bien-aimée 8) .
7 :00 L’orchestre continue de plus belle ces envolées lyriques, avant que le hautbois ne les cloturent en douceur, avant un coup de tonnerre orchestral.
9 :10 La sensation d’angoisse est portée à son paroxysme. Cuivres, timbales, tout participe à ce déchainement furieux. A partir de là, plusieurs tempetes vont se déchainer, culminant toujours plus haut. Les cuivres sont omniprésents, mais de manière âpre et rugueuse. Ils ne fanfaronnent pas.
13 :45 Les violons reprennent le théme romantique, mais avec encore plus de force. L’orchestre entier les soutient, un hautbois se détache mais le sourd tonnerre des timbales, au lointain, maintient une tension palpable.
Il me semble percevoir dans ce 1er mouvement une succession d’alternances entre des phases de fatalisme résigné et des épisodes d’angoisse révoltée. Le pathétisme de la situation réside soit dans l’attente d’une fin inéluctable que rien ne viendra troubler, ou dans le caractére vain et inutile d’une tentative de fuite devant cette échéance. Pour moi, ce mouvement est le plus riche de l’œuvre, le plus descriptif et le plus riche en nuances sur une sombre palette.

2nd mouvement : Il s’agit d’une valse (enfin, je le crois). Entrainante et légére, elle garde quand même, par je ne sais quelle alchimie musicale, un caractére angoissant. Elle n’a pas un caractére sordide ou caricaturale comme on peut le rencontrer chez Mahler par exemple, mais elle prend par moments des accents tristes et dérisoires, comme s’il ne s’agissait en fait que d’une mascarade. Peut on y voir la description de la vie, de ses apparences trompeuses et futiles qui ne servent en fait qu’à se masquer la réalité de notre destin ? Je ne sais.
Ce mouvement est moins contrasté que le précédent, il revéle pourtant bien des nuances que je perçois sans arriver à les restituer ici, ainsi que certaines analogies avec le mouvement initial.

3ème mouvement : Il s’agit d’une marche, je dirai même d’un défilé. L’intensité varie en dents de scies, de longs crescendos aménent à des explosions orchestrales plus ou moins retenues. Tout au long de ce mouvement, on a l’impression d’une parade. Ce n’est pas forcément martial, même si le martélement des trompettes et des timbales est particuliérement impressionant.
La notice parle du triomphe de l’auteur ou de la mort. Et si c’était plutôt le triomphe de la vie avec son déroulement avec des hauts et des bas avant d’arriver à la conclusion du 4ème mouvement.

Celui ci commence en effet de manière funèbre. Après le triomphe de la vie, la mise en terre ? Les cordes imposent leurs sanglots longs qui brisent…. Même si les bois leur répondent, c’est avec la même langueur.
2 :25 La couleur change. Un long crescendo instaure une tension qui sera résolue par une pause. La suite est ensuite entrecoupée de silences avant de de retrouver le théme romantique du 1er mouvement.
Le silence deviendra de plus en plus un élément important de cet ultime mouvement. L’œuvre s’enfonce peu à peu dans le néant.

A la fin de la symphonie, je ressens une sensation de plénitude, comme si un cycle complet venait de se dérouler. Cette sensation est très proche de ce que je peux ressentir après la 9ème de Mahler, qui me semble très proche de par sa couleur, même si elle est plus violente et critique.

Voilà, félicitations à ceux qui ont réussi à lire l’intégralité. C’est courageux.
Je me tiens face à vous. Ayez pitié.

Eric

PS: Je viens de parcourir, aprés rédaction du CR, les 4 premières pages de ce post :o . Je renouvelle mes appels à la pitié, m'excuse pour les redites et félicite les intervenants.
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Message » 24 Nov 2004 22:36

EB87 a écrit:PS: Je viens de parcourir, aprés rédaction du CR, les 4 premières pages de ce post :o . Je renouvelle mes appels à la pitié, m'excuse pour les redites et félicite les intervenants.



Bonsoir Eric,


Mais pourquoi s'excuser ?
Tu as fait un relevé de tes impressions d'écoute. C'est un premier pas important. La situation est sûrement nouvelle et elle n'est jamais génératrice de confort.

Tu as probablement écouté cette œuvre dans une écoute différente, en laissant l'oreille moins vagabonder comme dans beaucoup d'écoute domestique. Nous écoutons rarement une œuvre complète avec attention.

Je te félicite de ce double effort à la fois de rédaction et de mise en situation d'écoute nouvelle volontaire.

