haskil a écrit:L'ABX, est trop séduisant, trop simple, pour être tenu pour la panacée. Donc, je m'en méfie... tout en lui accordant une grande valeur...
Le problème de l'ABX, en dehors de la quantité de travail effroyable que cela représente, c'est que la théorie sur laquelle se base le protocole est peu ou pas connue.
On voit ainsi souvent les erreurs ou approximations suivantes, par exemple :
"Un ABX raté n'a aucune valeur".Faux : on devrait dire "un ABX raté ne prouve pas qu'il n'y a pas de différence audible", ce qui paraît assez évident.
Par contre, il peut avoir une grande valeur si lors du test, la différence cherchée était pleinement et parfaitement audible, même lorsque les erreurs ont eu lieu.
Exemple : en passant de A à X, vous entendez clairement l'ouverture de la scène sonore, la lisibilité du message, et la remontée du médium que vous connaissez par coeur pour les avoir entendus 20 fois en passant de A à B. Vous votez donc X=B en toute confiance. C'est une erreur, en fait X=A.
Pour moi, un tel résultat (qui a déjà été obtenu dans certains tests, notamment de câbles secteurs) est édifiant. Jamais je ne dirais qu'il n'a "aucune valeur" et "ne prouve rien".
Il s'ensuit qu'il peut être très intéressant de noter par écrit ses impressions au fur et à mesure du test.
"Il faut 14 bonnes réponses sur 15 pour démontrer qu'une différence est audible".Généralement faux. Tout dépend du contexte, du nombre d'auditeurs, de la façon dont le test est conduit...
Déterminer si un score est significatif ou non est la partie la plus compliquée du test. J'ai pas mal écrit sur le sujet dans les forums.
Sans entrer dans d'interminables détails mathématiques et protocolaires, rappelons qu'il est essentiel que le score à atteindre soit fixé après le protocole complet (nombre d'auditeurs compris) et avant le début du test. Important aussi : déterminer de façon stricte avant chaque écoute si elle comptera pour le test ou pas. On ne revient pas dessus ensuite. Tant pis si on réussit à l'entraînement et qu'on échoue au test : il faut alors reprendre tout le calcul du score à zéro, et recommencer un nouveau test complet, avec protocole modifié pour pouvoir rattraper l'échec précédent.
"Il est impossible d'ABXer l'émotion".Absolument faux : rien n'interdit à l'auditeur de voter X=A quand il est émotionné et X=B quand il ne l'est pas.
"Les commutations rapides ne permettent pas d'écouter dans des conditions optimales"C'est à la fois vrai et faux, selon ce qu'on veut dire.
C'est vrai, les tests ABX où le protocole impose des écoutes de durées déterminées, dans un ordre déterminé, rendent la réussite du test vraiment difficile pour les auditeurs. Par exemple 10 seconde de A, dix secondes de B, dix secondes de X et donnez votre réponse : Gare à la casse !
Mais il n'est pas tout-à-fait juste de dire que c'est une limite propre à l'ABX.
Pour les différences immédiates, ce n'est pas une limite : l'ABX peut, et devrait toujours, à mon avis, donner toute liberté à l'auditeur. Personnellement, pour réussir des ABX difficiles, il n'est pas rare que j'écoute une vingtaine de fois les A, B, X, et même Y (l'opposé de X, qui est donc lui aussi inconnu) quand le logiciel me le propose, avec des pauses allant jusqu'à 10 minutes entre certaines écoutes, avant de pouvoir donner une réponse certaine. Parfois, je décide même de changer d'extrait musical en plein test, et je me réentraîne sur un autre extrait avant de poursuivre.
En revanche, pour des différences à long terme, qui ne s'entendent qu'après plusieurs jours, l'ABX pose des problèmes logistiques difficilement surmontables. Kiang a réussi cet exploit, et répartissant le score sur 23 auditeurs volontaires, chacun ayant écouté chez lui pendant une à deux semaines un câble maquillé. Pour la petite anecdote, c'est dans ce test que les erreurs les plus énormes ont été commises par les auditeurs (le jour et la nuit entre deux fois le même câble).