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Tout sur les appareils Pré-amplificateur

Cabasse Grand Large PST 16 : 1/2 siècle et toutes ses dents

Message » 06 Déc 2015 15:09

Bonjour.

Je vous présente un appareil rare, en hommage à une grande marque de la hifi et de l'électronique française, j'ai nommé le préamplificateur Cabasse "Grand Large" PST 16.

Je cherchais un exemplaire depuis des années et des années et j'ai finalement réussi à en trouver un.

Confié pour vérification à un dépanneur électronique, ce dernier s'est contenté de nettoyer quelques contacts et de resserrer un peu le réglage de volume, qui avait du jeu (plus à ce sujet plus bas). Pour le reste, il est dans son état d'origine. D'après mes recherches, cet appareil a figuré au catalogue Cabasse au moins depuis 1973, et peut-être 1970, jusqu'en 1976. On peut donc dire que cet appareil a quasiment un demi-siècle. Et pourtant, il marche ! La preuve en image :

PST16enmarche.JPG


Malgré son âge, ce PST 16 a des caractéristiques tout à fait remarquables, mêmes pour nos temps contemporains.

Il dispose de six entrées sur prises DIN et RCA, plus une boucle d'enregistrement avec fonction monitoring sur prises DIN et RCA et deux sorties commutables sur prises RCA uniquement. Toutes les entrées ont leurs circuits électroniques montés sur cartes enfichables sur une carte mère, ce qui signifie qu'on peut choisir la configuration que l'on veut simplement en enfichant les cartes désirées. Sur mon appareil, la configuration est celle qui était livrée en standard : deux entrées phonos, une entrée microphone et trois entrées lignes. Non seulement la configuration des entrées est entièrement modulable, mais en plus, les niveaux de toutes les entrées sont réglables un à un grâce à des potentiomètres séparés pour les canaux de gauche et ceux de droite. Cette fonctionnalité très rare sur un préamplificateur permet d'ajuster très finement le gain de toutes les entrées pour obtenir une balance parfaite entre les deux canaux et aussi d'aligner le niveau de toute les entrées pour éviter d'avoir à ajuster le volume principal lorsqu'on passe d'une source à une autre qui a un niveau de sortie très différent.

La balance reste parfaite quelque soit le volume, car le réglage de niveau n'est pas réalisé grâce à un potentiomètre. En effet, les deux voies, gauche et droite, d'un potentiomètre ne sont pas forcément bien appairées, surtout à bas niveau, même sur des composants de très haute qualité et très coûteux. Sur le PST 16, le réglage de niveau est implanté grâce à un commutateur rotatif à plots à 19 positions qui commute des échelles de résistances. Ces résistances sont apparemment de haute qualité : je ne vois, soudées sur le commutateur, que des résistances de précision à 5 anneaux à tolérance 1 %.

Le PST 16 dispose de toute une flopée de fonctions, typiques de son époque de conception, accessibles grâce à un clavier à touches en façade : sélection des entrées, y compris la possibilité de mixer les entrées entre elles (!), monitoring d'un enregistrement en cours, inverseur de phase, inverseur de canaux, touche mono pour répartir sur les deux canaux une source monophonique vraie, filtre passe-haut anti-rumble (coupure à 30 Hz), deux filtres passe-bas (coupure à 6 ou 10 kHz), loudness, touche "linéaire" supprimant l'action des correcteurs de grave et d'aigu. A ce sujet, les correcteurs de grave et d'aigu sont séparés pour les canaux de gauche et de droite, ce qui permet d'ajuster finement la réponse en fréquences lorsqu'un canal ne demande pas la même correction que l'autre.

Il y a aussi une prise casque. Une touche "sortie casque" permet de couper les sorties vers les amplificateurs.

Il y avait même une télécommande filaire qui permettait de commander à distance la fonction marche/arrêt mais aussi de rajouter un contrôle de volume et un réglage de balance déportés ! L'interrupteur marche/arrêt du préamplificateur commande aussi une rampe de trois prises secteurs auxiliaires en face arrière, ce qui permet de mettre sous tension tous les appareils de sa chaîne en allumant le préamplificateur.

L'alimentation secteur supporte des tensions de 120, 127, 220 ou 240 V que l'on sélectionne en face arrière grâce à un bouchon contenant également les fusibles adaptés à chaque tension secteur.

A l'intérieur, c'est vieux et ça en a l'air :lol: , mais c'était quant même vachement bien foutu !
Scytales
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Message » 11 Déc 2015 21:10

Cela fait maintenant une petite semaine que le préamplificateur est branché dans ma chaîne.