Il y a dans ton texte des germes d'observation de détails formels, qui montrent que tu es prêt a aller plus loin dans la perception de l'animation de l'écriture.
"Écriture"… là, ne veut pas dire les signes solfégiques de la partition, mais les rapports dynamiques et évolutions des formes et matières des sons. Ce que nous permet justement la musique enregistrée.


L'exercice d'analyse par écoute réduite (voir plus haut) ne peut se faire sur une œuvre complète aussi complexe. Mais cette symphonie a suffisamment de matière pour que l'on y sélectionne un court passage où des "choses" se passent, pour le prendre comme support de l'essai de l'analyse ou comme essai de repérage des oppositions dans les articulations de certains moments.

Un moment de 15 ou 30 secondes suffit.

Si les choses ne sont pas claires… dites le (même par mp) là, je m'adresse à tout le monde.:D

Ces premiers exercices d'écoutes avec ce type d'exigences sont les plus difficiles… je connais ! :wink:

J'ai connu des handicapés de l'écoute… vraiment. Jamais il n'en n'est rien sorti.

Mais dans ce que je lis… rien n'est de ce niveau… loin de là !
Non, c'est très prometteur… surtout que cela se fait que par clavier et écran interposé…

Félicitations Eric…



Si tu peux, passe à une étape suivante… essaie à blanc pour voir :idee:

Tu auras sûrement d'autres avis que les miens.
Je vais écouter les passages que tu as relevés…


À bientôt, Eric.



Cordialement

Gilles
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Message » 26 Nov 2004 12:06

Salut à tous,

Je crois que je vais en faire une, de petite analyse "en écoute réduite" ce week-end…

Vous êtes probablement un peu intimidés de vous y lancer par écrit (?)

Avant que je m'y mette… avez-vous un passage qui vous intéresse précisément de me soumettre à analyse ?
Disons un moment où il y a des modifications progressives ou soudaines. Qu'il se passe quelque chose…

Un passage d'une trentaine de seconde…

Je vous attends :wink:

Cordialement


Gilles
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Message » 26 Nov 2004 14:07

Oui oui attend! j'ai pour ma part en tête un ou deux passages totalement ahurissants dans les tracks #3 et #6 mais je suis au taf, pas de minutage avant ce soir... Des passages avec cuivres risqués :D , je suis sûr qu'il y a des trucs à dire sur la compo, plein!
GBo
 
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Message » 26 Nov 2004 23:15

Voilà j'ai retrouvé mon vrai PC.
En ce qui me concerne, le passage que je préfère de toute la symphonie, c'est beau à pleurer, d'une tension incroyable et musicalement osé me semble-t'il, c'est ce qui se passe sur le morceau #6 entre 6:00 et 7:20, notamment cette miraculeuse "gamme" montée à partir de trombones (je crois?) qui commence en 6:18 pour passer le relai aux trompettes en 6:33 (en tout cas le timbre change à partir de ce sol# qui me plait beaucoup, sans parler des notes qui suivent), tout ça sous reserve, car je n'ai pas lu la partition.

Mais on peut en prendre un autre extrait, tout est bon!

Question: j'ai l'impression qu'il y a des gammes "jazz" un peu partout! :o par ex en #3 12:24 il y a une tonitruante descente de cuivre en "diminué" (1/2T , 1 T , 1/2T , 1 T, 1/2T , 1T, 1/2T , 1 T, 1/2T , T ...) il me semble en tout cas (j'ai vérifié en jouant dessus au mélodica :oops: ). C'est courant à cette époque ou c'est novateur?

cdlt,
GBo
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Message » 27 Nov 2004 2:09

GBo a écrit:Voilà j'ai retrouvé mon vrai PC.
En ce qui me concerne, le passage que je préfère de toute la symphonie, c'est beau à pleurer, d'une tension incroyable et musicalement osé me semble-t'il, c'est ce qui se passe sur le morceau #6 entre 6:00 et 7:20, notamment cette miraculeuse "gamme" montée à partir de trombones (je crois?) qui commence en 6:18 pour passer le relai aux trompettes en 6:33 (en tout cas le timbre change à partir de ce sol# qui me plait beaucoup, sans parler des notes qui suivent), tout ça sous reserve, car je n'ai pas lu la partition.cdlt,
GBo



OK, Gil,

Je m'y mets.

Les conseils, c'est bien, sur le bord de la piscine… mais dans l'eau qu'est ce que ça donne ?

==========================================================

Voilà donc une petite analyse d'écoute sur le passage que tu proposes.

- 6'00" Dans une nuance faible, et une vitesse plutôt modérée débute la répétition d'une figure à profil descendant.
Le profil de la figure est descendant mais le profil du conduit créé par la répétition est ascendant (opposition fréquente) jusquà 6'18". Début du crescendo.

