
Date de sortie : 25 juin 2014
Réalisé par : Isao Takahata (Le Tombeau des lucioles, Mes voisins les Yamada)
Production : Ghibli, Toho, Disney
Un vieux coupeur de bambou trouve un jour un bébé extraordinaire qui lui est confiée dans une pousse de bambou. La jeune fille grandit très vite par à-coups et ses parents adoptifs, ayant trouvé la fortune dans un autre bambou, l'installent dans un palais où elle pourra accomplir son destin de princesse. Sa réputation et sa beauté lui attirent vite des prétendants. Kaguya ressent cependant la nostalgie du grand air où elle avait grandi, et repousse un à un ses soupirants, poursuivie par les visions de son enfance.
Bande-annonce :
Je crée un topic dédié pour parler de ce qui est probablement le plus beau film d'animation japonais depuis très très longtemps, le film ultime d'Isao Takahata, découvert tardivement en France avec Le Tombeau des lucioles (huit ans après sa sortie japonaise). Takahata n'avait plus réalisé de long métrage depuis Mes voisins les Yamada, en 1999. Agé aujourd'hui de 78 ans, Takahata signe donc, tout comme Miyazaki avec Le Vent se lève son dernier long-métrage.
L'histoire repose sur un conte célèbre de la littérature japonaise, Le Conte du coupeur de bambous (ou Kaguya-hime), dans sa version intégrée au Dit du Genji (Genji Monogatari), un roman du XIème siècle. Je n'ai pas lu le conte en question, et je n'ai donc pas tous les repères pour apprécier, comme les Japonais peuvent le faire, les glissements opérés par rapport à la tradition. Il semble que la version de Takahata étoffe l'histoire du côté des amis ou amours d'enfance de la princesse et sur l'affirmation de sa personnalité face à l'autorité du père (l'analyse du Giri, une valeur morale reposant sur le respect et la soumission, notamment celle de la femme ou de la fille, est un leitmotiv dans l'art japonais moderne).
Tout ce que je peux dire c'est que le résultat est un chef d'œuvre visuel. Takahata a recours à un style graphique proche de l'esquisse au fusain ou du crayonné, et pourtant très éloigné de la ligne bien plus caricaturale de Mes voisins les Yamada. Les teintes pastels dominent, et malgré la cadence relativement réduite de l'animation, chaque plan exprime une impression de vivacité et de mouvement qui n'a guère d'équivalent ailleurs. On s'y fait en tout cas très vite, et ça fait un contrepoint agréable aux couleurs saturées et à l'encre précise de l'animation japonaise habituelle.
Un point commun avec les Yamada, c'est que Takahata introduit quelques ruptures dans des séquences isolées, traitées de façon complètement différente du côté du tracé et de l'animation. Il y a donc quelques plans totalement statiques, sans animation, et surtout un passage extraordinaire dont le dessin est haché et inachevé, celui de la course de la princesse à travers les prés au milieu du film, qui est une immense claque.
La partition de Joe Hisaishi est plus neutre et profonde que d'habitude (avec aussi beaucoup d'airs joués à la harpe japonaise, le koto, durant l'histoire).
Pour moi, c'est un film à voir impérativement. Il n'a pas déclenché de grande curiosité, mais je suis convaincu que dans quelques années on en reparlera comme d'un chef d'œuvre de son réalisateur et de toute l'animation japonaise.