Je suis surpris qu'un vieux clou comme celui-là puisse produire un son d'aussi bonne qualité. A vrai dire, il est impossible de dire que cet appareil a plus de 40 ans passé, à moins de s'approcher des haut-parleurs de grave, où l'on peut entendre un léger buzz. C'est peut-être la limite du bruit de fond naturel de l'appareil, mais peut-être aussi les condensateurs chimiques de filtrage un peu fatigués par plus de 40 ans de service et de stockage ou une soudure à refaire quelque part.

Pour le reste, ce qui surprend, c'est sa transparence : ça file haut, ça descend bas (très bas même) et je perçois une foule de détails d'arrière-plan. Même sur les retransmissions d'émission de radio que j’ai l'habitude d'écouter, j'entends très bien les bruits en studio (les pages de feuilles qui sont tournées, ce genre de choses). Serait-ce parce que cet appareil me permet d'écouter à un niveau plus élevé avec moins de distorsion qui pourrait fatiguer l'oreille ? En tout cas, avec des sources numériques de qualité (SA-CD, CD, DVD, TNT), la modernité du son n'est masquée par aucun voile. C'est tout de même stupéfiant pour un appareil aussi âgé dont toute l'électronique est dans son état d'origine !

Ce qui est aussi très impressionnant, c'est l'effet stéréophonique et la stabilité sans faille de la scène sonore quelque soit le niveau. Je ne devrais pas être surpris, car le réglage de volume par commutateur à plots est un procédé technique qui permet de conserver une excellente balance quelque soit le niveau et les potentiomètres de réglage de gain en façade ont une action si fine qu'il m'a été possible d'égaliser précisément les niveaux des deux canaux de chaque source au millivolt près (!) sans difficultés, mais tout de même !

Rien que pour ces deux raisons, cet appareil mérite bien sa référence de "Grand Large" !

Les filtres et les correcteurs de grave et d'aigu agissent très bien et en silence.

A l'écoute de cet appareil, je me demande ce que l'électronique a gagné en 40 ans. L'électronique serait-elle un problème réglé ou en tout cas réglable depuis longtemps pour avoir de la haute fidélité ? :lol:

Quelques photographies supplémentaires de l'appareil (mal éclairé, désolé) pour voir ce qu'il a dans le ventre.

PST16a.jpg
Façade.
En haut de gauche à droite : rangée de potentiomètres de réglage de gain (x12) et correcteurs de grave et d'aigu séparé pour les canaux de gauche et de droite (x4).
En bas de gauche à droite : clavier de sélection des 3 sorties (2 lignes, 1 casque), bouton marche/arrêt rétroéclairé, clavier de sélection des entrées (6 touches verrouillables), clavier de sélection des fonctions.
Tout à droite : bouton de réglage de volume et sortie casque.

PST16b.jpg
Façade arrière.
Dans la découpe de gauche (de gauche à droite et de haut en bas) : 3 prises secteurs auxiliaires commandées par l'interrupteur marche arrêt, embase secteur, bouchon de sélection de la tension secteur. Dans la découpe de droite (de gauche à droite et de haut en bas) : clef sur la prise télécommande, entrée/sortie d'enregistrement et entrées sur prises DIN, sorties préampli (x2), entrée/sortie d'enregistrement et entrées sur prises RCA, borne de mise à la masse pour platine TD.

PST16c.jpg
Intérieur vu de dessus.
En haut à gauche : compartiment blindé contenant le câblage des entrées/sorties et de la télécommande.
En haut à droite : compartiment contenant le transformateur d'alimentation à enroulements primaires multiples enfermé dans une cuve en métal et alimentation régulée.
En bas : compartiment de l'électronique.

PST16d.jpg
Autre vue de dessus permettant de bien distinguer les différentes cartes électroniques.

PST16e.jpg
Vue de dessous permettant d'admirer le montage du châssis, notamment de toutes les parties qui subissent des contraintes mécaniques (supports des cartes enfichables, claviers) et le montage de l'interrupteur et du câblage secteur, placés dans un longeron métallique de section en forme de "U" pour assurer leur blindage.
On constate aussi que la carte mère est gravée en double face.

