Pio2001 a écrit:Rincewind a écrit:C'est absolument incroyable. Demandez à des ingé son, si dans leurs début, il ne leur est pas arrivé d'entendre d'énormes différences entre deux égalisations... pour se rendre compte que leur égaliseur n'était pas activé...
C'est arrivé à une amie que j'ai converti au scepticisme (en faisant des tests en aveugle avec elle). Sa pièce d'écoute est très mauvaise. Elle voulait absolument que je lui donne mon équaliseur depuis que je peux équaliser sur le PC. Ce que j'ai fait. Les branchements étaient très compliqués, parce qu'il y a plusieurs sources, et personne ne savait sur quel bouton appuyer pour écouter quoi.
Un jour je passe chez elle. Je remarque que le bouton de l'équaliseur est sur "eq off", alors que les curseurs sont réglés sur une amplitude de +/- 8dB. Je le réactive, elle me fait une scène pas possible "Touche pas à ça ! C'est super bien reglé ! Je veux pas que tu me changes mon son ! Laisse cette machine tranquille ! J'équalise comme je veux ! J'veux pas l'savoir !!! etc"
oui, c'est exactement à ça que jepensais des +/- 8dB alors qu'ils n'étaient pas enclenchés, pas mal...
Rincewind a écrit:Et même en en étant conscient, ça ne vous empêchera pas d'entendre des choses qui n'existent pas ou de ne pas entendre des choses qui exisent...
Oui. D'ailleurs, laissez moi ressortir la pas si vieille anecdote sur le test en double aveugle entre les codecs Musepack.
Le programme de test en aveugle ABC/HR me demande dévaluer le son de 5 versions de l'encodeur MPC, qui sont masquées. Je donne une mauvaise note à la première. De meilleures notes aux suivantes. Je réécoute attentivement, je vérifie, je confirme. Puis je passe au comparaisons ABX entre les codecs pour confirmer l'écart de qualité entre eux. Impossible d'ABXer le premier par rapport aux suivants. Je le réécoute encore, et finalement, il n'a pas un son plus mauvais que les autres ! Je finis par lui donner une note équivalente.
En fin de compte, les développeurs m'ont dit que c'était un test de non-régression ! C'est-à-dire une simple vérification qu'ils n'avaient fait aucune erreur de programmation sur les nouvelles versions. L'encodage sonore n'a pas été changé d'un iota entre les versions que je testais !
On a ici un parfait exemple d'effet psychologique, qui ont le voit, est bien plus complexe qu'un effet placebo. Tout d'abord, cet encodeur m'était présenté sous un numéro anonyme, et je savais que les numéros avaient été tirés au sort. Donc pas d'effet placebo. Je n'entendais pas "ce que je voulais entendre". Ensuite, le numéro 1 m'a paru moins bon que les autres sans aucun doute possible. J'ai vérifié plusieurs fois. Donc il n'y a pas non plus de problème d'attention. A chaque fois que je revenais au un, l'impression sonore revenait. Il a fallu un test ABX entre le 1 et le 2 pour briser l'illusion. En revenant à la comparaison initiale, je n'entendais plus l'effet que j'avais cru déceler au départ.
D'après moi, ce phénomène est dû à un problème d'attention, suivi d'un renforcement psychologique. Tout d'abord, en écoutant 1 et 2, je suis dans l'état du spectateur au cinéma. J'écoute un extrait appelé 1, puis la même chose à nouveau, appelée 2. Mais la deuxième fois, je ne remarque pas les mêmes détails. J'associe donc mentalement une première série de détails à l'échantillon 1, et une seconde, différente, à l'échantillon 2. En les réécoutant, je porte volontairement mon attention sur les premiers détails quand je lis l'échantillon 1, et sur les seconds quand le lis l'échantillon 2, afin de confirmer ou infirmer ma première impression. Le fait de porter mon attention sur les mêmes détails à chaque fois, spécifiques à chaque échantillon, renforce écoute après écoute, une impression partiale, qui au départ était due au hasard. Plus je porte mon attention sur les premiers détails en lisant l'échantillon 1, plus je les entends, les reconnait, et les associe intimement à cet échantillon. Pour un auditeur non averti, cet effet peut s'ancrer très profondément, car lorsqu'on n'entend plus ces détails, à cause d'un problème d'inattention, on se dit que c'est simplement parce qu'on était pas attentif cette fois là, mais que de toutes façons, il sont bien propres à cet échantillon, puisque qu'on les a entendu plusieurs fois auparavant. On en vient donc à filtrer mentalement les indices qui pourraient nous ramener vers une évaluation équitable des sources. Les écoutes qui ne vont pas dans le sens de notre première impression sont plus ou moins consciemment écartées. Associée à des idées reçues telmles que "c'est la première écoute la meilleure", ou "c'est parce que tel disque était plus révélateur", ou "c'est parce que les câbles n'étaient pas bon", ou encore "c'est parce que le courant du secteur était pollué" etc, on trouve n'importe quel prétexte pour orienter notre opinion dans n'importe quelle direction.
