ganymede44 a écrit:- Ah ! ce hautbois... qui arrive trois quatre fois au milieu de cette musique, comme déchirant l'atmosphère... j'en ai des frissons à chaque fois qu'il se "réveille"

- Je n'avais jamais remarqué à quel point cette oeuvre est tiraillée entre les aigus et les graves. On dirait que les violons se battent avec les violoncelles, que chacun essaye de tirer la couverture à lui, c'est impressionnant.
- Dans les modulations (est-ce le bon mot ?

quand ça part de très haut pour descendre en saccades) des violons, j'ai comme une sensation de pulsation électrique dans mes oreilles... étonnant...
- En fait, pendant que je l'écoutais, je me disais "mais que ces
phrases musicales sont simples !" et pourtant, une fois toutes mises les unes sur les autres (avec les autres ? ) ça semble si complexe...
- Le rythme des moments rapides est étrangement fait, on dirait que ça va aller en s'accélérant, alors que non... ça se ralentit soudainement...
- Et quand, après l'avant dernier interlude de hautbois, les cuivres introduisent le tutti de l'orchestre c'est grisant...
- En fait, on voudrait que ce morceau ne s'arrête jamais !!!

Bon ben voila

ça vous fait ça à vous aussi ?
- Ah oui, j'édite car j'ai oublié un détail : je n'aime pas trop les dernières mesures finales... j'ai une impression de "baclé'.

Cher ganymède,
Ce soir je n'ai pas eu accès à la hi-fi, du moins celle avec la platine tourne-disque, donc ce que je peux répondre sur cette 25éme de Mozart est de mémoire (je croyais avoir la partition… mais je ne la trouve plus).
Moi ce qui m'a frappé d'emblée, c'est l'attaque directe des cordes ff dans cette phrase rythmique, moment important qui apparait à plusieurs reprises dans le mouvement.
Cette phrase a un peu une tournure d'appel qui insiste, obsédé. Il y a immédiatement une tension qui est installée. Elle est immédiatement répétée avec cette fois le soutien des contrebasses, qui lui donne un caractère plus décidé.
Tu as raison, arrive subitement le chant du hautbois à découvert sur un rythme de balancement léger des cordes. Ce chant du hautbois est vraiment contradictoire à la nervosité précédente.
Posé et aérien d'abord sur des intervalles descendant, puis pris d'une grâce en son milieu, il remonte pour une cadence de préparation pour l'entrée d'une nouvelle variation d'un tutti des cordes.
Il y a comme cela plusieurs séquences de variations que je ne cherche pas à décrire. Sauf peut-être celle dont tu parles : la descente des cordes hautes perchées. Ce passage est effectivement très saillant, intense il me fait penser à l'air de "La Reine de la Nuit" dans la "Flûte enchantée" d'abord par sa tessiture et ensuite par quelques ressemblance de rythme justement comme tu dis : en cascade.
Suivent encore une ou deux dernières variations avant un conduit tortueux pour faire un "da capo" (retour au début).
Reprise du premier thème obsédant des cordes… tout est redit intégralement jusqu'au conduit tortueux.
Et c'est là que je prends un coup sur la tête ! … que je ressens une émotion intense !
Mozart fait le même conduit.… On s'attend naturellement à une nouvelle reprise et voilà que le conduit continue et prend un autre chemin ! Une première modulation il nous améne sur une musique très allante et chantante, comme dégagé de toute pesanteur, une allégresse un peu candide, prsqu'une marche ou alors un galot plein de sérénité.
L'effet est du pur Mozart ! Ces passages là… ses contemporains en tombaient baba ! Quelle heureux effet ! Ce passage est à peu près au milieu du mouvement et Mozart semble avoir écrit tout son mouvement juste pour cette lumière là.
Après ce passage il retourne aux variations précédentes… et ce passage ne sera pas repris.
Il y a en plus, la statégie du grand compositeur qui fait la variation du climax de l'œuvre sur l'attente de la séquence la plus saillante, celui qui est à coup sûr mémorisé par tous les auditeurs, c'est à dire le passage obsédant des cordes du début, pour que l'auditeur assuré du prévisible subisse au plus fort la dérive du discours.
Rhétorique musicale… c'est cela l'art de composer.
Dès la première écoute de ce mouvement de cette 25éme j'ai été surpris et fasciné par ce passage. Depuis j'en ai entendu bien d'autres chez lui. Mais ce mouvemet de symphonie est l'un de ces plus beaux. C'est une des formes du génie de Mozart, il semblait pouvoir tout ce permettre avec un air de rien…
Böhm l'exprime très bien ce mouvement.
Celui qui s'en rapproche le plus est Leonard Bernstein. L'interprétation de Walter est un peu plus rapide, mais très expressive… je n'est pas écouté celle de Krips… Mais je ne connais pas des versions plus récentes… Par contre celle de Klempere est ratée ! jouée "vivace"… absolument pas l'esprit du "con brio" ! une cavalcade insensée…
En regardant sur amazon, j'ai vu que DGG avait réédité en séparées certaines symphonies de cette intégrale et j'ai eu le plaisir de voir que la 25éme en fait partie (preuve que la version de Böhm était à retenir).
Je montre le CD plus bas.
Voilà mon cher ganymède, ce qui me plait dans ce mouvement…
Si tu peux repère ce fameux passage… nous pourrions en rediscuter…
Si nous nous mettons à parler de la musique de Mozart… les soirées vont être chargées.
Juste un peu de temps en temps sur ces moments de magies mozartiennes.
Bonne nuit.
Bien cordialement
Gilles
PS : Ah ! J'oubliais aussi… les dernières mesures de la fin !
Ce n'est pas que cela soit baclé, mais il dit par cette cadence un peu martial et en fanfare avec un petit peu d'humour, que cela pourrait encore durer… alors il dit par cette manière : « bon, j'arrête… il le faut… nous pourrions continuer, mais c'est un mouvement… il y a en a trois autres derrière !»
Mais il est vrai que cela peut paraitre une fin en queue de poisson. Il avait l'Art de l'impolitesse, Mozart comme tous les grands artistes… Il n'avait pas au moment de composer cette fin, envie d'écrire : « je vous prie d'agréer chers auditeurs… ». Non, il dit : «Aller, salut les gars… c'est fini ! voilà !» avec un air complice.
Moi je ressens cela de cette façon… Si tu ré-écoutes, dis moi si j'ai tort…