Ce qui est bien dans notre conversation, c'est que chacun précise les tentatives d'explication des autres.
Pour revenir à nos début… je comprend ce que veux dire Petrucciani et je crois que beaucoup de musiciens comprennent. Ma seule nuance rejoindrait ce que haskil précise, c'est à dire qu'il n'y a pas de "couleur" absolue. C'est aussi lié à la personnalité, à l'expériece et la mémorisation des hauteurs, à l'époque et bien sûr au diapason… cela fait un tout bien plus complexe que les quelques remarques données dans mon post.
GBo a écrit: Je voulais dire simplement que ce ne sont pas les mêmes cils ni les mêmes terminaisons nerveuses qui sont excitées à l'audition d'un do et d'un ré sinusoidal (un peu comme si on touchait un doigt de pied plutot qu'un autre ), il y a donc bien une information ABSOLUE qui est transmise au cerveau: même si celui-ci semble traiter préférentiellement les intervalles entre les notes, quelque part il a l'information absolue, c'est physiologique
Cette information transmise au cerveau, peut être considérée comme absolue quant au principe que tu relates… mais c'est une palette indifférenciable pour la conscience des hauteurs pour un individu qui n'a pas les repères d'un étalonnage. Rien d'inné là dedans. C'est l'apprentissage, et la mémorisation de l'échelle et ses repères dans ce champs qui donne au cerveau la capacité de différencier et de "nommer" la hauteur.
En visuel, il se passe la même chose… le spectre des couleurs ne signifie pas : rouge, vert ou bleu. C'est par l'éducation que l'on nomme certaines zones précises. Et beaucoup sont étonnés de découvrir le "vrai" rouge ou le "vrai" bleu dans les synthèses additives et soustractives de la lumière… Ce n'est pas toujours le bleu du ciel des gouaches de leur enfance.
L'œil est plus éduqué que l'oreille… mais c'est une autre histoire…
haskil a écrit:A cette époque les tonalités avaient des caractères répertoriés et il n'est pas impossible que les compositeurs aient été sensibles à ce préalable : ré majeur est brillant et triomphal composons une oeuvre dans ce climat dans ce ton là.
Le préalable est également valable dans l'autre sens… Je crois en effet aux croisements d'influences. Ce que tu dis Alain a du vrai, mais ce caractère répértorié n'est pas venu par décret, il a été établi par l'assimilation des constats issus de la pratique instrumentale et vocale de l'époque (et du lieu). Qu'en suite les compositeurs s'y réfèrent… bien entendu, nous sommes d'accord.
haskil a écrit: L'oreille absolue n'est en rien un "don naturel". Il est l'objet d'une culture, d'un environnement sonore.
Je n'y reviens pas.
haskil a écrit:Cependant, par exemple, la Philharmonie de Berlin joue un peu plus haut que les orchestres parisiens ce qui pose des problèmes pour l'accord des pianos parigots qui ne tiennent pas cette surtension des cordes a laquelle ils ne sont pas habitués. Aussi le son de Berlin, bien que plus profond de celui des orchestres français (éthiques cotes cordes) est il aussi plus brillant...
C'est vrai… mais cela n'a plus rien à voir avec l'impression individuelle d'un musicien d'une époque, comme je le sous-entendais.
Ce que tu dis des musiciens du Philar de Berlin et du diapason est vrai… un compositeur mis subitement devant une musique au diapason différent perdra ses références. C'est un peu la même chose que l'histoire des lunettes de soleil… quand on les met, cela change beaucoup… le temps passant… le cerveau rétabli ses "normes"… au bout d'un moment on ne sens plus la couleur des lunettes.
C'est pour cela qu'il fallait des commissions… parce que personne n'entendait plus le réhaut du ton auquel tout le monde s'était habitué à entendre et parfois à jouer plus haut… sauf les chanteurs !
haskil a écrit:Question : un la majeur (fa dièse, do dièse, sol dièse à la clef) est-il ou non un la majeur si le la n'est pas à 440, mais un demi ton plus bas ou plus haut que ce fichu 440 ?
Réponse : un la majeur à 440 Hz pour un musicien A d'une époque et d'un lieu précis est un la majeur. Si on lui donne un la majeur un demi ton au dessous, il dira la bémol majeur.
Le musicien B d'une autre époque habitué au la avec le diapason un demi-ton au dessous (la 415,31 Hz) entendra le la du musicien A comme un la#.
C'est évident… mais comme toute l'échelle tonale glisse, le "ut" de référence latine glisse aussi, l'effet d'attraction des tonalités par rapport à l'ut" ne sera pas modifié et il est probable que les caractères des tonalités soient tout aussi pertinents… avec toutefois pour certaines corporations de musiciens des appréciations différentes… et là nous retrouvons nos chanteurs !
Sans oublier que les cordes un demi-ton au dessus ou en dessous ne sonnent plus de la même manière… et si il n'y avait que les cordes !
C'est donc un mélange compliqué…
grifield a écrit:Bien sûr. Ces 7 modes sont les modes grégoriens, c'est à dire que sur un piano on ne joue que les touches blanches (mode de do, de ré, de mi, etc...). Des compositeurs de la fin XIXème et début XXème ont beaucoup utilisé cela, les organistes avant tout (Duruflé par exemple).
Mais on peut rajouter les 2 modes qu'utilise Debussy, constitués d'intervalle de tons uniquement.
Des modes, il y en a d'autres… par exemple, ceux de Bartok et aussi les 7 modes à transpositions limitées de Messiaen… mais c'est un autre sujet…
grifield a écrit:Justement non, c'est ça qui me turlupine, c'est à dire qu'on dise qu'un sol Majeur est obligatoirement majestueux, que ce soit avec un la à 398Hz ou à 440... Ce qui est énorme.
Etrange donc.......
Cela est étrange… mais je réponds à ton interrogation dans ma réponse à haskil :
…mais comme toute l'échelle tonale glisse, le "ut" de référence latine glisse aussi, l'effet d'attraction des tonalités par rapport à l'ut" ne sera pas modifié et il est probable que les caractères des tonalités soient tout aussi pertinents… avec toutefois pour certaines corporations de musiciens des appréciations différentes…
Sans pour autant dire comme je le précise plus haut qu'il y est totale équivalence…
Mais pour revenir sur le choix de la tonalité pour une pièce particulière, vous oubliez l'influence de la lutherie et de l'ergonomie des instruments.
Le choix d'une tonalité pour Chopin était aussi influencé par la façon dont les idées et les mains tombaient et couraient dans des positions efficaces avec des passages de doigts sans trop de problèmes… pour lui!
En regardant les tonalités et la positions des mains sur le clavier cela parait évident.
Oui Alain… c'est plutôt compliqué… il n' y a pas une seule solution. Tout est affaire de culture d'une communauté musicale à un moment donné et de sensibilité individuelle dans ce même moment…
Donc… vaste sujet.
Gilles