haskil a écrit:Pendant des années, ils nous ont bassiné avec les mêmes ficelles et les mêmes concepts : chaque génération nouvelle efface les défauts de la précédente dont on ne nous avait rien dit... et ces revues ont inventé le concept de rodage pour faire passer les défauts les plus criants des appareils, le concept de musicalité pour introduire la subjectivité la plus débridée dans l'appréciation des électronique de façon à clouer au pilori les appareils japonais dont ils ne parlaient pas, préférant parler de la myriade de petites marques et leurs distributeurs qui leur assurait le fonds de roulement de trésorerie nécessaire à leur activité...
Dans un livre qui fut un temps célèbre et dont j'ai oublié le titre, Daniel Toscan du Plantier avait écrit "donnez-nous des journaux, pas des supports publicitaires". La presse hifi a préféré être un support : elle a éliminé la rationalité de ses colonnes, éliminé les mesures complètes (1), les bancs d'essais complets et sérieux au profit du délire subjectif des comptes-rendus d'écoute : elle a perdu du terrain inexorablement. Ne sachant même pas profiter du Net pour mettre toutes les mesures sur la toile et n'en garder qu'une partie sur le papier... avec un abonnement double à la clef...
(1) Les patrons de presse et les éditeurs sont souvent responsables : ils ne savent pas quoi faire avec les revues spécialisées et pensent que pour élargir la base de lectorat, il faut "dé-techniciser" le discours, ne pas employer de vocable technique, s'adresser au plus grand nombre. Cette erreur colossale fait fuir les lecteurs. Un bon journal doit être cru par le spécialiste et ne pas rebuter le profane qui s'intéresse à son contenu...
Je découvre seulement maintenant ce post mais à ma décharge, le 4 août je bronzais tranquillement...

Un gros +1 concernant ton analyste mais je trouve tout de même quelques circonstances atténuantes à ses tristes revues.
Il y a en France une forme de "culture magazine" que je juge un peu malsaine. Je ne sais plus si c'est toujours le cas, mais j'avais lu il y a quelques années que nous étions les champions de monde en terme de nombre de magazines. On trouve
de tout en kiosque de la revue des amoureux du baudet du Poitou, les spécialistes des maquettes des frégates du XVIIIeme siècle les adeptes de la cuisine tibétaine aux revues techniques les plus pointues ou aux hebdomadaires d'info, la presse
auto et sportive jusqu'au lancer de nains etc etc.
Autrement dit subsiste l'idée que quelque part, si on est passionné par un sujet, on est capable de lancer une revue. Ca peut partir d'un bon sentiment mais hélas c'est loin d'être suffisant pour proposer un produit de qualité.
La vulgarisation terme que je trouve d'ailleurs toujours un peu péjoratif, est un art des plus difficile qui soit. Elle suppose contrairement à ce que l'on pourrait croire au départ, une connaissance et une maitrise quasi exhaustive du sujet
traité et là, force est de constater que c'est très loin d'être le cas amha d'une bonne partie des magazines et revues diverses. La genèse de Haute-Fidélité est édifiante à cet égard ce n'est pas un groupe de spécialistes qui ont créer cette
revue...par exemple, le co fondateur P.Y Maton était un ancien de Prestige Audio Conseil et diplômé du Celsa en sciences de la communication et de l'information. L.Thorin longtemps rédacteur en chef était quant à lui juriste ou avocat de
formation je ne me rappelle plus très bien.
Autre écueil, il faut être lu et donc qu'à la base existe un lectorat potentiel assez nombreux hors, je ne suis pas certain que ce n'ai jamais été le cas en France. Il y a pas mal d'années, j'avais eu l'idée de proposer un sujet "magazine"tv sur l'univers des audiophiles ( durées standards : 6mn, 13, 26 et le saint Graal le 52 mn mais là je n'étais pas assez fou croire que c'était possible...

