J'espère que je ne l'ai pas prêté et qu'on n'a pas oublié de me le rendre. Faudra que je plonge dans mes cassettes.
Deux symphonies de Brahms d'une tension insoutenable, d'une énergie et articulation dans l'épaisseur même du son tellement éloignées de la fausse image que certains se font de cet immense chef tenu pour être le Boss de son vivant par ses confrères : Svetlanov, Mravinsky (admiration réciproque), Bernstein (adulé par Svetlanov), Kleiber, Maazel tous l'admiraient et se foutait des jets, du voilier, de la jet set.
Qu'il ait eu une forte personnalité, pas toujours facile n'est pas moins vrai, mais quel artiste et combien sont injustes les poses snobinardes ou conformistes à son égard. Fut un temps, voici 30 ans, ou dédaigner Karajan allait de pair avec le fait que certains clamaient qu'ils n'avaient pas de télévision !
C'est fini ! Le temps oeuvre pour le maestro qui était un homme plus modeste que ce que l'on dit. Agé, il avait reçu un journaliste du Monde de la musique pour un entretient. Comme il se sentait pas bien assis au fond de la pièce de sa maison. Il a demandé à ce journaliste (pas moi, hélas!) de le porter dans ses bras jusqu'à un fauteuil. Ce qu'il a fait, tenant Karajan dans ses bras comme on porte un enfant qui dort.
Le grand Karajan ainsi sous le pouvoir d'un homme plus jeune, plus costaud ! N'est-ce pas l'antithèse du personnage décrit par certains?
Quand l'entretiens fut tapé, je le lui ai adressé par courrier avec des exemplaires du MOnde de la musique. Il a rappelé pour dire : "vous féliciterez le journaliste, je n'ai qu'un mot à changer : devant Anne Sophie Mutter, retirez "petite", car si elle était jeune à cette époque, elle était déjà grande. Mais passez moi votre secrétaire de rédaction, car je crois que c'est son travail. Et je l'ai passée à cette secrétaire de rédaction qui n'en revenait pas.
Respect du travail des autres, s'adresser à qui il doit. J'en connais peu qui ont ces égards : Riccardo Chailly, est un de ceux là.
Se souvenir aussi de sa fantastique gentillesse pour Clara Haskil au cours d'une longue tournée en Europe. Et c'était pas pour un pin up qu'il a developpé des trésors de tendresse et d'attentions : pour une vieille bossue, bourrue qui jouait comme il l'a écrit avec une évidence qui rendait tout facile en répétitions comme au concert.
Non, trop de gens ont été injustes pour un chef génial et un homme qui a focalisé sur lui seul les reproches légitimes qu'on a pu faire à certains musiciens pour leurs accointances avec le parti nazi ! Lui ne n'était fondamentalement pas. Son art de la direction d'orchestre, surtout dans ces jeunes années, était fondamentalement tourné vers la lumière, la précision, la vivacité contraires à une vieille école allemande.
Alain