jfacoustics a écrit:Bonjour à tous,
Voilà bien longtemps que je ne me suis plus exprimé dans le cadre de ce forum. La raison en est simple : après avoir, durant plus de 40 ans, investi la plus grande partie de mes loisirs dans une dévorante passion pour l’audio, j’ai ressenti le besoin d’explorer d’autres univers. Mon retour est ponctuel et se limitera au compte rendu de ce que, il y déjà quelques semaines, j’ai entendu chez Olivier. Notre ami Robert était présent, lui aussi.
Inutile de décrire cette installation. La photo reprise à la page précédente est fidèle au ressenti visuel du visiteur et le matériel mis en œuvre a été largement commenté.
Le seul aspect qui mérite une explication concerne le(s) point(s) d’écoute. Pas de divan chez Olivier. Il y a trois assises mais celles-ci sont alignées l’une derrière l’autre sous forme de sièges individuels placés en rang d’oignon. L’image stéréophonique y trouve son compte puisque chaque auditeur se trouve idéalement placé à la pointe du triangle stéréophonique. On ne peut, toutefois, traduire valablement les ressentis procurés par cette installation sans souligner les différences de rendu selon la position de l’auditeur.
En fonction de ses particularités auditives, Olivier préfère se positionner au premier rang. A cet endroit, l’empreinte sonore du local est quasiment absente. L’image stéréophonique, particulièrement large, n’est pas sans rappeler les sensations procurées par une écoute au casque et le message sonore est d’une précision diabolique. Toutefois, tant pour moi que pour Robert, c’est un peu « too much » et après avoir voyagé entre les trois assises, c’est à une position intermédiaire entre le premier et le deuxième rang que nous avons trouvé le meilleur équilibre.
Ceci acquis, reste à analyser en quoi le compromis actuel se distingue des précédents. Pour ce qui concerne les registres médium et aigus, je ne constate pas d’évolution importante par rapport à mes dernières écoutes. Voilà belle lurette que les électroniques maison conçues et réalisées par le maître des lieux s’associent à merveille aux pavillons nourris par les chambres TAD. D’une écoute à l’autre, au gré de petites évolutions des réglages, je ne ressens davantage que de subtiles variations sur un même thème. L’âge de la maturité semble définitivement atteint. C’est ultra-propre, magnifiquement fouillé et particulièrement fidèle au timbre des instruments et des voix. Jamais, depuis qu’Olivier a décidé de se passer de tweeter, je n’avais ressenti pareille absence de frustration dans l'extrême aigu. Contrairement à mes anciennes convictions, je ne suis plus certain que, pour un usage personnel, j’ajouterais encore une voie supplémentaire. Une oreille plus jeune porterait-elle le même jugement ?
Venons-en maintenant à ce qui constitue
LA métamorphose, le mot n’est pas trop fort, de l’installation. Jusqu’il y a peu, celle-ci proposait un grave de belle ampleur qui convenait parfaitement aux œuvres anciennes, qu’elles soient de chambre, symphoniques ou lyriques. Sur le jazz ou la variété par contre… Eh bien, oubliez cela. Voilà qu’elle nous sert une Patricia Barber et un Michaël Jackson à faire pâlir un tenancier de boîte de nuit (j’exagère à peine). C’est punchy, dynamique, rapide mais, pour être tout à fait honnête, pas aussi profond que ce que la présence de HP de 46 pouces ne laisserait supposer. En cause : les lois de l’acoustique ainsi qu’un choix délibéré fait par Olivier. Comme dans de nombreux lieux d’écoute domestique, le parallélisme des murs latéraux provoque, sur son axe central, une annulation de phase dans une gamme de fréquences avoisinant les 30 - 40 Hz. Il en résulte un deep profond, impossible à compenser par l’égalisation. Je connais le même phénomène dans mon local et, pour y remédier, j’ai dû ajouter une voie supplémentaire permettant de combler le trou. Olivier a, pour ce qui le concerne, choisi l’option radicale de couper brutalement les fréquences inférieures à 50 Hz. Un grave un peu court ayant pour effet d’exacerber la rapidité et la dynamique, le résultat impressionne. Et, il faut bien le reconnaître, l’absence de l’ultime soubassement passe, bien souvent, inaperçu. Ce sont les percussions du Bartok (enregistrées par Igor) qui m’ont servi de révélateur. Rien de bien méchant mais un petit manque de poids qui contraste avec mes habitudes d’écoute. Apparemment, pour Olivier, le gain de netteté prime sur l'absence de profondeur. C’est un choix que je respecte.
