J’étais vraiment curieux d’entendre un préampli aussi bon en hifi qu’en home-cinéma. Je suis donc allé l’emprunter au Mans, chez HifiPlus, d’où vient une partie de mon matériel, et qui pratique un accueil aussi chaleureux qu’instructif. On y emprunte sans problème. J’ai donc branché le système de la manière suivante :
CD Rega Planet + doubleur de cinch=>
- Pr200 => sélecteur de sources
- Pr5.1
- AM100 => K1000/sélector => Thiel 1.5
- AV100 => Thiel SCS3 + 0.5
J’ai également relié au Pr5.1 : mon Pioneer 656, le décodeur tv, mon tourne disque et un tuner. Tout a été d’abord câblé en Qnex/Qed silver a. pour assurer une comparaison honnête. Le temps de chauffe a été à chaque fois de 30 à 40’.
J’ai utilisé des plages de CD que je connais très bien — certaines depuis fort longtemps. Et j’ai pris des notes en réécoutant parfois certains passages plus particulièrement.
L’écoute sur les 1.5 et sur le k1000 a été faite à moins de 2,5 sur le pr200/26 sur le pr5.1 (équivalent de 58/60 db(A) mesurés au sonomètre).
J’ai d’abord écouté mes plages favorites sur les enceintes, qui sont quand même souvent mises à contribution (j’ai intercalé des écoutes au k1000 et indiqué le moment ou je suis passé au casque)
1/ CD :
- King Crimson,
Lark’s Tongues in Aspic, EGCD7/Virgin, 1973/1988,
plage 1. Sur les 1.5 comme sur le k1000, l’entrée des tintement de clochettes (vers 0’ à 1’) est très bien : elles présentent les mêmes timbres avec un léger effet de saturation, comme d’habitude. Le synthé qui surgit vers 3’05’’ passe de droite à gauche identiquement sans creux ni rupture. De même sur le son montant de ce qui ressemble à des cymbales à 1’->2’54’’ je n’entends aucune différence entre les deux appareils en les faisant commuter de l’un à l’autre.
Sur le k1000, vers 3’40->3’50, la basse est un peu plus ample dans le grave et un peu plus présente avec le pr200 — un peu comme en comparant le CD et le 33t…
- même CD,
plage 4,
Easy Money : de même la basse jusqu’à 0’45, puis à partir de 1’40, est un poil plus présente sur le pr200 quand on l’écoute au casque. Mais les craquements et les crépitements que l’on entend vers 1’11 sont strictement indiscernables que ce soit sur les enceintes ou au casque.
Je précise que je n’ai pas tout d’abord prêté attention à cette petite différence et que je me suis dit que c’était un effet d’auto-persuasion.
- Arvo Pärt,
Tabula Rasa, ECM#1275, 1984, plage 4 : j’ai écouté ce morceau bien connu (qui servait jadis d’introduction à une émission de France Culture que j’écoutais souvent et dont je possède plusieurs versions…) en continu, d’abord sur les enceintes, puis au casque, en comparant à chaque fois les deux appareils, puis en faisant des comparaisons directes sur les introductions de la première partie et de la seconde. Je n’entends aucune différence entre les deux : mêmes timbres du violon (Gidon Kremer), même sensation de recueillement. Le piano préparé joué par A Schnitke sonne identiquement. On "entend" la salle de la même manière.
-Janacek, quatuor
Lettres intimes, plage 9, par les Prazak, CD Praga Digitals PRD250108 : le violoncelle présente exactement la même ampleur et la même localisation. L’image, la transparence et la cohérence des registres sont indifférenciables pour moi, d’un appareil à l’autre. Les violons présentent les mêmes timbres et la même précision de rendu et de détails. En particulier vers 1’14->1’25, les petites modulations et les harmoniques clissées en fin de note en sourdine par le (premier?) violon sont identiques.
Ma plus petite fille a accepté de tourner le bouton du sélecteur pour me faire deviner de quel appareil il s’agissait pendant que j’écoutais les enceintes : et je me suis trompé une ou deux fois… Ce qui l’a beaucoup amusée.
-Dvorak,
Quatuor n°12 "américain", par les Fine Arts, CD Lyrinx lyr184, 1999, plage 1. La même entrée en scène des instruments les uns après les autres, avec la même dynamique et les mêmes timbres. Même présence physique des frottés de cordes qui sont sur cet enregistrement très présents et très audibles. Vers 0’17->0’21, puis vers 0’55->1’06, les piz du violoncelle sont identiques sur les deux appareils, identiquement tendus et avec la même ampleur, la même réverb.
