Reprise des soins pour Vincent L.

[rmsk]

Un article que je trouve utile. Et non manichéen.

https://www.vududroit.com/2019/05/mouri ... e-lambert/

Remy

[Joich]

Au delà du droit, il y a ce me semble dans ces situations quelque-chose d'ubuesque. L'article indique de manière assez intéressante que se défausser sur la loi est peut-être une erreur, il me semble que se défausser sur les médecins en est une aussi. Naturellement, la fin de vie volontaire doit être encadrée. Il n'empêche, demander à un médecin de mettre fin à une vie me semble tout-à-fait déplacé et saugrenu. A quel moment a-t-on pu penser que les gens qui s'engagent pour sauver la vie seraient les mieux placés et les mieux armés pour l'enlever, toute autre considération mise de côté?

En somme, on se défausse sur les deux institutions les moins à même de statuer: la justice et la médecine.

[Le percheron]

Il dit surtout qu'il y a un lobby libéral qui veut tuer les malades qui coûtent cher ! c'est assez délirant.

[Robert64]

Un article que je trouve utile. Et non manichéen.

https://www.vududroit.com/2019/05/mouri ... e-lambert/

Remy

Tout à fait d'accord sur le fond, mais cette affaire Lambert est un cas particulier et n'est pas représentative d'une situation de fin de vie.
Lambert, en coma profond, reste malgré tout en bonne santé de part le fait que ses fonctions biologiques ne semblent pas se dégrader. Stricto sensus, il n'est pas en fin de vie. Il est dans la même situation de d'autres personnes également en coma profond, ou en syndrome d'enfermement. Par contre, son niveau de conscience est minimal. Pour moi, le fait qu'il ait exprimé le désir de pas être "prolongé" à tout prix ne change rien au problème.

On est en général plus dans le cas de la personne atteinte d'une maladie évolutive pour laquelle on a épuisé toutes les possibilités thérapeutiques et qui souffre. J'ai eu le cas pour ma mère et une de mes soeurs. (cancers)

La discussion avec l'équipe médicale se résume par:
"Et maintenant ?
- Notre rôle est de préserver sa vie et son confort. Donc on lui fait de la morphine et on ajuste la dose pour qu'elle ne souffre plus"
Et tout le monde sait parfaitement que la maladie évoluant, le moment viendra où la dose nécessaire sera létale.
Mais ce n'est jamais dit.
Pour moi, le cas Lambert est insoluble.
A+

[Robert64]

...
En somme, on se défausse sur les deux institutions les moins à même de statuer: la justice et la médecine.

Oui, mais alors, qui devrait statuer ?
Le comité consultatif d'éthique ?
Un RIC ?
A+

[poilau]

Il dit surtout qu'il y a un lobby libéral qui veut tuer les malades qui coûtent cher ! c'est assez délirant.

C'est en bonne partie vraie. Les enjeux financiers sont considérables.

Il est dommage surtout qu'il dénigre à chaque fois ceux qui ne pensent pas de cette manière en les traitant d'extrémistes religieux.

[Joich]

...
En somme, on se défausse sur les deux institutions les moins à même de statuer: la justice et la médecine.

Oui, mais alors, qui devrait statuer ?
Le comité consultatif d'éthique ?
Un RIC ?
A+

Disons qu'on veut que des institutions décident et mettent en application la décision.

Le médecin n'est pas là pour dire qui doit vivre ou mourir, il est là pour dire ce que peut la médecine et ce qu'elle ne peut pas. Et lui demander de donner la mort est en contradiction totale avec ce qui peut éventuellement pousser un individu à devenir médecin. La loi ne devrait pas imposer au médecin les actes qui donnent la mort. Un médecin peut avoir envie de le faire, parce qu'il considère qu'il est aussi de son devoir de luter contre la souffrance ou pour la dignité ou tout ce qu'on veut, mais je ne suis pas certain que la solution soit d'imposer au corps médical ce type d'actes.

Quant à la justice, elle ne peut dire que le droit. Ce qu'on a le droit de faire et ce qu'on n'a pas le droit de faire. Ni plus ni moins.

Ce que la justice devrait peut-être dire de manière plus claire, c'est l'ordre de préséance des avis L'intéressé a donné son avis de son vivant: pas de sujet. S'il ne l'a pas fait, qui décide? Parents ou enfants? Parents ou conjoint? Enfants ou conjoint?

Après, le cas de Vincent Lambert est vraiment un cas très très particulier. Et puis, même si l'intéressé a donné son avis, c'est quand la "fin de vie"? C'est quoi "l'acharnement thérapeutique"? A partir de quel point on peut réellement dire "OK, là, de toute manière, c'est fini"?

