Bonjour Blue Dream, merci pour ce fantastique retour !
Concernant ton 1er post,
"voilà deux domaines bien différents, et que des compositeurs "sérieux" fassent des BO à l'occasion, ou que leurs élèves en fasse carrière, n'y change rien (...) à force d'amalgamer, on confond tout (...) la sincérité ! Le premier écrit de son sang, le second fait son job (...) Les productions hollywoodiennes délivrent un son calibré pour les systèmes ciné et Home-Cinéma (...) Et tout le monde se prend pour Hans Zimmer"
Je vais répondre à ces points. Je constate évidemment notre désaccord sur l'approche et la conception du répertoire, de ce qui rend une musique sérieuse (ou non). Ensuite je pense que tu te trompes pour la sincérité de Zimmer : bon nombre de ses œuvres furent écrites "de son sang" (même si pour Mahler, je pense devoir remplacer le "bon nombre" par "toutes"). Pour le son calibré : dans le cadre d'un film, le mixage et le montage font en effet en sorte que... Mais non, les compositeurs n'écrivent pas pour un orchestre en "calibrant" leur composition pour un son spécifique ! De Marianelli à Doyle, de Beltrami à Giacchino, ils composent, en suivant leur enseignement, leur héritage, leurs influences, leur âme, et basta. Quand à ta dernière phrase que je cite, c'est indéniable, hélas.
Pour le 2ème post :
- Concernant Rieu (et Clayderman...), tu auras compris que je parle de mon vécu, auprès de ma génération. Et si je n'en connais aucun qui n'en écoute, je sais à quel point il peut-être un symbole de la musique classique (oui !) auprès de celle-ci, et l'impact de son image niaise et ringarde qu'il jette dessus. Et pour les clients plus âgés que j'ai côtoyé du 3ème, 4ème (5ème et 6ème
) âge, combien de fois ai-je entendu "Moi mon jeune monsieur, je n'écoute que de la très grande musique classique, comme du André Rieu" [sous-entendu que comme j'avais 19 ans, je n'écoutais forcément que de la merde, alors que c'était ma plus fervente époque mahlerienne
]. Ceux-là, une majorité de son public que j'ai pu croiser, n'avaient hélas pas le recul de ta mère. Mais je ne veux vraiment pas m'acharner sur Dédé : cette image, il n'est pas le seul à la porter, et beaucoup d'acteurs culturels et commerciaux en sont responsables, les majors en première ligne.
- Concernant Zimmer, je souligne une fois de plus que j'ai volontairement tendu la perche pour cet exemple, qui ne sert pas vraiment mon article : pour certains compositeurs avec qui j'en ai parlé récemment, je sens bien des positions très fermes, voire dogmatiques, sur Zimmer et toute sa progéniture. Mais militant toujours pour la modération et l'ouverture d'esprit, et considérant sa quête de simplification comme pas forcément néfaste (et loin d'être opposé à la mutation électronique qui arrive à notre monde, aussi), j'ai cru bon de l'évoquer. Évidemment, si l'on considère la complexité comme indissociable de qualité, passer après Poulenc, je compatis
. Pour Interstellar, il y a peut-être des sons que tu prends pour synthétiques, alors qu'ils sont bien mécaniques (il a expérimenté des trucs dans l'église du temple, notamment différents usages des cordes).
Une remarque pour finir : tes réponses se concentrent (s'acharnent
) sur Zimmer, mais il n'est qu'un seul cas de la grosse vingtaine de compositeurs que j'évoque, dont certains plus longuement. C'est dommage, la "musique de film" étant si vaste, et les ponts si nombreux... Et je dis cela en regardant le concert de Dudamel dirigeant le L.A. Philharmonic, jouant du Williams sur Arte (depuis 17h30). J'aurais préféré qu'on débatte sur Williams, car il n'est ni moins sincère, ni moins "sérieux", ni moins riche et intéressant, que Mahler, justement. Et Dudamel vient de s'adresser au public avec ce genre de propos : "Nous, musiciens, rêverions toujours de rencontrer Beethoven, Bach, Mahler ou Chostakovitch. Et nous avons cette chance, il y a John Williams".
Et au moment où j'écris ces lignes, Williams explique en coulisse, qu'enfant il allait au cinéma principalement pour écouter le son de l'orchestre, et que c'est ce qui l'a amené à son éducation musicale. C'est exactement ce que je prône : le cinéma - et les autres nouveaux médias - comme véhicules principaux de culture, pouvant brasser et éduquer un public en l'amenant vers tout autre chose (dont l'héritage musical de notre civilisation
), et ayant le passif (= légitimité historique) et le potentiel (= c'est aussi un gagne-pain incontournable pour les compositeurs actuels et futurs), de le faire sans nivellement par le bas.