- J. Cabanilles,
Ballades, Tientos & Passacalles, J Savall et Hespérion XX, CD AliaVox AV’9801, 1998, plage 1. Sur les 1.5, c’est la même chose : les clochettes et les peaux de tambours, les cordes sont indiscernables. Mais, mais, mais…
J’ai débuté les écoutes au k1000 à ce moment là et par cette plage :
J’ai tout de suite eu le sentiment que tout présentait un poil moins d’"allant", c’est comme si il y avait un (très léger!) tassement de dynamique. J’ai recomparé plusieurs fois avec les enceintes : je ne l’ai entendu qu’au k1000.
Même phénomène sur Vivaldi,
Les quatre Saisons, Il Giardino Armonico, CD Teldec 4509-97208-2, 1994, plage 6 (celle-là même que nous écoutons avec Gilles R dans la page qu’il a ouverte). Alors j’ai réécouté au casque des morceaux que je venais d’écouter sur les enceintes (voir plus haut) et d’autres :
-Bach,
Suites et partitas pour violoncelle et violon transcrites pour luth par Hopkinson Smith, CD strée Naïve E8678. Pas de différence : les mêmes timbres, la même ampleur et la même réverb pour ce superbe luth de facture récente. Les mêmes détails précis : pincé de cordes, glissés de doigt. Et surtout le même naturel dans les extinctions de notes. Je me suis donc dit que je rêvais… Mais
-Sur
Meddle des Pink Floyd, plages 4 et 1, la basse est un peu moins présente physiquement que sur le pr200. En montant un peu le son, à 32/33 (en faisant attention, évidemment), l’impression disparaît (j’ai revérifié les réglages de niveau ensuite). Rien de très net, toutefois…
- Sur
Here comes the sun des Beatles, vers 0’27, c’est pareil : la ligne de basse me paraît moins nette et de même sur les clappements vers 1’45. Idem sur
Come together : le pied de grosse caisse qui commence vers 1’45 a moins de poids, moins d’ampleur et de "pulse". C’est encore la même chose sur
Two of us (on a changé de disque…) : pied de la grosse caisse vers 0’10, 1’30->1’35 — et sur
Get Back, où la basse vers 0’22 est peut-être plus appuyée. Mais les voix, là dessus comme sur le reste, sont identiquement timbrées : on peut passer d’un appareil à l’autre en écoutant au casque sans entendre aucune différence. Idem sur
I Me Mine où je n’arrive pas à faire la différence.
Cela dit : j’avais écouté ces morceaux d’abord sur les enceintes sans entendre de différence et l’écoute au casque a été faite dans un très grand silence (il y a des heures où c’est possible). De plus, il ne s’agit pas non plus de différences extrêmes. Ni la transparence, ni la précision de l’image sonore, ni la cohérence des registres, qui me paraissent des critères essentiels ne sont différents.
2/ La carte du pr5.1
Ensuite je me suis dit que je pourrais comparer le convertisseur de mon lecteur et la carte du pr5.1, que j’ai câblé en spdif (un profigold correct). Grosse déception : tout est plus brouillon (image) et les basses sont beaucoup plus floues (cohérence pas convaincante).
Je me suis dit que bon, c’était pas non plus fait pour ça et que ça pouvait être le lecteur etc.
J’ai d’abord utilisé le même câble et ensuite recâblé le Planet à l’aide du câble MIT mi-330 série 2 que m’a prêté Alain70 quand je suis passé le voir — un très bon câble soit dit en passant (heureusement que je lui ai laissé des otages…:wink:). Le reste de l’installation demeurant identique.
Le set up de Balance du pr5.1 est de 0 db pour les 1.5, -1 pour a scs3 et de –3 pour les 0.5 — delay à 3m pour les 1.5, 3,2 pour la scs3 et 1,2 pour les 0.5. J’ai fait le calage avec la fonction Noise du préampli puis avec le test THX du DVD Die Hard3. Lorsque l’on passe le potentiomètre à 43, on obtient une mesure à 60 db(A) +/- 0,5 au sonomètre à 3 mètres… Evidemment, je n’ai pas écouté à cette hauteur là… Potentiomètre à 2,5/3- sur le pr200 et à 29/31 sur le pr5.1.