[Robert64]

...
Ce que la justice devrait peut-être dire de manière plus claire, c'est l'ordre de préséance des avis L'intéressé a donné son avis de son vivant: pas de sujet. S'il ne l'a pas fait, qui décide? Parents ou enfants? Parents ou conjoint? Enfants ou conjoint?
...

J'aurais tendance à penser que seul l'avis de l'intéressé est à prendre en compte.
La fin de vie, c'est une affaire strictement privée entre l'intéressé et son médecin.
Au législateur d'encadrer ça pour éviter les dérives et abus.
D'ailleurs, sur un sujet voisin, j'ai été ébahi par la facilité avec laquelle on peut mettre sous tutelle ou faire interner un parent encombrant et du peu de recours dont l'intéressé dispose. Autre sujet...
A+

[Joich]

Je suis d'accord avec toi, mais quand l'intéressé n'a rien dit, on fait quoi?

[Joich]

Et quand les définitions ne sont pas claires ou qu'elles ne correspondent pas au cas (ce qui est le cas ici), même chose. Le cas de Vincent Lambert est réellement atypique.

[poilau]

...
Ce que la justice devrait peut-être dire de manière plus claire, c'est l'ordre de préséance des avis L'intéressé a donné son avis de son vivant: pas de sujet. S'il ne l'a pas fait, qui décide? Parents ou enfants? Parents ou conjoint? Enfants ou conjoint?
...

J'aurais tendance à penser que seul l'avis de l'intéressé est à prendre en compte.
La fin de vie, c'est une affaire strictement privée entre l'intéressé et son médecin.
Au législateur d'encadrer ça pour éviter les dérives et abus.
D'ailleurs, sur un sujet voisin, j'ai été ébahi par la facilité avec laquelle on peut mettre sous tutelle ou faire interner un parent encombrant et du peu de recours dont l'intéressé dispose. Autre sujet...
A+

Et l'avis de l'intéressé ne peut être pris en compte que lorsqu'il est réellement confronté à cette situation.

Dire qu'on préfère une balle dans la tête quand si on est un jour cloué dans un fauteuil, c'est un discours toujours plus simple à tenir quand ce n'est qu'hypothétique.

[Robert64]

J'aurais tendance à penser que seul l'avis de l'intéressé est à prendre en compte.
La fin de vie, c'est une affaire strictement privée entre l'intéressé et son médecin.
Au législateur d'encadrer ça pour éviter les dérives et abus.
D'ailleurs, sur un sujet voisin, j'ai été ébahi par la facilité avec laquelle on peut mettre sous tutelle ou faire interner un parent encombrant et du peu de recours dont l'intéressé dispose. Autre sujet...
A+

Et l'avis de l'intéressé ne peut être pris en compte que lorsqu'il est réellement confronté à cette situation.

Dire qu'on préfère une balle dans la tête quand si on est un jour cloué dans un fauteuil, c'est un discours toujours plus simple à tenir quand ce n'est qu'hypothétique.

Certes, mais quand tu arrives à un âge où tu dépasses l'espérance de vie de ta tranche, ça de paraît de moins en moins hypothétique.
A+

[rmsk]

C'est un sujet que je connais malheureusement très bien par mes deux casquettes. Médecine et droit.

J'ai également été responsable de la déontologie (le rôle tenu par l'ordre des médecins pour mes confrères civils) pour le service de santé des armées et plus que participé à la rédaction du décret portant sur ce sujet : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTe ... ieLien=cid

Mais sur le fond, pour ce que je connais du dossier (c'est à dire à peu près rien) je partage pleinement les opinions de joich et Robert64.
C'est un cas très particulier. Qui ne devrait se résoudre que par l'échange entre l'équipe soignante et les proches, dans l'intimité de chacune des consciences et l'aboutissement d'un consensus sur la moins pire des issues possibles.

Légiférer à nouveau ne sert à rien, sinon à satisfaire certaines associations que, pour ma part, je trouve douteuses.
Personne n'obligera un médecin à pratiquer une euthanasie active (au sens du suicide assisté, notamment). Personne.
Et les médecins qui s'y prêteront seront, toujours à mon sens, mus par des intérêts militants ou lucratifs aussi douteux que les associations en question.