- 6'05" Première transformation, élision d'une partie de la figure et resserrement rythmique avec un effet d'élan.

- 6' 11" Deuxième élision de la figure, effet d'accéléré renforcé.

- 6'18" Appui dynamique du soutient des vents avec ralentissement soudain du rythme pour donner l'illusion de l'effort. Ascension du tutti en homorythmie (illusion de force concentrée) toujours crescendo.
Suit un passage modulant par cycles toujours pour donner l'idée d'effort. À ces modulations se conjugue des inserts de suspensions rythmiques donnant à l'illusion de l'effort une expression supplémentaire, celle de la reprise de souffle.

- 6'"34" Après une amorce de nouvelle ascension, la partie haute de l'énergie (la trompette pour les cuivres ) poursuit seulel'ascension pendant que le reste des cuivres et les cordes suivent un profil lentement descendant.
Là aussi cette opposition de direction (haut/bas) est un "archétype" même de la traduction de la tension avec effort et effet de dramatisation (ou d'une force exprimée à son maximum).

- 6'40" Rupture de la tension. Roulement seul des graves (le grave = le ventre, le haut rompt = lâcher prise).
Reprise en tutti de la courbe en phase rapide et fluide dans sa phase d'ascension et en détaché dans la phase descendante (toujours des oppositions composent un même élément) *.
Après répétitions de la courbe. La détente s'amorce en principe inverse…descente, ralentissement, decrescendo.

C'est vraiment un moment très caractéristique de la création d'une tension, de sa rupture et de la phase de détente.

Le procédé s'entend très bien… (je n'ai pas regardé la partition).

Voilà un relevé d'écoute… on peut faire mieux.

Les termes musicaux ne sont pas très compliqués. J'ai évité de parlé de mon émotion en vous faisant des commentaires supplémentaires (en option gratuite) qui ne sont pas à faire dans ce type d'exercice. Mais ce passage est typique des artifices des grands procédés d'écritures. C'est l'exemple de base, je n'est pas résisté à vous le faire savoir.


* C'est un autre sujet d'analyse.


Alors quelle sont vos réactions ?

Je suis à côté de la plaque ? j'ai bu combien de tasses ?

Bon j'espère que j'aurais quelques avis ou des tentatives de votre part…

Courage…


À bientôt

Gilles
Dernière édition par Gilles R le 27 Nov 2004 22:52, édité 2 fois.
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Message » 27 Nov 2004 8:37

GBo a écrit:Question: j'ai l'impression qu'il y a des gammes "jazz" un peu partout! :o par ex en #3 12:24 il y a une tonitruante descente de cuivre en "diminué" (1/2T , 1 T , 1/2T , 1 T, 1/2T , 1T, 1/2T , 1 T, 1/2T , T ...) il me semble en tout cas (j'ai vérifié en jouant dessus au mélodica :oops: ). C'est courant à cette époque ou c'est novateur?


Suite de la réponse :


En écoutant, j'ai l'impression que ce mode mineur dans ce passage en descente des cuivres est l'occasion de modulations enchainées qui donnent par les cadences de modulations cette échelle "jazz" comme tu dis.
Le mode que tu relèves est un mode à transposition limitée d'Olivier Messiaen, le 1er mode.
Si tu ne connais pas, il faudra faire un tour au thread "Les termes que…" (qui plonge à grande vitesse en ce moment… vu le nombre de topiques créés chaque jours… le forum est animé en ce moment).

Ces modulations enchainées sont fréquentes à cette époque, c'est même ces modulations de plus en plus fréquentes qui améneront des phrases en tournures chromatiques et la naissance de la théorie formelle du dodécaphonisme puis du sérialisme.

On en reparle ?


À bientôt…

Gilles :wink:
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Message » 27 Nov 2004 12:22

Gilles R a écrit:Alors quelle sont vos réactions ?


Pour moi, je comprends mieux ce que vous attendiez par nos écoutes…

Vous avez l'expérience. Je n'aurais pas oser, il me manque les mots et surtout la perception des changements dans la musique.

Je n'avais pas remarqué que les cuivres descendaient pendant que la trompette montait. Maintenant que vous le dites, c'est évident. Comme quoi on entend grossièrement les choses.

Il faut continuer ce type d'écoute. Dès que mon travail me le permettra j'essaierai.

Merci encore à tous pour vos efforts. C'est passionnant à lire, faute d'y participer.

Au revoir.

orpheo
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Message » 27 Nov 2004 19:46

D'accord avec orpheo :D .

