Antony a écrit:Si ce post déchaine les passions c'est qu'on l'aime bien La NDRS&HC, mais tout le monde est d'accord sur un point : la complaisance avec les annonceurs est manifeste, comme dans le dernier n° ou il y a un "comparatif" tube/numérique audio-research, c'est du publi-reportage déguisé !
Pour les films, si je te cite, le pianiste, de nuremberg à nuremberg, la liste de schindler, 2001 Odyssée de l'espace,qui font partie de ma DVDthèque, j'appelle pas ça du bourrin, et en plus certains comme le pianiste méritent une installation de qualité.
Il y a qd même des films qui valent la peine, sinon ça ne s'appelerait pas 7eme Art, mais il y en a si peu...
Les gens qui font du HC semblent quand même beaucoup plus ouverts, que les gens de la Hi-fi qui semblent nous considérer comme des bourrins sans subtilité.
Non, pas du tout, on redoute simplement que le HC grignote encore du terrain sur la hifi (d'ailleurs je le sens venir ce coup la...
)
Parmi les lecteurs de la RDS, on trouve un noyau dur d"audiophiles qui ont fait évoluer leur système hifi vers le multicanal et/ou le home-cinéma. Curieux, techniques et avides de tout ce qu'il peut améliorer leur perception musicale, il veulent profiter des nouveaux formats audio ( SACD, DVD-Audio),
Vivi, vous surfez sur la vague, car ceux qui peuvent se permettre du HC sans compromis ne sont pas le gros de la troupe...
Bon j'avoue: j'ai un système HC 2.1 dans le salon !
Quelques réflexions à la volée:
-Affirmer que le marché de la vidéo à la maison est limité qualitativement est une vue de l'esprit: d'un regard dans ma vidéothèque, j'ai à disposition en DVD des oeuvres aussi diverses que des films de John Ford, Fellini, Kurosawa, Tarkovski, Angelopoulos, Polanski, Boorman, Clouzot, Renoir et tant d'autres encore...En cherchant bien, je parviens même à dénicher des films presque introuvables de cinéastes comme Paradjanov, Makavejev ou bien Kawalerowicz. On peut discuter du bien fondé des politiques éditoriales, de la qualité des éditions elles-mêmes, mais pas de l'ampleur du choix qui est au offert aux yeux ébahis des consommateurs. Pärfois, j'en pleurerais: je connaissais le cinéma d'avant, où l'on guettait la reprise d'un film arménien et l'on s'y rendait comme en pélerinage. Je savais que si je ratais ce film, j'avais peu de chances de le revoir avant cinq ans voire dix ans. On imagine mal encore l'impact du DVD sus habitudes de spectateurs et sur les difficultés que peut engendrer la vidéo pour le cinéma lui-même, c'est là un autre sujet qui me conduit directement au deuxième point.
-Il convient de se méfier de certains leurres: un DVD en tant qu'objet est la copie dégradée de l'oeuvre cinématographique et non une simple reproduction comme certains marchands veulent le faire croire. Ce que vous voyez à l'écran n'est pas ce que vous pouvez voir dans une salle, l'image est différente: non plus cinématographique mais vidéo (et compressée durement qui plus est). Je n'aborderai pas plus avant (pour cause de hors-sujet flagrant) les différences qualitatives entre la vidéo et le cinéma, sinon pour un autre exemple: le rapport du spectateur à l'image est modifié. L'écran de cinéma suppose (et induit) un mode de regard (actif, fragmenté parfois) qui s'oppose au contrôle que nous avons sur l'image vidéo. Deuxième point: le choix que je vantais il y a un instant n'est-il pas pour partie un miroir aux alouettes. Si vous aimez la musique classique ou la littérature, vous me comprendrez aisément: jamais autant aujourd'hui les plus grandes oeuvres de la littérature, le savoir, les peintures n'ont été autant accessibles, disponibles à l'homme avide de connaissance et de plaisir esthétique. Pour autant, le choix théorique ne remplace pas le cheminement nécessaire à l'humain, l'éducation du goût du regard seul rempart à la consommation qui détruit les oeuvres. Je m'interroge parfois quand un film d'action de série B voisine avec un chef d'oeuvre de Murnau: comment le "vidéophile" choisit-il? L'éducation artistique risque d'être immérédiablement remplacée par la mode, ou pire encore par le pouvoir de l'argent. On le voit au cinéma comme dans la musique d'aujourd'hui: celui qui est le plus fort (le plus riche) peut imposer et stéréotyper ce qui est vu, lu ou entendu. Quand l'esprit critique est remplacé par un rayonnage alphabétique et le choix par le matraquage marketing, les temps ne sont pas joyeux. Vous pardonnerez cette trop longue parenthèse.