PST16f.jpg
Autre vue de dessous qui permet de mieux apprécier le routage du câblage en l'air.
Scytales
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Message » 14 Déc 2015 17:11

Salut,

Merci pour ce témoignage sur ce préampli, version transistor du grand large originel.
Les réalisations cabasse, en dehors des enceintes acoustiques, sont beaucoup plus confidentielles et souvent exceptionnelles dans leur réalisation.
Philippe Muller pourrait sans doute nous en dire beaucoup sur ces appareils.
alpacou
 
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Message » 05 Jan 2020 21:46

En novembre 2016, je me suis décidé à restaurer ce vieux préamplificateur.

En effet, le réparateur à qui je l'avais confié est passé à côté de certains défauts.

En définitive, je n'ai pas fait grand chose* et tous les travaux sont achevés depuis plusieurs mois. J'ai aussi eu l'opportunité de mettre la main sur d'autres exemplaires de PST16, ce qui m'a permis de me constituer un stock de modules supplémentaires, notamment des cartes d'entrée lignes. J'ai donc pu mettre en œuvre une des caractéristiques intéressantes de cet appareil : j'ai substitué aux entrées phonos et microphones, dont je ne me sers pas, des entrées lignes afin de pouvoir brancher les sorties analogiques de mes 4 à 5 sources disponibles sur le PST16.

Depuis que j'ai branché le PST16 dans la chaîne, en novembre 2016, je n'ai plus rebranché le Yamaha C-2x, le préamplificateur que j'utilisais auparavant. Et je vous prie de croire que c'est dire quelque chose.

Cela fait donc maintenant trois années ininterrompues que j'utilise ce vieux clou antique en tant que préamplificateur et, en ce début d'année 2020, j'ai été pris de l'envie d'en parler pour faire un compte-rendu.

Il sera bref : correctement réglé, ce préamplificateur ne produit pas un pet de bruit. Sans signal à l'entrée du préampli, le seul bruit audible dans les haut-parleurs des enceintes (92 dB/1W/1m de sensibilité sur bruit rose) lorsque j'y colle l'oreille, c'est le bruit de fond (souffle) des amplificateurs. Même en poussant le gain des entrées, le volume et le correcteur de grave (+ 16 dB à 20 Hz) du préampli à fond, il n'y a aucune ronflette audible dans les haut-parleurs de grave. La sortie casque est branchée sur le même étage de sortie que les sorties lignes. Elle n'est faite pour piloter que des casques de 200 ohms ou plus. Si j'y branche un AKG K141 de 600 ohms, le préamplificateur ne produit pas une once de souffle, même en poussant le gain des entrées au maximum, sauf en réglant le réglage de volume du préampli sur les positions 0 dB, -3 dB, -6 dB et -9 dB (c'est-à-dire volume à fond ou quasiment à fond), sur lesquelles j'entends un faible souffle, doux comme de la soie. Il n'y a aucune trace de ronflette au casque, quelles que soient les positions des différents réglages du préampli. Actionner n'importe quel potentiomètre ou bouton de sélection de source du préampli ne produit strictement aucun bruit. Occasionnellement, seuls quelques touches de fonction ou de commutation produisent un très très léger bruit de commutation audible dans les haut-parleurs.

En aparté, les étages de sortie du préampli sont donc conçus pour piloter des lignes allant jusqu'à 200 ohms. Autant dire qu'on peut en principe y brancher des dizaines de mètres de câbles de modulation jusqu'aux amplis de puissance sans trop de crainte. Ce n'est pas mon cas, mais j'ai quand même plusieurs mètres de câble de modulation entre préampli et amplis, lesquels sont placés tout à côté des enceintes pour limiter au minimum la longueur des câbles haut-parleurs.

Enfin, et c'est là où je voulais plus particulièrement en venir, car se développe beaucoup sur HC-FR des discussions multiples sur l'audibilité des différentes formes de distorsions ou de bruits mesurables depuis que l'excellentissime site Audio Science Review a popularisé les nombreuses mesures que l'on peut très facilement réaliser de nos jours sur les électroniques : ce vieux préampli Cabasse du début des années 70 (mise sur le marché : 1971/72), dont les circuits électroniques évoquent plutôt la fin des années 60, n'a strictement aucun défaut sonore audible. Croyez bien pourtant que depuis trois ans, j'ai essayé de le prendre en défaut. Des vieux enregistrements de musique en mono ou des bandes-sons des premiers film parlants jusqu'aux meilleures prises de son ou bandes-sons récentes, même en haute définition sur DVD, SA-CD ou diffusées sur la TNT, en passant bien sûr par les CD ou la radiodiffusion en FM : les différences entre toutes les caractéristiques de ces sources et les caractéristiques des prises de son s'entendent clairement de manière transparente. Il n'y a pas le moindre voile sonore et quand une prise de son présente les caractères de la meilleure modernité en haute fidélité, j'en profite pleinement. Pourtant, il n'y a aucun doute sur le fait que les performances en terme de distorsion ou de bruit de ce vieil appareil sont à des années-lumières de ce que l'on peut réaliser de nos jours avec des circuits et des concepts modernes.

