J'ai également été absent de HCFR depuis un bon moment, et là je m'attendais à une discussion interminable suite à la disparition de Stockhausen... peu de réactions finalement.
xavierscriabine a écrit: J'aimerais bien comprendre moi aussi, au moins ce que les amateurs ressentent ou comprennent de cette musique.
Je ne saurais absolument rien expliquer, mais c'est bien possible que le manque d'intérêt pour ce type de musique (comme son équivalent dans l'art plastique d'ailleurs) soit dû à une série de confusions terribles. Quelques exemples :
Si on prend le quatuor en hélicoptère et qu'on le regarde sur YouTube, c'est clair que n'importe quelle production hollywoodienne est mieux réussie. Puis, avec des références comme Apocalypse Now, comment dire que l'oeuvre de Stockhausen dans ce cas est "majeure", alors que celle de Coppola serait "mineure" ? Le public s'y perd dans les échelles de valeur.
Mais à l'inverse, si on a la chance d'écouter en live des percussions du même Stockhausen, de préférence dans la nef d'une cathédrale, on mesure à quel point une telle pièce peut nous amener à vibrer. La beauté des sons, la magie de l'instant, l'enchevêtrement des interventions. Il reste tout de même la question de la partition : à observer les instrumentistes, on voit qu'ils suivent les indications du compositeur avec une précision extrême... est-elle nécessaire pour créer cette magie ? quelquefois on se dit qu'en improvisant quelques traits, le résultat serait pareil... ça brouille encore les pistes... je n'ai pas de réponse...
L'exemple ultime : celui du célèbre 4'33 de John Cage, où l'interprète reste silencieux pendant un certain temps (en 3 mouvements s'il vous plait).
Une première approche serait la suivante : on se dit qu'il se fiche du monde. Mais ce silence en fait n'en est pas un, et c'est là toute l'histoire. Pendant l'exécution de cette pièce, l'auditeur un tant soit peu attentif peu s'apercevoir qu'il est en réalité plongé dans un bain de bulles sonores : ronronnement de la clim, klaxon à l'extérieur de la salle de concert, ricanement venant de la rangée du fond, râclure de gorge, froissement de robe, etc... Vous pensez que ce n'est pas de la musique ? eh bien pour John Cage, c'est justement ça le fondement même de la musique, le SON ! Il a raison et il met le doigt dessus ! C'est courageux et c'est pas se ficher du monde, non ?
Ca a l'air très sérieux, mais (car il y a un "mais") lorsqu'on le voit à une émission TV de divertissement comment il malmène sa salle bain - cuisine en s'amusant de ces fameux "bruits" (mixeur, carafe d'eau, grille-pain, etc...) et avec quel amusement (!), on est de nouveau face à un jeu de pistes et on ne sait plus où aller.
Cette confusion est à la fois ce qui est intéressant à détecter (AMHA, je ne demande à personne de partager cette opinion) car on ne se contente pas de l'apparence et de l'évidence, mais est peut-être aussi ce qui détourne le public de ces démarches... et ce pour la même raison (apparence et évidence étant confortables).
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