J’ai comparé le CD de Maxime le Forestier etc.
Plutôt Guitare au DVD,
puis en entrant en numérique (spdif à partir du Planet/toslink à partir du Pioneer).
Attention à la commutation Numérique/analogique sur cet appareil : il n’y a pas de mute entre les deux et il faut baisser le son sous peine de prendre un "cloc" numérique dans les gencives des tweeters…
Evidemment la scène sonore est plus ample et plus aérée sur le DVD que sur le CD, mais les timbres sont moins brouillons sur le CD qu’avec le DVD… Et là je m’aperçois que je suis en train de comparer le CD câblé en analogique et la carte du pr5.1. Je me suis dit que ça multipliait les termes de comparaison : j’ai donc décidé de comparer la carte de conversion du Pioneer à celle du pr5.1, en sortant du Pioneer en stéréo analogique (par les frontales et pas par la sortie downmix!) et en numérique :
- plage #10 : le son a plus de réverbération et est plus transparent sur le 656 — la carte du pr5.1 a plus de niveau mais sur la plage #19, c’est plus crispé, plus agressif. La taper de la main de Jean-Félix sur la table de la guitare claque plus que sur le Pioneer qui adoucit peut-être les choses… Sur la plage #20 : la ligne de basse jouée par Lalanne est plus grave, descend plus bas sur le pr5.1 que sur le 656, mais elle est plus floue et moins naturelle, moins facile à suivre que sur le Pioneer.
Je me suis d’abord dit que c’était peut-être une question de goût.
Je me suis passé quelques SACD (les quatuors à cordes de Beethoven par les Prazak, en particulier le volume I, qui propose l’op.18 (Praga Digitals prd/dsd 250183, 2003) :
Tout est très bon en
analogique stéréo (idem en multicanal) comme en multicanal.
Puis le Concerto n°1 de Beethoven par Duchablé (DVD Ambroisie AMI 994030002, Concerto n°1, mouvement 1 plage 2). En analogique c’est très beau — infiniment meilleur que ce que j’obtenais avec l’accouplement (contre nature) du pr200 et du Yamaha E800 — évidemment, dira-t-on… Mais alors en numérique !!!… J’ai fait une comparaison analogique (convertisseurs du Pioneer, donc) et numérique (convertisseurs du Pr5.1), en changeant de câbles — le résultat est le même :
En DTS : un son sale, brouillon et un piano qui a tendance à détimbrer. Le doigté est comme plombé avec un effet de martelage : ce sont des crispations et des duretés tout à fait audibles. Même chose en DD. De plus, durant les silences, il y a comme un perte de transparence. J’arrête tout et je vérifie le câblage : même chose. Je change le câble : même chose. J’enlève le câble spdif et j’utilise une toslink : encore pareil. La même chose que la comparaison Planet/carte du pr5.1!
Je me suis donc posé des questions. Ça faisait exactement comme ce qui s’est passé il y a quelques semaines sur le pr200 : le fusible a dû chauffer un peu, une cloque s’est formée au milieu et j’avais un son sale qui est état apparu brusquement. En poussant le potard à fond — entraîné par un élan provoqué par le fait que, quand on passe un 33t, on monte le son, on entendait un gros buzz. Tout était rentré dans l’ordre en changeant le fusible (chez Atoll, il y en a un de rab dans le logement!!!). J’ai donc eu l’idée de pousser le potentiomètre au maximum et d’entendre un bon gros parasite des familles. Et là :
uniquement en mode numérique un énorme bruit modulé. Si le tuner ou le décodeur Csat est branché, on capte radio Londres en même temps (le canal d’à côté veux-je dire) au milieu d’une fréquence éléevée noyée dans un bzzzzzz… C’est probablement ça qui donne cet effet de salissure que je viens de repérer dans les écoutes. De même quand on monte le son (en numérique), à partir de 45 jusqu’à 55, on entend distinctement un "tac tac tac" à chaque pas. Je précise que tout est branché sur une ligne dédiée dotée de ses propres différentiels (sur une multiprise pulsar correcte, et que j’ai pris la peine de tout débrancher et d’essayer uniquement le préampli branché sur les enceintes sans aucune source connectée ni câblée ni en numérique ni en analogique, en changeant les câbles de liaison pré/ampli : c’est la même chose. Je ne pense donc pas qu’il s’agisse d’un problème d’installation électrique.