A la lecture de ton analyse (Gilles), je me rends compte combien j'ai été à côté de la plaque avec la mienne :-? :mdr: . Mais j'assume pleinement :D .

Malheureusement, je suis incapable d'analyser "techniquement" une oeuvre. Pour moi, ce que tu viens d'écrire, c'est limite science-fiction !!! Ce n'est pas bien grave, je demanderais juste à orpheo qu'il me laisse une petite place dans le canapé des acteurs "passifs" de ce post :mdr: . Parce que ce que j'y lis est vraiment d'un intérêt et d'une qualité sans appel. Je vais faire un Print de ton analyse et étudier cela en "live".

Bravo,

Carbo :wink:
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Message » 27 Nov 2004 22:20

D'accord avec Orpheo et Carbo.
C'est évident quand tu l'écris, Gilles...

Moi non plus je n'ose plus. J'ai l'impression d'être superficiel dans mon audition et de me laisser emporter par l'émotion...

Bien que... : si l'émotion est provoquée par un "truc", (c'est comme ça que je comprends le terme de procédé que tu emploies), ça vaut le coup de s'accrocher.
Carbo a raison : un print et j'essaie de suivre !
Je ne vais pas me laisser emporter par des procédés que je ne distingue pas !

Merci Gilles pour ton travail d'éclaireur.

Hervé
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Message » 28 Nov 2004 9:24

Wevreh a écrit:D'accord avec Orpheo et Carbo.
C'est évident quand tu l'écris, Gilles...

Moi non plus je n'ose plus. J'ai l'impression d'être superficiel dans mon audition et de me laisser emporter par l'émotion...


L'émotion, heureusement que tu l'as. L'exercice d'écoute ne veux pas dire de se l'interdire.
Mais sans pour autant croire comprendre le pourquoi de l'émotion, il s'agit d'affiner son oreille à la perception plus détaillée de l'écriture, des mouvements de la musique. Et parfois voir des principes de compositions et entrevoir comment ça marche.

Wevreh a écrit:Bien que... : si l'émotion est provoquée par un "truc", (c'est comme ça que je comprends le terme de procédé que tu emploies), ça vaut le coup de s'accrocher.
Carbo a raison : un print et j'essaie de suivre !
Je ne vais pas me laisser emporter par des procédés que je ne distingue pas !


Bonne idée, le print du relevé… l'écran d'ordinateur ne permet pas une lecture facile… et il faut zapper ferme pour ce caler sur les instants relevés.

Mais j'espère qu'il restera quelques vaillants mélomanes pour continuer ces écoutes…

Il y a des solutions si les mots vous manquent… mais j'attends les réactions de tous nos complices pour continuer.


Bonnes écoutes

Cordialement

Gilles
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Message » 28 Nov 2004 12:48

Gilles R a écrit:[...]Voilà donc une petite analyse d'écoute sur le passage que tu proposes.

- 6'00" Dans une nuance faible, et une vitesse plutôt modérée débute la répétition d'une figure à profil descendant.
Le profil de la figure est descendant mais le profil du conduit créé par la répétition est ascendant (opposition fréquente) jusquà 6'18". Début du crescendo.
- 6'05" Première transformation, élision d'une partie de la figure et resserrement rythmique avec un effet d'élan.
- 6' 11" Deuxième élision de la figure, effet d'accéléré renforcé.


Ah! le prof au tableau, ça le fait :wink:
C'est super, j'entends bien les élisions (terme que je ne connaissais pas), le resserrement rythmique, l'effet d'accéléré etc... tout ceci se passe sans que l'on s'en rende vraiment compte dans une écoute "normale", et c'est pourtant bien ça qui participe à tendre le ressort de l'émotion.
Je n'ai pas réussi à capter facilement tous ces détails sous forme graphique (sonogramme) mais sur une vue générale de 6:00 à 6:19, on voit bien en tout cas ces motifs descendants dans un conduit montant, et je ne peux pas résister à vous le montrer:
Image
NB1: L'axe des abscisses correspond bien au minutage que vous voyez sur votre lecteur CD, track #6
NB2: attention, ce qu'on voit le mieux ce sont les harmoniques ici
NB3: on remarque bien l'appui dynamique en 6:18 :D


Gilles R a écrit:- 6'18" Appui dynamique du soutient des vents avec ralentissement soudain du rythme pour donner l'illusion de l'effort. Ascension du tutti en homorythmie (illusion de force concentrée) toujours crescendo.
Suit un passage modulant par cycles toujours pour donner l'idée d'effort. À ces modulations se conjugue des inserts de suspensions rythmiques donnant à l'illusion de l'effort une expression supplémentaire, celle de la reprise de souffle.