Yep, c'est tout juste ça... Le cerveau filtre toujours des informations. Dès que tu as passé ta première écoute, tu as un a priori sur ton écoute que ton cerveau va confirmer... et plus tu es fatigué, plus ça fonctionne.
Rincewind a écrit:deux enceintes "plates" peuvent quand même sonner très différemment
Les enceintes "plates", quand je vois les courbes de réponses de quelques modèles, j'ai du mal à y croire. Les graphes ressemblent aux côtes de Bretagne. Plus on les regarde de près, plus ils ont l'air accidentés. Et quand j'entends l'effet sonore que provoque un filtre très étroit sur un signal large bande... Ca modifie la texture des timbres.
Par exemple, avant, j'avais un filtre numérique à phase linéaire (Shibatch supereq pour Winamp, paramétrique) pour descendre le tweeter de mes enceintes de 1.5 dB. Je me suis rendu compte, au casque comme sur les enceintes, qu'il augmentait artificiellement les détails perçus dans l'aigu. Je crois que c'est parce que c'était un brickwall (0 dB à 1999 Hz, -1.5 dB à 2001 Hz). Je l'ai remplacé par un filtre plus progressif (SoundForge 4.5), mais à phase non linéaire. Celui-ci a beaucoup moins d'effet audible sur les détails, tout en baissant bien l'aigu de 1.5 dB.
En réalisant plusieurs comparaisons CD / copie de vinyle sur PC, et en équalisant les copies de vinyle pour leur redonner le son du CD, ou inversement, je me suis rendu compte également que l'équalisation pouvait avoir un effet puissant sur les détails perçus, et la texture subjective des timbres.
Je pense donc qu'il y a beaucoup plus de notions audiophiles qu'on veut bien le croire : dynamique, timbres, micro-détails, articulation, profondeur... qui relèvent purement et simplement de petits accidents dans la courbe de réponse en fréquence, à un niveau plus détaillé que celui d'un équaliseur 10 bandes.
L'exercice consistant à donner à un CD le son d'un vinyle avec un analyseur de spectre et un équaliseur est assez instructif de ce point de vue. Si en outre on peut utiliser un compresseur multibande pour réduire la dynamique de l'aigu, c'est encore mieux.
Oh oui, quand je parlais d'enceintes plates, c'était justement une façon de parler: ce qu'il faut savoir sur les courbes données par les constructeurs, c'est qu'elles sont lissées. Plus ou moins lissées, certes mais toujours lissées, parce qu'une courbe de réponse en fréquence d'une enceinte, si elle n'est pas lissée, elle est illlisible et n'a aucun sens. Alors on les lisse et on voit quels sont les gros défauts de l'enceinte. Tous les petits défauts (même si il s'agit de trous énormes, c'est sur des très petites bandes de fréquence, et il n'est pas dit qu'en déplaçant le microphone de mesure de quelques pouièmes, le trou sera toujours là) sont trop fins et du coup, pas toujours explicables ni encore moins discernables...
Merci ! Mais ce n'est pas le test le plus rigoureux que les amateurs aient mené. La palme revient à Roberto Amorim, assisté de FF123, pour leurs tests en double aveugle sur les codecs de type MP3, avec cryptage des résultats et analyse Tukey HSD : http://www.rjamorim.com/test/
Guruboolez a également réalisé un travail impressionnant en réunissant 150 échantillons de musique classique de moins de 30 secondes pour rester conforme à la loi sur le droit d'auteur, couvrant la plus grande varieté possible d'instruments, de formations orchestrales et de genres, pour utiliser dans des tests en aveugle : http://forum.hardware.fr/hardwarefr/Vid ... 4765-1.htm
Si tu es interessé par ce genre d'expérience, tout se passe sur le forum hydrogenaudio.org
merci, j'irai y jeter un coup d'oeil, mais il faut garder en mémoire que des tests de ce type ne doivent pas, normalement durer plus de quelques minutes...
Et l'histoire des 30 secondes, en fait, ça n'existe pas: je ne sais pas d'où est née la rumeur, mais pour avoir demandé à un représentant de la SACEM, il n'y a pas d'autorisation de mettre des extraits de 30 secondes. Par contre, les droits d'auteurs sur la musique classique sont très interessants: comme les compositeurs ont composé leurs oeuvres il y a très longtemps, bien souvent, il n'y a plus de droits d'auteurs, ce qui veut dire que tu es libre d'utiliser pas mal d'enregistrements (si si! oui, c'est difficile à croire). Attention quand même, il y a un minimum: je ne sais plus combien d'années doit avoir l'enregistrement au moins, mais il y a une base. Et attention aux chefs d'orchestre qui modifient légèrement l'oeuvre (cf karajan) l'histoire de pouvoir toucher ces famuex droits d'auteurs, mais on s'éloigne du sujet...
Rince