J’ai envoyé un mail à Atoll pour leur demander si j’avais loupé quelque chose, et il m’a été répondu séance tenante qu’il y avait probablement un défaut sur cette carte là : pas de quoi s’affoler, donc, car, le cas échéant ça devrait pouvoir se régler sans aucun problème.
J’ai fait le reste des essais en analogique : et là tout va bien.
- DVD Die Hard 3 — chapitre 1 : l’explosion est spectaculaire — ça descend très bas et, potard à 30, j’enregistre une pointe à 80db(A). J’ai pris des gravas dans les cheveux. Au chapitre 3 — 90 blocs en 30 mn à New York — même chose. C’est plus percutant avec la carte — et le bruit n’est pas audible quand on regarde un film (évidemment je n’ai PAS monté le potard à 50/55 !…).
- Matrix 1 en vostf DD: Néo et Trinty donne l’assaut du building pour libérer Morpheüs… Ah !… la poésie des douilles qui tintinabulent à la Arvo Pärt sur le dallage du hall d’entrée entre deux rafales de mitraillettes… En numérique, le bruit n’est guère audible — Neo a dû le flinguer, ou lalors c’est quand l’hélicoptère a explosé, je sais plus. En analogique, en poussant le potard à 46, on obtient des pointes à 80/85 db(A)
- J’ôte mes boules quiès et je passe à Microcosmos et au Peuple migrateur (toujours de préférence en DTS quand c’est possible) — ça tombe bien, mes filles arrivent : elles trouvent que c’est très bien parce que "le son vient de partout en même temps" et qu’on "voit bien passer les oiseaux". Il est vrai que les battements d’ailes sont spectaculaires — idem la bande son de Microcomos. Je n’ai pas poussé l’expérience jusqu’à brancher la PS de mon fils sur l’entrée restée libre pour que lui et son copain tentent de "massacrer la tronche du Balrog" dans leur jeu du Seigneur des Anneaux. Il y a des limites à ma capacité d’expérimentation et le temps m’étais compté…
En conclusion. Je suis tout à fait convaincu par ce préamplificateur quand je l’utilise en mode stéréophonique et sans passer par la carte — qui présente probablement un défaut (mais ça ne me paraît pas forcément significatif : c’est sans doute un défaut unique ou exceptionnel). Après tout l’écoute au casque ne révèle de différences, d’ailleurs acceptables et assez faibles, qu’en compraison directe et très attentives. Mais —
Si les réglages de set up me conviennent parfaitement et je n’utilise jamais les dsp du petit décodeur que j’utilise,
En revanche, je trouve tout à fait regrettable que le potard soit limité à 55, lorsque l’on déclare le caisson en "off", ce qui est nécessaire pour éviter que les enceintes frontales soient déclarées automatiquement en "small"! (il y a une erreur dans la notice m’a dit M. Dubreuil, qui a très gentiment répondu à mes questions ("Il y a une erreur dans le mode d'emploi de votre appareil :
Le volume est bloqué à 55 en SUB OFF et non en NOISE OFF. Le bruit numérique que vous décrivez ne me semble pas du tout normal. En revanche, il est possible que l'atténuateur en fin de course produise de légers tics surtout si la source sélectionnée présente une composante continue. Pouvez vous nous indiquer le numéro de série de l'appareil qui vous a été prêté pour vérifier si cette version est récente ou non.") J’en ai discuté avec cet homme charmant de HifiPlus au Mans qui estime qu’il y a un défaut sur la carte et qu’il faut sans doute la changer.
Outre que je n’ai pas de caisson, je ne vais quand même pas déclarer mes 1.5 comme des enceintes de bibliothèque et accepter la coupure forcée à 150Khz… En écoute hifi, le passage par la limitation à 55 est donc inévitable — et je pense que c’est lié à l’effet de freinage et de basse moins tendues que j’ai entendues. À moins, évidemment, que je revende toutes mes Thiel pour les changer contre des PCS (réellement "small") et un caisson de chez Thiel…
Bref, il y a là une manière d’organiser la configuration de l’appareil que je trouve un peu dommage sur un appareil tourné vers la hifi.
Je vais donc prendre le temps d’écouter autre chose!
Cdlt