Pirotto a écrit:Comme d'hab, l'aigritude prend le dessus à la lecture des fora...
Alors je fais comme les détracteurs, et je réitère ... mon compliment. Et j'invite les enthousiastes à en faire autant, ne vous laissez pas intimider par tous ces moqueurs.
Qui aurait imaginé à la sortie du joli mais tièdasse TFA que Disney nous concocterait un film aussi généreux, audacieux et iconoclaste ? Pas moi en tout cas. Finie la branlette fétichiste, les mythes prennent cher, mais ils en ressortent magnifiés. Finis le cynisme, le placage de recettes éculées et le fan-service à tout crin et photocopié du navrant Rogue 1, tout ressort grandi de la javellisation par Johnson. Enfin de la noblesse, de l'élégance, de la magie. Sa proposition est vraiment énorme, et bien sûr il se vautre un peu parfois, je ne vais pas prétendre que le chapitre Canto Bight est ce qui m'a emballé. Mais plusieurs fois je suis presque tombé de mon siège devant la brillante exécution, la densité, l'incarnation, la vie, l'ambiguïté, la poésie, bordel ! La quantité d'idées est ébouriffante, même si une ou deux sont ratées, quoi.
On sent en Johnson un profond respect de l'esprit Star Wars, qui parvient malgré tout et miraculeusement à dépasser le carcan étroit et poussiéreux où la franchise, et surtout les gardiens du Temple auto-proclamés, se sont enfermés depuis si longtemps.
Lire ici que la photo, la direction artistique, la réal. sont juste potables, voire nazes, c'est carrément tordant. Toutes les pinailleries sur la crédibilité ou la cohérence de l'intrigue, des sciences physiques ou des nouvelles créatures, bon sang, c'est du Star Wars. Si vous n'aimez pas ça, ne vous forcez pas. Allez voir les films de Nolan. Johnson enchaine les scènes dramatiquement intenses, et profondément premier degré, qu'il agrémente d'une belle candeur. Quand il s'agit d'y aller, on peut pas dire qu'il dédramatise tout à la Marvel, au contraire. La comparaison me semble absurde, comme celle avec Potter. Et l'arrivée de la marionnette authentique de Yoda manipulée par le non moins authentique Frank Oz, à la place de la pathétique bouillie de pixels bondissante, venu dire que oui, "Young Skywalker", l'ordre Jedi a toujours été à côté de la plaque concernant la Force...
Un clou de plus dans le cercueil de la prélogie.
A plusieurs reprises j'ai eu les poils, ça ne m'était pas arrivé au ciné devant un Star Wars depuis... les années 80. Je souhaite à nos amis aigris de vaincre leur ulcère. A force de les entendre râler, Mickey va bien finir par obtempérer, et le retour du servile JJ pour le IX devrait faire leur affaire. En attendant j'aurai bien kiffé devant The Last Jedi, comme le gosse de dix ans que j'étais en 77.
La vision de Luke sur l'échec des Jedis, qui pêchent par orgueil et ne voient pas venir Palpatine, est une des bonnes idées du film. L'explication de ce qu'est la Force, même si à moins d'être un gros mongolien, on avait déjà pigé, c'est aussi une manière de dire que là encore, les Jedis se sont fourvoyés avec leur sélection qui était devenue complètement stupide (Anakin trop vieux, pfff
).
Les critiques sur l'esthétique du film sont subjectives. On peut en discuter, mais ce n'est pas forcément passionnant. On va vite tomber dans l’égout et les couleurs...
En revanche, si vous trouvez que le scénario tient debout, ben là, je ne peux rien pour vous. Le scénario est mauvais, ne repose sur rien. Et le problème n'est pas qu'il aille en contradiction avec l'univers de Star Wars, bien que bon, si le but est de faire n'importe-quoi, pourquoi acheter une licence, au bout d'un moment...
Non, le problème, c'est que pour que des actions se suivent dans une histoire, il faut qu'elles soient causées par celles qui précèdent. Première règle de la narration. Après cela car à cause de cela. Après, au montage, on met dans l'ordre qu'on veut (l'ordre de la narration n'est pas obligatoirement l'ordre des faits, exemple
Pulp Fiction, d'abord monté dans l'ordre par Tarantino, qui l'a trouvé chiant à crever, remonté dans l'ordre actuel, palme d'or). Là, sérieux, rien que les premiers dialogues (de mémoire, et je ne suis visiblement pas le seul que ça ait choqué
https://unodieuxconnard.com/2017/12/15/ ... s-jar-jar/):
« Général Hux, flotte ennemie en vue. Ils évacuent leur base.
– Mouhohoho… mais je ne prends mes ordres que du Grand Snorky. »
Bref, les faits se succèdent sans liens de causes à effet. Mais c'est pas grave...
Deuxième règle de la narration, la pertinence. On raconte ce qui mérite de l'être. Là, entre l'amourette vaseuse entre Numérobis et machine, la fuite insensée (si on peut flinguer un vaisseau en passant en hyper espace, pourquoi on ne met pas tous les droïdes capables de piloter dans les navettes secondaires pour la balancer dans la tronche des plus gros vaisseaux, ils seront bien emmerdés pour suivre les rebelles, regroupés dans les plus gros transporteurs), et j'en passe, il n'y a rien de pertinent. Ça l'était dans l'
Empire contre-attaque (et d'ailleurs c'était mauvais aussi), mais là, c'est nul. Je rappelle que le film raconte comment un apprenti va être formé en tant que Jedi par un maître reclus sur une planète éloignée, pendant que les copains se font courser par l'empire. Déjà vu? Nooooooon.......
Ensuite, il faut un minimum de vraisemblance. Pas de réalisme. De vraisemblance. Aller chercher un super pirate informatique à Dauville, le louper, puis en trouver un quand-même mais pas le même alors qu'il n'y avait qu'un seul type capable de faire ça, ce n'est pas vraisemblable. Que Numérobis ait été éboueur sur la plus terrrrrible arme du Premier Ordre (voir épisode VII), ce qui lui permet de savoir exactement comment la détruire, puis par coup de chatte galactique en faire un hacker de haut vol qui sait exactement comment désactiver un traceur (avec les plans Revit du vaisseau mère en sus, je kiffe), ce n'est pas vraisemblable. Qu'un X-wing puisse se faire toutes les défenses d'un croiseur, ce n'est pas vraisemblable. Je suis capable de cligner très fort des yeux, mais il y a des limites.
Et puis il y a plein de détails qui achèvent de dire au spectateur qu'on le prend vraiment pour un con : "et Ducon, t'es au ciné? mais t'es vraiment con alors, tien, comme t'es con, on va balancer des vannes sur les mères".
Non, c'est pas une question d'aigritude, c'est une question de cerveau. Je veux bien le débrancher volontairement, et je veux bien reconnaître que j'ai bien aimé le film. Mais c'est un mauvais film.