Il serait toutefois dommageable et injuste de juger un tel système, essentiellement, sur base des quelques remarques émises ci-dessus. Dans sa globalité, celui-ci a atteint une maturité jusqu’ici inconnue. L’aisance dynamique, que seuls les pavillons autorisent à ce point, donne à la reproduction un apaisement et une sérénité sans pareils. Un superbe enregistrement de quatuor à cordes nous fait entendre le travail d’Olivier sous son meilleur jour. Facilement localisable, ce qui, en l’espèce, représente un exploit moins banal qu’il n’y paraît, chaque instrument prend vie avec une présence palpable rarement atteinte en haute-fidélité. Du grand art. Bravo Olivier, tu es la preuve vivante que l’acharnement finit souvent par payer.
Mon cher Paul. Je lis et je relis ta communication, avec plaisir certes mais aussi avec un peu de nostalgie. Il fut un temps en effet où, sur un autre forum, nous échangions fréquemment nos impressions sur les écoutes que nous avions pu faire chez nous ou ailleurs.
C’était le temps où tu étais un audiophile passionné qui partageais volontiers son savoir en acoustique et son expérience renouvelée dans la construction puis l’agencement des enceintes, tandis que moi-même j’avais encore des oreilles qui me permettaient de porter un jugement critique assuré sur ce que j’entendais.
J’espère cependant que tu voudras bien encore venir de temps en temps à la maison pour renouveler avec Robert nos auditions amicales, parfois critiques, et que, quand les transformations de ta maison seront terminées, tu nous inviteras dans ton auditorium à la mise en œuvre si originale où nous avions tant de fois écouter et discuter ensemble. Il serait peut-être utile que tu rappelles aux internautes ce qu’est ton auditorium et pourquoi il ne ressemble à aucun autre.
Il est vrai que la mise en file indienne des trois fauteuils individuels d’écoute forme avec la base des enceintes autant de triangles stéréophoniques. C’est la seule manière, comme l’a relevé Igor ici même, de permettre à plusieurs auditeurs de bénéficier ensemble d’une écoute à haute-fidélité où la magie de la stéréophonie soit préservée. Une telle disposition n’est évidemment possible que si l’on dispose d’un local qui le permette comme mon grenier (qui n’a cependant pas 1.000 m³ comme l’a cru Igor mais plus raisonnablement environ 300. C’est quand même assez grand!).
Paul a très justement noté que chacun des auditeurs placés ainsi à la queue-leu-leu ne recevra pas tout-à-fait la même écoute, celle-ci devenant de plus analytique à plus globale en s’éloignant de la ligne des enceintes, avec une perception de l’équilibre des registres sonores légèrement différente selon les positions, comme c’est d’ailleurs le cas aussi dans les lieux de concerts selon que l’on se trouve assis plus ou moins près de l’estrade.
En cours d’audition, Paul qui s’était d’abord assis sur le premier fauteuil puis sur le second a estimé que la meilleure place d’écoute se trouvait entre les deux fauteuils. Cette même constatation avait d’ailleurs été faite par L’Indien lors de sa visite chez moi. J’ai donc reculé toute la queue des fauteuils pour que le premier, le lieu d’écoute privilégié, soit à l’endroit choisi par Paul et par L’Indien. Il s’en est fallu d’un recul de quelque 50 cm. J’ai décidé de conserver définitivement cet emplacement malgré le fait que mes oreilles y supportent plus difficilement la réverbération de la pièce ; je m’y fais.
Avec des pavillons, surtout avec des pavillons comme les miens à 15 tuyères (ALTEC 1505), la position d’écoute modifie aussi la perception de la diffusion du pavillon. En reculant le fauteuil, la membrane mobile du moteur TAD devenait visible par la tuyère centrale, ce qui avait donné instantanément à Paul l’impression d’une audition plus précise et sans doute plus nuancée mais qui s’est révélée ensuite, après des jours d’audition, plus projetée et plus fatigante, en définitive moins agréable.
