» 27 Mai 2011 11:25
Pas qu'à la Warner. Via ses contrats, c'est Kubrick qui avait le contrôle complet sur les conditions d'exploitation de ses films. Maintenant, ce sont ses héritiers, apparemment sa veuve, une de ses filles et son beau-fils (une des filles est morte, la dernière a rejoint la scientologie et a coupé tout contact avec les autres) qui ont récupéré les contrats.
La famille a mis en place Jan Harlan, le beau-frère, pour tout ce qui est négociations et finances et Leon Vitali, un des assistants personnels, en charge de la restauration et des aspects techniques. Il s'occupe des transferts en numérique pour la vidéo ou le cinéma, ou de fournir des copies à des festivals, ce genre de choses et la famille lui laisse apparemment toute latitude là-dessus (il faut dire que quand on a passé des décennies avec un type qui chipotait sur la luminosité de telle ou telle ampoule dans un lustre, on n'a pas forcément envie de se relancer dans de nouvelles conversations techniques).
Les décisions sont en tout cas prises en petit comité, ce qui reste fidèle aux méthodes de Kubrick, qui travaillait avec une équipe très réduite de personnes en qui il avait confiance (mais parfois plus pour des raisons de fidélité que de compétence : Vitali, en particulier, ne me semble pas très qualifié). Pour moi, Vitali était convaincu que Barry Lyndon était du "1.77:1" (un format vidéo qui n'existait pas à l'époque...), personne dans l'entourage ne s'est rendu compte que c'était une erreur (mineure, certes mais une erreur) et la Warner a exécuté le transfert conformément aux instructions.
Maintenant, ils n'ont pas envie d'admettre qu'il y a eu gaffe et Vitali n'a surtout pas envie d'aller voir le studio pour leur dire : "Bon, désolé les gars, vous avez dépensé plusieurs centaines de milliers de dollars pour le transfert et pour le pressage des disques mais hmm... hmm... quelqu'un chez vous a fait une erreur, ça devait être un type appelé Veon Litali, mais hein, surtout pas moi, et il faudrait tout reprendre de zéro parce que le contrat nous y autorise et qu'il est plus important de respecter les intentions de Stanley que de faire du chiffre."
Ce qui est assez affligeant, c'est plutôt l'attitude de carpette de Robert A. Harris, le type qui est fameux pour ses restaurations de My Fair Lady, Spartacus, Vertigo ou du Parrain I et II, et qui est actuellement responsable d'articles très détaillés mais aux anecdotes assez stériles, sur blu-ray.com ou les forums de hometheaterforum. Le type est en train d'évoluer en gourou qui décrète que tel ou tel transfert est conforme à ce qu'il avait vu à l'époque ou qu'il est gâché par le DNR et l'EE.
Hélas, Harris est très complaisant envers les majors (du moins celles avec lesquelles il bosse) et ses explications sur le fait que le 1.66:1 avait disparu des cinémas à l'époque de Barry Lyndon (ou était relégué à des rééditions d'art et d'essai) sont complètement fausses. Le 1.66:1 a été un format utilisé jusque dans les années 80, 90 et 2000, notamment en Europe, par des gens comme Wim Wenders, Rohmer, Claude Chabrol ou même Georges Lautner sur ses Belmondo, lesquels ne sont pas précisément des films d'art et d'essai...