-J'ai vu fleurir ici des comparaisons entre la bande-son des films de cinéma et le son des disques (exclusivement audios). Il me semble que les rapprochements sont hasardeux et la réflexion insuffisante. D'abord, je crois que dans l'esprit des ingénieurs du son au cinéma, il ne fait guère de doute qu'une bande-son de film est moins subtile qu'une prise de son de musique classique. Cela pour de nombreuses raisons, fastidieuses à développer. Je ne dis pas pour autant que le son au cinéma est moins intéressant ou moins "bon" tout simplement. Non, l'enjeu est différent, mais pas moins passionnant. Il ne faut pas sous-estimer que l'apport d'une restitution la plus fidèle possible est essentielle pour le cinéma: la qualité des voix (timbre notamment) pose d'énormes problèmes aux preneurs de son (direct) sur un tournage. De même comme pour une prise de son de concert, l'ambiance sonore est essentielle. Si vous captez un bruit de pas, où a lieu ce pas? Dans un appartement, dans une rue, avec de l'écho ou non, quelle qualité voulez-vous donner au son? C'est un point central, au cinéma, le son participe au sens, autant que ce que les béotiens nomment l'image. Une des premières choses que l'on apprend en théorie du cinéma, c'est que dans le cinéma sonore, l'image est constituée de deux facteurs: le visuel et le son. La réunion de ces deux facteurs donne une image cinématographique (pour ceux que ça intéresse, voir Gilles Deleuze "L'image-mouvement" et "L'image-temps" ou bien encore les essais de Michel Chion ou de sémiologie de Christian Metz). Un bon système de reproduction du son au cinéma est aussi important que la qualité de la projection, et d'une salle à l'autre, tout spectateur peut s'en rendre compte. Techniquement des progrès énormes sont encore possibles, en terme de finesse de reproduction, tout comme la pellicule peut encore progresser énormément. Aujourd'hui ce sont des enjeux économiques qui brident la qualité du son au cinéma, tout comme celle des images cinématographiques (et je ne parle même pas de la volonté délibérée d'imposer le numérique au cinéma, enjeu économique majeur pour les studios dont Sony qui envisagent le cinéma comme un pion dans une vaste globalité d'images...La pellicule a déjà perdu l'essentiel, bien que je le regrette amèrement, mais là encore c'est un autre sujet).
La question du son est d'autant plus cruciale que si je puis permettre, le cinéma ne sait toujours pas forcément comment envisager la place du son sous l'angle de l'esthétique. Alors oui, je comprends bien la frustration de mélomanes devant les pistes son tape à l'oeil de nombreux films "hollywoodiens" (au sens propre ou figuré), l'effet, le coup de poing dans l'estomac et un jeu puéril sur la localisation du son fatigue n'importe quelle oreille ou presque. Pourtant au-delà de l'atmosphère sonore (passionnante) se pose la question du point de vue. Comme la place de la caméra, le point de vue sonore participe à la place du spectateur et interroge notre relation de savoir. Il n'est qu'à voir (ou entendre plutôt) comment par exemple l'effroi au cinéma naît à la fois de ce qu'on voit ou de ce qu'on ne voit pas, que de ce qu'on entend ou de ce qu'on entend pas. Qui n'a jamais eu peur en entendant des sons incompréhensibles, provenant du hors-champ et se rapprochant? Je trouve terrifiante par exemple l'utilisation du son dans une longue séquence d'Eyes Wide Shut où le personnage de Tom Cruise déambule dans New-York suivi par une inquiétante silhouette...Quels sont les bruits que nous entendons, et ceux que nous n'entendons pas...Comment faire qu'une voix nous rassure ou bien nous inquiète? Ou bien encore comment traiter le son dans un film comme Alien? Quelle matière lui donner?
Au cinéma, le son et l'image sont liés. La place d'un micro, sa directitivité (ce qu'il capte ou ne capte pas) est tout aussi importante que la place d'une caméra ou des projecteurs. Si cela n'est pas toujours clair, c'est en partie à cause d'un malentendu naturaliste: beaucoup de cinéastes considèrent encore le son comme accessoire et subordonné au visuel. Tout ce qu'ils demandent au son, c'est de ne pas se faire remarquer (ou à contrario de bien se faire entendre). Les enjeux y sont pourtant énormes: regardez comment des cinéastes comme Stanley Kubrick, Robert Bresson ou encore David Lynch traitent le son au cinéma, c'est un travail d'orfèvre: un son n'y est pas par hasard mais est le fruit d'une réflexion esthétique poussée. Ce que je fuis au cinéma, c'est le pseudo réalisme du son qui veut à tout prix nous faire entendre tout ce que nous sommes supposés entendre dans un lieu précis, c'est une impasse. Entre le naturalisme sonore d'un Rohmer (au son direct particulièrement intéressant) et à l'artifice extrème de David Lynch, le son au cinéma est fascinant et certainement pas une reproduction mineure pour tout système visant justement à traduire des sons.
-Enfin, le cinéma fournit des pistes qui sont je l'espère liées à l'avenir de la hi-fi. La présence d'une voie centrale au cinéma est un atout pour moi essentiel qui apporte une profondeur supplémentaire par rapport à la stéréo, notamment pour le traitement des voix (au cinéma). Il me semble donc que plus que d'opposer la finesse de la hi-fi (et donc de la musique), à la pauvreté du cinéma, on peut réunir les deux: le développement de supports comme le DVD-audio et plus encore le SACD m'apparaît valable, et je crois que la hi-fi multicanale bien pensée pourrait s'avérer un avenir riche pour tout le monde. À condition évidemment de s'intéresser à ce que les multiples canaux apportent réellement au son, et non comme un gadget.
Bien cordialement.