Extra! j'avais bien perçu cette impression d'effort, mais pas analysé qu'elle était "fabriquée" à l'aide de ce ralentissement!
Question: est-ce demandé dans la partition ou est-ce une initiative du chef?
Gilles R a écrit:- 6'"34" Après une amorce de nouvelle ascension, la partie haute de l'énergie (la trompette pour les cuivres ) poursuit seulel'ascension pendant que le reste des cuivres et les cordes suivent un profil lentement descendant.

C'est un détail: je n'entends pas de cuivres descendre après 6:34, ou alors ils sont couvert par les cordes? j'y retourne.

Gilles R a écrit:Là aussi cette opposition de direction (haut/bas) est un "archétype" même de la traduction de la tension avec effort et effet de dramatisation (ou d'une force exprimée à son maximum).
- 6'40" Rupture de la tension. Roulement seul des graves (le grave = le ventre, le haut rompt = lâcher prise).
Reprise en tutti de la courbe en phase rapide et fluide dans sa phase d'ascension et en détaché dans la phase descendante (toujours des oppositions composent un même élément) *.
Après répétitions de la courbe. La détente s'amorce en principe inverse…descente, ralentissement, decrescendo.

Voici la série des 4 phrases de cordes après la rupture de tension, on les voit parfaitement:
notons les: A1 puis A1 puis A2 puis A2. On remarque que le deuxième A2 est exécuté plus lentement que le premier; observer et écouter également le "bourdon" grave (Fa#2) présent tout du long, digne d'un film à suspense:
Image
NB1: j'ai raccourci l'axe des ordonnées pour mettre en valeur les fondamentales, et forcé le seuil pour que les amplitudes les plus fortes apparaissent en vert
NB2: j'ai noté la note la plus haute de la mélodie pour A1 et A2 au dessus des patés verts correspondants (j'espère que je ne me suis pas gauffré car il y a plusieurs "voix", plus leurs harmoniques...)


Question: peux-tu nous expliquer comment a été construit A2 par rapport à A1 :wink:
Je trouve ce motif A2 fascinant...d'ailleurs les vides du sonogramme en lieu et place de ce qui avait encore en A1 montrent exactement ce que je ressens à ce moment!!! c'est génial...

Je note pour ma part que A1 est pratiquement la même phrase que celle que l'on entend dès 0:09, appelons-là 'a1', elle-même étant une variante* de celle débutant ce track #6, phrase que l'on va appeler 'a0' (en 0:00 donc).

La différence entre A1 et a1, c'est que ce A1 débute par un déroulement préliminaire de gamme mineure mélodique ascendante (du moins c'est ce que j'entends => à vérifier avec la partition!) qui débouche sur la première note de a1 (la quinte), déroulement commençant ici un octave plus bas, sans affecter significativement la "musique" de la mélodie (je parle de la voix principale).
Je comparerais ça à un glissando, mais à valeurs discrètes :D. Ce "gimmick" de montée de gamme (accentuant l'aspect dramatique car démultiplie ce début de mélodie que l'on a déjà en tête) est introduit dans ce Finale presque sous la même forme pour la première fois en 1:06 (mais pour le motif a0, lequel est suivi d'un a1 tout à fait normal), puis souvent ensuite, et à des vitesses variables s'il vous plait!

(*) La différence entre a1 et a0, c'est la fin de la mélodie, vous l'aurez remarqué: si-do# pour a0 et si->->do# pour a1.
a0 donne en effet l'impression d'une question (elle finit d'ailleurs sur le deuxième degré de la gamme), le cor s'en fiche puisqu'il reste sur la quinte, a1 repose la même question en rajoutant encore plus d'inquiétude dans le coté interrogatif, grâce à ce contournement supplémentaire par la tierce mineure. Imaginez (mieux chantonnez) ce que donnerait cette paire de phrase (en si) s'elle finisssant en "si->si" au lieu de si->ré->do#: ça répondrait à la question mais ça serait complètement nul! :lol:

Si vous n'étes pas d'accord ou si j'ai dit des bétises, n'hésitez pas :oops:

Gilles R a écrit:C'est vraiment un moment très caractéristique de la création d'une tension, de sa rupture et de la phase de détente.
Le procédé s'entend très bien… (je n'ai pas regardé la partition). [...]


Ton analyse est très instructive, je crois qu'on est en train d'apprendre pleins de choses par cette méthode accessible à tous (puisque tu as soigneusement évité toute notion de solfège ou d'harmonie :idee: )

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