De plus , il y a le problème de la notion d'enregistrement en tant qu’œuvre artistique : est ce que le master est cette œuvre ou est ce immatériel ?
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J'ai lu évidemment d'aabord le papier du NYT plus long et plus complet. Puis son digest dans un Blog du Monde.
Le problème se pose différemment aux Etats-Unis et en France pour le droit en plus de ça : il est plus long pour le producteur aux Etats-Unis, mais c'est le régime du copyright et de la négociation qui prévalent. (Un metteur en scène de film n'est pas toujours considéré là bas comme un auteur... et il n'a conséquemment pas de droit moral à faire prévaloir... )
En France, le droit d'auteur est inaliénable... Mais le droit des interprètes est différent : encore que protégé lui aussi... et quand ils sont liés ça peut faire des étincelles : ainsi, un auteur-compositeur de chanson a pu faire interdire la réédition d'enregistrements de lui, tombés dans le domaine public des interprètes, car il estimait que sortis en 45 tours, voire en 78 tours pour certains, ils n'avaient jamais été fait pour être enchaînés, comme ils l'étaient, et dans l'ordre dans lequel ils l'étaient, pendant une heure sur un CD... car ça formait ainsi une oeuvre nouvelle : il a obtenu gain de cause au nom du droit moral de l'auteur-compositeur...
En France, le problème s'est posé et a été tranché, par exemple, lors du procès Pierre Henry contre Universal. Universal ne voulait pas le rééditer et ne voulait pas lui donner les droits pour qu'il le fasse... Dans son cas, sa musique n'existant que sous forme de support enregistré, il a eu gain de cause et Universal n'a pas pu être le propriétaire des bandes au sens matériel et immatériel et a du faire affaire avec lui pour rééditer son oeuvre qui sans ça devenait inaccessible...
Pour une interprétation c'est différent...
Quand on achète un disque, par exemple, légalement on ne se rend propriétaire que de l'objet qui peut être protégé lui aussi au titre de la maquette, de la photo... mais on n'achète en aucun cas ce que le disque contient qui est immatériel... on ne fait qu'acheter le droit d'en jouir dans les conditions fixées par la loi...
Il y a une citation dans l'article qui compare une copie de master à la photo d'un tableau
C'était une image (!) assez juste,
dans une certaine mesure, du temps de l'analogique, vu la perte lors de la copie... ce n'est plus vrai du temps du numérique ou l'on parle de clone... ce passage aurait mérité des développements et des précisions. Car par exemple, le master originel fait pour le LP n'est lui-même qu'une pâle photographie des bandes originelles avant application des traitements qu'on leur fait subir...
J'ai été nommé expert dans un différent entre un artiste, la maison de disques, le studio de mastering et l'usine de pressage... En double aveugle, j'ai discriminé l'enregistrement originel sur lequel le musicien avait donné son BAT, le master fait pour le CD et ce qui en a résulté... Résultat : tous les CD pressés sont partis à la poubelle... Tout ça pour dire qu'entre la bande originelle et ce qu'on appelle le master : il y a des manipulations qui peuvent décolorer le tableau...
L''enregistrement, comme le master d'une interprétation
en temps qu'objet ou fichier appartiennent au producteur... pas à l'interprète... Certains ont d'ailleurs dû les acheter au producteur pour les retirer définitivement du marché... Un célèbre violoniste a payé tous les frais d'enregistrements chez DGG de son concerto de Brahms avec Abbado... Un célèbre pianiste a payé tous les frais d'un disque Chopin qu'il ne voulait pas voir publier, le trouvant pas bon, contre l'avis de sa maison de disques... dans les deux cas, toutes les bandes ont dû leur être donné...
Et d'autres interprètes - Barenboim par exemple dans le domaine de la musique classique sont leur propre producteur pour certains disques : ils concèdent la licence de leurs enregistrements à la maison de disques)...
Ces choses sont intriquées et complexes... et si différentes d'un côté et de l'autre de l'Atlantique...