était finalement dans l'esprit d'une étude de marché mais avec mes moyens limités du bord. En croisant, la CA des magasins, en discutant avec des importateurs et fabricants y compris étrangers principalement anglais et teutons je suis
arrivé non pas hélas à des résultats suffisamment précis et fiables mais à des ordres de grandeur. Et là, surprise, le marché français était (est toujours ?) très réduit comparé a ceux de pays comme la GB, l'Allemagne et même l'Italie.
Cette petitesse du marché entraîne fatalement des difficultées et provoque des effets pervers pour la presse. Dès lors que l'on a affaire à un microcosme il va être coton de survivre sans compromission. Je vois ça aussi par ex dans mon travail avec le journalisme politique. Même avec la meilleur volonté du monde, des liens de copinage, d'interdépendance se nouent et nuisent à l'objectivité ou mènent à la paresse intellectuelle.
Pour résumé, je pense que dès le départ il n'y avait pas la place pour plusieurs revues traitant de la hi-fi en France et même pour une seule revue pas facile d'échapper à l'effet microcosme, à la dépendance des annonceurs.
Quand tu vois qu'en photo sujet qui touche un public autrement plus vaste une seule revue ne mache pas ses mots et peut se permettre de se passer d'annonceurs c'est édifiant sur l'état de la presse consumériste dans notre beau pays.
L'évolution on l'a vu. La NRDS était dirigé par J.Hiraga à la compétence technique incontesté mais qui tout de même défendait dès le départ sa chapelle HR, tubes et triode. Il y a eu de moins en moins de mesures dans la revue il suffit de feuilleter les anciens numéros (diagramme de polarité d'une enceinte, distorsion à divers puissances, réponse sur signaux carrés etc.) Les essais moins nombreux et moins fournis, la disparition de rubrique comme "l'Audiophile" plus technique.
Haute Fidélité a connu des phases diverses : quelques mesures puis plus du tout, L'apparition, la disparition puis la réapparition de notes sur quelques critères, des descriptifs techniques erronées ou simple copie du dossier de presse faute
de techniciens compétents etc etc.
Le meilleur exemple de la faiblesse quantitative et éditoriale de la hi-fi en France c'est Diapason et dans une moindre mesure le Monde de la Musique/Classica.
Que la rubrique hi-fi d'un magazine traitant de musique classique ait pris une telle importance dans le monde de la hi-fi est révélateur du malaise. Un seul Testeur J.M.Piel puis T.Soveaux (qui d'ailleurs a copié jusqu'à la caricature le style, les
tics d'écriture de son prédécesseur.) lié à des marques et concepteurs non pas par la pub, mais par des liens de copinage, connaissances ou "d'effet microcosme" évoqué plus haut. Essai souvent effectués sur son propre
système et pièces dont le moindre que l'on puisse dire est qu'ils ne sont pas universels (pièce traitée mais très longue et étroite dans les 3 mètres, SE 300B Shindo sur des 604, peu de matériels disponibles en permanence à la revue.
L'autre grande difficulté pour la presse hi-fi est l'absence d'un vocabulaire descriptif normalisé à l'image de l'œnologie par exemple. Le sens des mots peut différer selon les testeurs et c'est seulement avec du recul, du temps et que l'on peut précisément avoir une idée de la signature sonore d'un appareil par rapport à son expérience, son ressenti et son vocabulaire propre. Ca ne facilite vraiment pas les choses sachant que même en essayant d'être le plus objectif possible chacun
entend différemment et qu'inévitablement on a des priorités des préférences dans la quête de la "haute fidélité.
On trouve la même difficulté dans les forums. A moins de bien connaître l'auteur du cr pour l'avoir lu depuis longtemps sur des produits que l'on a soi même écouté voire mieux avoir fait des écoutes communes, difficile de savoir comment
l'appareil sonne réellement. Par exemple toi quand tu décrit un appareil j'ai je pense avoir une idée assez juste de sa signature sonore.

Je ne suis sinon pas tout à fait d'accord avec ton analyse concernant le "Japan bashing" dont aurait et font preuve les revues.
Des appareils japonais de marque grand publique ont régulièrement été récompensés par les revues. Je pense tout particulièrement à la RDS ou à Diapason ( Yamaha série AX, Onkyo, petit Denon 280 etc) Seul HF s'est clairement livré à un dénigrement assez systématique. Bon, je suis d'accord les récompenses pour les appareils de marques "grand public dans la RDS et Diapason ont un petit arrière goût d'alibi parfois...

Les constructeurs japonais ne sont pas innocents non plus. Nul ne peut contester leur apport dans le monde la haute-fidélité sans eux il n'y aurait pas de HF domestique tout simplement et on leur doit la fantastique démocratisation des
appareils permettant une meilleure fidélité au son . J'ai encore le souvenir de la chaîne assez bdg de mes parents au début des 70's qui sonnait avec toutes les réserves liées de la mémoire auditive, moins bien qu'une mini chaîne à 500 euros
d'aujourd'hui pour un coût infiniment supérieur. Sans les nippons pas de composants, sans parler d'une bonne partie des schémas.
Cependant, les premiers qui ont inventé le blanc qui lave plus blanc ce sont eux...quid des pubs avec chiffres à l'appui des distorsions à 40' zéros après la virgule, quid du "son parfait" vendu à toute les sauces ? Jeune étudiant dans les
années 80 j'avais écouté de produits surtout des amplificateurs intégrés des choses bizarres : tous les 500FF il y avait un ampli chez les constructeurs japonais généralistes et le plus cher n'était pas forcement le meilleur mais la signature
sonore changeait un peu à la manière des CD HDG d'aujourd'hui. Je me rappelle que peu de constructeurs proposait un gamme avec une signature sonore suivie (c'était des intégré entre 2000 et 5000FF Chaque gamme était remplacé tous les
ans ou deux ans et bien entendu, enterrait la précédente. La politique commerciale est aussi responsable de cette campagne de dénigrement j'ai un exemple en mémoire. Vers 1992 je crois Sony sort une enceinte la "Voce" dont la
caractéristique était de posséder un tweeter tissé par des bactérie je crois. L'enceinte proposé à 10000FF à l'époque avec son pied dédié était magnifiquement finie. Le son n'était pas en reste, très loin des poncifs sur le son japonais ultra
défini et chirurgical. De très beaux timbres doux et charpentés, une image parfaitement construite, peut un équilibre un poil physio mais si on m'avait dit que c'était une Rogers ou une Spendor je n'aurais pas bronché.
Pas mal de revendeurs étaient intéressés par cette enceinte mais Sony exigeait de prendre toute la gamme pléthorique...Bilan des courses l'enceinte n'a pas eu le succès qu'elle aurait du avoir et les fins de série ont fini chez Magma.
Et des comme ça j'en ai plusieurs...