Remy

[Robert64]

Dignité de l'être humain: un concept bien confus

(par Jean-Gabriel Ganascia, professeur d'informatique à Sorbonne Université. Il préside le comité d'éthique du CNRS ((omets). )

Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, charte des Nations unies, convention d'Oviedo, rapport du groupe d'experts sur l'intelligence artificielle de la Commission européenne:
de nombreux textes officiels proclament l'égale dignité de toutes les personnes. Sans doute ne viendrait-il à quiconque l'idée de blâmer des publications aussi louables qui, toutes, combattent le racisme et la ségrégation. Mais, à la réflexion, une gêne apparaît: l'égale dignité de tous les êtres humains se proclame-t-elle? On conçoit qu'il faille donner à tous les moyens de mener une existence digne. Pour autant, la dignité n'est jamais donnée; elle se conquiert et peut, éventuellement, se perdre. En atteste la qualification de crime d'indignité nationale, instituée à la fin de la Seconde Guerre mondiale pour punir d'une peine infamante les vichystes qui avaient, par leurs actions, porté atteinte aux principes républicains (qualification également évoquée, en 2016, comme alternative à la déchéance de nationalité pour les coupables de crimes terroristes).

POUR AJOUTER à la confusion, certains légitiment l'euthanasie au nom du « droit de mourir dans la dignité », sans que l'on sache toujours qui apprécie la dignité du mourant: est-ce celui qui est concerné, au moment de passer outre-tombe? Ou le même, auparavant, par des directives anticipées? Ou encore sa famille? À moins qu'il ne s'agisse de médecins censés déclarer qu'il n'est plus digne de vivre? Comme le laisse transparaître le mot « dignitaire », l'étymologie renvoie à une charge éminente et au mérite qui s'y attache. Il s'ensuit que la dignité des soldats, qui est d'affronter la mort sans ciller et de combattre avec vaillance, tend à diminuer avec les nouveaux systèmes d'armes comme les drones ; de même, la dignité de l'athlète décroît lorsqu'il décuple ses possibilités grâce au dopage.

Comment, dès lors, parler d'égale dignité des individus puisqu'elle dépend de leur fonction et de la façon dont ils l'assument? On rétorquera que l'on ne s'attache ici qu'à la dignité de l'humain en tant que tel, à savoir à celle d'un être de raison, fait à l'image de Dieu, doué d'autonomie et membre de la « famille humaine ». Affirmer l'égale dignité de tous peut ainsi s'entendre d'au moins quatre façons différentes.

Dans la première, la dignité tient aux capacités cognitives. Cela conduit les « anti-spécistes », comme le philosophe Peter Singer, à vouloir étendre les droits humains aux grands singes — en raison de leurs facultés intellectuelles supérieures à celles de certains humains (vieillards, handicapés mentaux, nouveau-nés...) — et, de ce fait, à se prononcer pour l'avortement et pour l'euthanasie lorsque des directives anticipées ont été formulées.

Dans la deuxième, l'être humain étant fait à l'image de Dieu, les recommandations en matière de bioéthique n'apparaissent ni claires, ni universelles; souvent, toute atteinte au processus vital naturel est condamnée, par exemple l'avortement ou les manipulations génétiques, mais pas toujours.

DANS LA TROISIÈME, la dignité est rapportée à l'autonomie des êtres humains, qui doivent être traités comme des fins et non comme des moyens. Cela signifie que la gestation pour autrui constitue une atteinte à la dignité de la mère porteuse. Mais qu'en va-t-il avec les enfants en bas âge ou les déments? Doit-on leur conférer une pleine liberté d'action au nom de ce principe? Les techniques d'intelligence artificielle ne risqueront-elles pas de porter atteinte à notre dignité lorsque, devenues statistiquement plus fiables que nous, nous leur confierons des décisions nous concernant, afin de nous dégager de responsabilités trop lourdes à assumer?

Quant à réduire la dignité à l'appartenance à la famille humaine, on ne voit pas bien en quoi la portée opératoire de cette notion serait supérieure à celle de la liberté et de l'égalité des droits telles qu'elles ont été énoncées dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Bien qu'au fondement de la plupart des chartes contemporaines d'éthique, le concept de dignité apparaît bien confus. Pour reprendre des termes du philosophe Hans Jonas dans sa préface du Principe responsabilité, on dirait de la ouate. Alors qu'en matière d'éthique, on aurait davantage besoin d'acier, pour trancher...
A+

[beb]

En attendant, le feuilleton judiciaire repart de plus belle...
https://www.lest-eclair.fr/id68128/article/2019-05-28/affaire-lambert-les-parents-assignent-le-dr-sanchez-et-le-chu-de-reims

Il y a un truc que je ne comprends pas.
La justice a statué plusieurs fois pour l'arrêt des soins.
Comment peuvent-ils porter plainte ainsi ?