Vouloir utiliser cet appareil a été une espèce de frivolité, voire un caprice de ma part. Mais cela m'a apporté une bonne leçon : l'électronique, en tout cas l'électronique bas niveau et les sources, n'est pas un problème pour obtenir une haute fidélité ou, selon l'humeur, un son plaisant. Et ce n'est manifestement plus un problème depuis longtemps, voire très longtemps.

Ce qui peut être problématique, en revanche, c'est la façon d'employer le matériel. Et là, il y a beaucoup plus de pistes de réflexion utiles et fructueuses à mener.

Bonne année 2020 à tous.

* Pour ceux que cela intéresserait, les quelques menus travaux effectués :

J'ai changé tous les condensateurs électrochimiques par des neufs et j'ai soigneusement nettoyé tous les contacts et tous les potentiomètres en façade. Comme le réglage de volume était partiellement endommagé, j'en ai monté un nouveau sur un commutateur neuf. Le nouveau composant ayant plus de positions que l'ancien (23 au lieu de 19), j'ai recalculé une nouvelle échelle de résistances en m'inspirant de l'échelle d'origine (dont les pas de réglage sont plus larges en début et en fin de course et plus fins à mi-course, là où le réglage de volume est le plus souvent employé si les sources ont une grande plage de dynamique). J'ai également consolidé le montage du circuit imprimé qui supporte les connecteurs d'entrée/sortie au châssis, car cette pièce avait été démontée par quelqu'un (le réparateur à qui j'avais confié l'appareil ?) et la liaison à la masse châssis de la masse du circuit imprimé s'en était trouvée suffisamment affectée pour produire des effets (une certaine sensibilité au parasites de commutation en tout genre lorsque des interrupteurs ou commutateurs étaient actionnés dans mon logement, ce qui produisait des "Clac" ! audibles dans la modulation). Ces effets ont disparu avec une meilleure liaison de la masse du circuit imprimé à la masse châssis.
Scytales
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Message » 05 Jan 2020 22:33

Scytales a écrit:Enfin, et c'est là où je voulais plus particulièrement en venir, car se développe beaucoup sur HC-FR des discussions multiples sur l'audibilité des différentes formes de distorsions ou de bruits mesurables depuis que l'excellentissime site Audio Science Review a popularisé les nombreuses mesures que l'on peut très facilement réaliser de nos jours sur les électroniques : ce vieux préampli Cabasse du début des années 70 (mise sur le marché : 1971/72), dont les circuits électroniques évoquent plutôt la fin des années 60, n'a strictement aucun défaut sonore audible


:thks:

Bravo Scytales pour cette brillante restauration :bravo:

Ma conviction, c'est que la qualité d'une électronique se définit par l'absence de défauts.

Des mesures encore meilleures pourquoi pas ? :-?
Igor Kirkwood
 
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Message » 05 Jan 2020 22:54

Merci Igor.

Tu prêches à un convaincu et l'article que tu avais commis à ce sujet dans Diapason et que tu as republié sur HC-FR n'a pas été étranger à forger cette conviction que la qualité d'une électronique se juge à l'absence de défaut audible, d'autant que tu n'es pas la seule personne d'expérience à avoir exprimé ce point de vue.

Améliorer encore et encore les performances mesurables est une démarche saine : cette amélioration n'est que la conséquence d'une maîtrise toujours meilleure des phénomènes physiques fondamentaux qui sont à la base de l'électronique et, corrélativement, de l'amélioration de la qualité de fabrication. C'est sain, dès lors que la recherche de performance n'impacte pas inutilement le prix de vente et ne soit pas un but en soi dès lors qu'on a déjà dépassé le point où les distorsions ou les bruits sont inaudibles quelles que soient les conditions d'emploi.
Scytales
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Message » 05 Jan 2020 22:55

du très haut de gamme et d'un design très agréable (au moins pour l'époque), je n'ose imaginer combien serait vendu aujourd'hui une machine de ce calibre badgé Mc Intosh, Accuphase ou autre fabriquant HDG :zen:
guyniol
 
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