Suite et fin de cette petite série d'essais .
Il s'agit , cette fois , d' essais au long cours : j'ai retenu l'intégralité des deux CD de Sutherland et deux des mouvements de la symphonie de Bruckner .L'esprit est différent et correspond au style d'écoute du mélomane , qui va volontiers réaliser une écoute longue , où l'absence de fatigue auditive devient cruciale ...
Sutherland 1959 : la soprano a 25 ans : airs de Donizzeti , Verdi ...
JBL : grande ampleur ; j'entends toutes les nuances de la voix ; très léger souffle de bande ( il faut tendre l'oreille ) ; style de prise de son typique de la stéréo de la fin des années 50 : c'est très clair et défini , pas de sensation de compression , mais l'orchestre sonne un peu " maigre" ...espace sonore magnifique , ample , profond ... intense émotion à l'écoute de Donizetti ( Lucia ) : capital pour évaluer des enceintes , au final ...
QUAD : orchestre encore un peu plus " léger " ... manque d'assise dans le grave . C'est beau , mais j'ai l'impression que la musique est un peu rendue " à l'os " ...espace sonore plus étroit , plus attaché aux enceintes ; un peu moins d'aisance sur les écarts dynamiques de la voix , parfois importants .
Sutherland 1985 :Verdi , Donizetti , Verdi , Bellini , Meyerbeer ...
JBL : sensation d'une sonorité opacifiée et bouchée par rapport à la prise de 59 ; réverbération qui semble gonflée ; on entend moins de choses , on perd en vie ... très bel espace , large et construit , quasiment en 3D ... les enceintes se font oublier comme points d'émission du son ...à mon avis , les JBL rendent fidèlement l'appauvrissement amené par les prises numériques du début des années 80 , après , les ingénieurs du son ont progressé .
QUAD : c'est plus transparent ; écart bien moindre par rapport à la prise de 59 ! c'st indéniablement plus satisfaisant et moins frustrant ! ( très ) légères crispations sur des fortissimi ( voix et orchestre )
BRUCKNER : CELIBIDACHE : 8° symphonie : Adagio et Finale
JBL : magnifique nappe sonore de l'orchestre , somptueuse ligne des basses , ample et veloutée , qui donne une assise complète à la restitution ; formidable assaut des vagues sonores ; c'est méditatif , apaisé , une musique qui se construit à l'échelle de l'univers , en hommage au Créateur , dans la vision de Bruckner ; graves murmurants ou grondants , puissance tellurique sans limites du Finale ; là , les JBL ne " font " pas du grave , elles " sont " le grave ...énorme sensation d'espace sonore ; et plus je monte le volume , plus ça continue à s'épanouir ... je suis devant l'Océan ...manifestement , c'est aussi la preuve de la supériorité de conception du pavillon de la chambre de compression ...
QUAD : la ligne des basses est bien présente , mais plus discrète que sur les JBL ; moindre sensation d'enveloppement par la musique ; merveilleuse restitution des détails instrumentaux , tout en finesse ; les murs ne disparaissent pas , la restitution reste plus attachée aux panneaux . Attention à l'ampli qu'on utilise : sur les pointes de niveau , le Mc dépassait déjà légèrement les 40 W et j'étais resté prudent sur le bouton de volume .... Ce qui veut dire qu'un ampli à tubes courant , par exemple , va déjà être dangereusement proche de ses limites ... Avec les QUAD , il ne faut pas faire n'importe quoi avec le bouton de volume .
Un 33 tours enfin , du jazz :
Cat Anderson à la trompette , prise de 1977 : le chant du cygne du microsillon ...
QUAD : exemplaire de clarté , de définition ; j'entends une foule de détails ... incroyablement propre , lumineux et défini , pour la trompette , la contrebasse ...mais ça semble un poil " dégraissé " ...
JBL : c'est " night and day " par rapport aux QUAD : mais où est la vérité ? contrebasse plus grosse mais chantante , trompette plus charnelle , plus épaisse aussi ; ça swingue fort , plus qu'avec les QUAD ...
Il n'y a pas de conclusion , car ce n'était pas un match avec vainqueur et vaincu ... ces deux enceintes font partie du club restreint des meilleures propositions qu'on peut trouver dans les deux technologies , à des prix non délirants , du moins en occasion , et sous un encombrement parfaitement compatible avec les intérieurs ...
A mon avis , les JBL s'accomoderont plus facilement , " pour démarrer " , d'un petit ampli , vu leur rendement confortable ( 93 db ) ; j'imagine mal les QUAD avec un " bon petit intégré " ....Attention à l'écrêtage qui ne prévient pas , particulièrement sournois et destructeur pour l'ampli ... et les hps !....
Les QUAD sont arrivées il y a neuf jours et les JBL , qui m'avaient d'abord paru " enfoncées " sur bien des critères , ont progressivement fait valoir , au fil des disques puis sur des écoutes longues , leurs solides et brillantes qualités de fond , mais pas du tout les mêmes que celles des QUAD ! Les deux modèles permettent une écoute sur une après-midi ou une soirée entière , à un niveau sonore significatif , sans la moindre lassitude auditive .
Les QUAD 2905 , sur le papier , doivent être encore supérieures : deux cellules de plus pour le grave , quelques Hz gagnés dans le bas , mais très peu ( 32 Hz au lieu de 37 Hz ... ) ; elles ne sont pas beaucoup plus chères , mais il faudra voir si elles s'accordent aussi bien avec une pièce de taille moyen + et si le placement n'est pas plus délicat , à cause d'une énergie supplémentaire dans le grave ...
En tout cas , j'ai , pour ma part , beaucoup appris de ce comparatif à la maison , malgré l'expérience que je croyais avoir ( l'âge ...) : j'en sors avec des oreilles plus vigilantes et plein de questions sur la "vérité" ( celle de la bande master , du moins ...)