J’ai donc légèrement modifié la position des baffles centraux en les orientant de quelques degrés vers l’intérieur, de façon à ce que l’auditeur du premier fauteuil voit en face de lui en regardant le baffle la séparation entre la tuyère centrale de celle d’à côté, la bobine mobile demeurant masquée. Cette position assure une écoute agréable (j’allais dire musicale ; quelle horreur pour quelques-uns!) à la fois très précise dans sa localisation et parfaitement diffusée en largeur et en profondeur. Cette faculté de localiser et de diffuser constitue le grand avantage d’un système à pavillons bien mis au point ; avec le désavantage cependant de devoir écouter à partir d’un point G assez circonscrit.
Cette légère réorientation a nécessité une minime remise à niveau de la courbe de réponse que j’ai programmé sur mes BEHRINGER. Je communiquerai la courbe de réponse de ce nouveau preset lors de ma réponse à l’intervention d’Igor.
Paul a écrit que la différence appréciable qu’il a constatée entre le souvenir de ses auditions passée et celle qu’il rapporte aujourd’hui se situait dans la reproduction de grave. Ce n’est pas tout-à-fait exact.
La reproduction de médium et de l’aigu ont eux aussi bénéficié d’un changement important par le fait que le pavillon de medium (issu de la vandalisation d’une vieille VOIX DU THEATRE et mis en doublet acoustique c’est-à-dire privé de son caisson-arrière) qui se trouvait auparavant posé directement sur le sol, a été surélevé de 55 cm, ce qui le met à hauteur d’oreille comme il l’aurait été dans la structure originelle de la VOIX DU THEATRE.
L’amélioration de l’écoute qui en a résulté me paraît certaine comme je l’avais déjà indiquée dans une de mes communications précédentes : non seulement une plus grande étendue de fréquences reproduite par le pavillon de la VDT (200 à700 c/s) mais également une meilleure perception de toutes les fréquences supérieures par le fait que, le pavillon des TAD diffusant plus haut, la répartition dans la pièce de tout le spectre sonore se fait plus harmonieusement. La courbe de réponse relevée avec REW indique non seulement une ligne plus homogène mais également plus étendue vers l’extrémité haute du spectre.
Enfin, il y a le grave dont Paul a remarqué la rapidité mais en y relevant dans un même contexte l’absence des grandes profondeurs. La courbe de REW indique effectivement une chute brutale avant 45 c/s. Il s’agit d’un passe-haut dû à l’acoustique. Il serait sans doute possible de tenter de remédier à ce manque dans la partie la plus extrêmement du grave avec un caisson placé de façon à tromper l’acoustique, c’est-à-dire très proche de l’auditeur. Je ne suis pas convaincu néanmoins que ce soit vraiment nécessaire, du moins pour mon usage qui ne déborde pas sur la musique électronique.
Paul a notamment ressenti ce déficit d’extrême grave en écoutant le concerto pour Corde, Percussion et Célesta de Bela Bartok dans la splendide prise de son d’Igor (Un exemple d’école et un test pour nos installations). Il manquait à ses oreilles une assise profonde pour les percussions. Je ne m’inscris pas en faux contre cette affirmation mais je fais remarquer qu’une autre cause doit aussi être prise en compte. En changeant la place d’écoute que Paul a reculée, la courbe de réponse générale de l’installation a été modifiée. Il est apparu par la suite, après un relevé de REW, que la bande de fréquence entre 300 et 500 c/s avait perdu un ou deux db. Cette perte avait sans doute altéré également le rendu des percussions.
Une précision encore : le filtre coupe-bande auquel Paul fait allusion n’est pas fixé sur la fréquence de 50 c/s et n’a pas pour objet de couper volontairement toute réponse sous cette fréquence. Il s’agit effectivement d’un filtre apparenté à un cross passe-haut de type Butterworth 12db/octave mais qui est centré sur 35 c/s afin de couper les ailes à une résonance combien désagréable à 50c/s.
Cordialement Olivier